Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram
Le Secret du Rapport Quiller - The Quiller Memorandum, Michael Anderson (1966)
Les services secrets britanniques envoient un de leurs hommes, Quiller, à Berlin-Ouest afin d'enquêter sur le meurtre de deux de leurs agents par une organisation néonazie.
Face à la modernité apportée par la déferlante James Bond au cours des années 60, plusieurs options se posaient pour les films d'espionnage produit à l'époque : en rester à un réalisme faisant fi des extravagances bondiennes (L'Espion qui venait du froid), au contraire les copier pour les pousser dans une outrance délirante (la série des Flint, Matt Helm, Plus féroce que les mâles) ou au contraire en garder le côté décalé pour en faire tout autre chose comme la série des Harry Palmer avec Michael Caine. C'est cette dernière voie que choisit cet excellent The Quiller Memorandum dont le script de Harold Pinter (adapté d'un roman de Trevor Dudley Smith) tire une ambiance assez unique.
Le pitch repose sur un des grands fantasmes de la littérature populaire avec une cellule nazie dormante nostalgique du IIIe Reich. Suite à l'assassinant de deux collègues, l'agent britannique Quiller est donc envoyé à Berlin-Ouest pour mener l'enquête et démanteler le réseau. On retrouve dans les premiers instants pas mal d'éléments de Ipcress, Danger Immédiat première aventure d'Harry Palmer sorti l'année précédente (et dont le 2e volet Nos funérailles à Berlin en retour doit pas mal à Quiller). L'ironie sur le détachement des hautes instances sur le sort de leurs agents s'affiche d'emblée lors du repas entre deux pontes (dont l'un joué par George Sanders) qui entre deux bouchées et un verre de vin discutent des pertes et de la stratégie à mener, Alec Guiness en chef de mission précieux accentue cet aspect et on aura vite compris que notre héros est véritablement livré à lui-même.
Ce ton faussement léger se poursuit encore lors de l'enquête décontractée que mène Quiller et George Segal l'oeil malicieux et l'allure nonchalante est excellent. Pourtant tout ce dérobe rapidement pour ce héros trop sûr de lui, tout d'abord de manière insidieuse par la mise en scène de Anderson faisant grimper à vive allure la paranoïa par sa description d'un Berlin menaçant et truffé de figures malveillante.
Le film bascule pour de bon après une glaçante séquence de torture (avec un Max Von Sydow à mi chemin entre la menace et la distanciation) pour tirer vers une atmosphère de conte terrifiant comme si Quiller ne s'était jamais réveillé des drogues qu'on lui a infligés.
La romance idéalisée avec une Senta Berger effacée, les apparitions spectrales des sbires de Von Sydow dans une longue séquence nocturne à Berlin et la photo tout en jeu d'ombres de Erwin Hiller tirent pratiquement le film vers le fantastique dans sa seconde partie. John Barry signe un de ses scores les plus entêtant avec une ritournelle qui renforce encore l'étrangeté de l'ensemble.
Tout comme Quiller (George Seagal de plus en plus hébété et marqué est parfait lorsque s'estompe sa belle assurance), ces différents éléments nous détournent de l'essentiel et ainsi la splendide fin ouverte en forme de point d'interrogation (même si on se doute de la triste réalité) impose un spleen puissant le temps d'une belle dernière scène. Avec cette chute, The Quiller Memorandum s'avère aussi brillant qu'un Ipcress, l'émotion en plus.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire