Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

Pages

mercredi 22 août 2012

Été violent - Estate violenta, Valerio Zurlini (1959)


La ville côtière de Riccione, durant l'été 1943. Sans se préoccuper de la Seconde Guerre mondiale qui a épargné l'endroit jusqu'alors, des jeunes gens mènent une vie insouciante. Carlo, l'un d'eux, se lie d'amitié avec une jeune veuve de guerre, Roberta. Bientôt, leur relation évolue vers une folle passion...

Été violent entame une grande période pour Valerio Zurlini qui va creuser le même sillon thématique dans ses deux films suivant pour une trilogie consacrée à l'étouffement des sentiments. Dans le second volet de ce cycle La Fille à la valise (1961) ce sera le fossé des classes sociales et de l'âge qui entraveront la relation amoureuse entre Claudia Cardinale et le jeune Jacques Perrin tandis que Journal intime délaisse le romanesque des deux premiers films pour décrire un lien fraternel difficile. Dans Été violent, c'est le contexte d'une Italie proche de la débâcle et d'un régime fasciste à bout de souffle qui viendra éteindre les feux d'une magnifique romance.

Cette guerre pourtant, les personnages semblent ne pas la voir et sa réalité ne se révèlera à eux que progressivement alors que leur monde insouciant s'effondre. Le début du film nous montre ainsi le jeune Carlo (Jean-Louis Trintignant) retrouver ses amis pour de paisible vacances dans la ville côtière de Riccione, comme chaque année. Durant cette fête de retrouvailles, Zurlini montre subtilement comme tous les éléments pouvant rappeler le conflit en cours sont masqués, que ce soit l'ami soldat blessé servi et mis à l'écart ou la radio annonçant des nouvelles du front dont on change rapidement la station pour de la musique dansante.

Cet arrière-plan occupe une place de plus en plus grande dans le quotidien va ainsi rapprocher puis séparer notre couple de héros. Alors qu'un avion allemand rase les côtes, Carlo va rassurer la fille de Roberta (Eleonora Rossi Drago) jeune veuve de guerre. Tous deux vont ainsi peu à peu se rapprocher, comblant mutuellement les vides de leur existence.

Pour Carlo, c'est la découverte de sentiments réels et ardents, loin de la superficialité de la vie qu'il mène avec ses amis (à l'image de la jalousie toute adolescente du personnage de Jacqueline Sassard) tel ce moment où après s'être vanté d'avoir échappé à l'appel des drapeaux il croise un ancien compagnon d'arme du mari de la veuve. Roberta tout d'abord étouffée par les codes stricts de son milieu bourgeois puis par un mariage sans amour s'éveille ainsi pour la première fois à la vraie passion.

Zurlini exprime cet épanouissement des personnages en capturant merveilleusement la montée du désir entre eux. Cela se dévoile d'abord par la retenue, entre regards insistant ou à la dérobée de Jean-Louis Trintignant, attitude distante difficilement maintenue par Eleonora Rossi Drago, la langueur de l'été et la sensualité de leurs corps juvénile se chargeant de mettre à mal ce désir contenu grâce à de merveilleuse idée de mise en scène (Roberta qui allume sa lampe dans le noir pour découvrir le regard de Carlo braqué sur elle).

Et lorsque les deux amants s'abandonnent enfin l'un à l'autre, ce sera le temps d'une merveilleuse séquence de danse nocturne où le marivaudage amoureux se joue par le geste et le regard sans qu'un mot ne soit prononcé, même par la rivale éconduite (le dépit de Jacqueline Sassard). Dès lors la liaison sera aussi enflammée qu'éphémère car menacée par un monde qui s'effondre avec la démission de Mussolini et le spectre de la défaite.

Les deux acteurs sont extraordinaires dans l'expression de cette fuite en avant désespérée, en particulier Eleonora Rossi Drago dont la beauté embellie au fil de l'intrigue quand son port élégant disparait pour ne plus laisser voir que l'amoureuse transie et agrippée à son bonheur (l'étreinte à la plage).

Si l'oisiveté de ses jeunes gens en début de film était discutable (Zurlini s'avérant un candidat idéal pour adapter Le Jardin des Finzi-Contini dont Vittorio De Sica tirera un si beau film), l'oppressante atmosphère de règlement de compte laissant éclater la violence est tout aussi révoltante. Fils d'un dignitaire fasciste qui l'a jusque-là maintenu hors de l'armée, Carlo est rattrapé par ses origines. Les amants ne pourront plus tourner le dos à leur environnement malgré leurs efforts, à l'image de la conclusion mélodramatique et spectaculaire où l'emphase se fait plus prononcée pour ce dernier adieu. Chef d’œuvre.


Sorti en dvd zone 2 français chez Opening

Extrait

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire