Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram
Le Soleil se lève aussi - The Sun Also Rises, Henry King (1957)
Paris, 1922. Jake Barnes vit à Paris depuis sa démobilisation de la guerre 14/18 et il est journaliste au « New York Herald ». Un soir, il se rend à un bal musette où il retrouve des amis dont le romancier Robert Cohn. Arrive Lady Brett Ashley qui n’est pas une inconnue pour Jake. Elle fut son infirmière à l’hôpital pendant la guerre où ils tombèrent amoureux mais suite à sa blessure contractée sur le champ de bataille, Jake est devenu impuissant. Depuis, ils entretiennent une amitié amoureuse. Pour tenter d’oublier cette déconvenue Brett multiplie les aventures.
The Sun also rises est la seconde adaptation d'Heminghway que signe Henry King après la semi réussite des Neiges du Kilimandjaro (1952) visuellement superbe mais narrativement boiteux et porté par un Gregory Peck peu convaincant en simili double de l'écrivain. Cette seconde tentative bien plus maîtrisée et portée par une distribution exceptionnelle va donner un mélodrame superbe.
Jugée très fidèle au premier roman d'Heminghway, le film dépeint un groupe de personnages associés à la "Génération Perdue", soit cette communauté d'écrivains et d'artistes américain égarés dans l'Europe de l'entre-deux-guerres dont Heminghway lui-même ou encore F. Scott Fitzgerald furent les chefs de file. Le terme n'a pas forcément une teneur négative mais sert surtout à dénommer ce courant, cependant devant la caméra de King il revêt dès la scène d'ouverture une facette dramatique et nostalgique. Un panoramique et un fondu fait ainsi passer un plan d'ensemble du Paris contemporain à celui de 1922 où va se nouer le drame.
Le dépit de cette génération perdue va s'incarner à travers le couple maudit formé par Brett Ashley (Ava Gardner déjà dans Les Neiges du Kilimandjaro et d'une autre fameuse version filmée d'Heminghway avec Les Tueurs) et Jake Barnes (Tyrone Power acteur fétiche de Henry King). Ils s'aiment d'un amour passionné depuis qu'elle fut son infirmière en temps de guerre mais sont condamnés à être séparés à cause d'une blessure l'ayant rendu impuissant. Depuis elle se console sans jamais avoir pu l'oublier dans l'alcool et les multiples conquêtes masculines tandis que lui assiste à la lente déchéance de sa bien-aimée sans pouvoir l'empêcher.
Que ce soit le Paris festif et dansant des Années Folles ou le Pampelune surchauffé par la Saint Fermin, King crée une sorte de dichotomie entre le mental en lambeau de ses personnages et l'imagerie idyllique de cette Europe sources de plaisirs multiples. Car le drame de Jake et Brett est la source de bien d'autres avec les prétendants malheureux de celle-ci. Parmi eux un Errol Flynn bien loin du fringant héros des films d'aventures Warner dont la déchéance physique sied parfaitement à son personnage noyant son dépit dans les excès alcoolisés divers. Mel Ferrer est tout aussi bon en amoureux éconduit obsessionnel et faible de caractère, on en dira pas tant d'un Robert Evans passé à l'auto bronzant et peu crédible en jeune toréador. Il fut imposé à un Henry King pas convaincu par Darryl Zanuck qui eu alors la célèbre phrase "The kid stay in the pictures" pour couper court à toute discussion. Une phrase demeurée célèbre lorsqu'elle deviendra le titre de l'autobiographie (et du documentaire) de celui qui serait bien plus tard le patron de la Paramount et produirait entre autres Le Parrain.
Spectaculaire et intimiste à la fois, la réalisation de King envoute de bout en bout. Le scope et le technicolor étincelant forment un sommet de flamboyance Hollywoodienne mais sous les visions grandioses (les longue et impressionnantes séquences de corrida, la Feria survoltée) le malaise n'est jamais loin tel ce flashback magnifiquement amené sur le passé radieux et tragique de notre couple qui se trouve et se perd dans le même temps après la terrible révélation.
Tyrone Power si bon dans les personnages imposant et charismatique offre un contre-emploi magnifique avec ce héros contraint au rôle d'observateur et devant souffrir en silence. C'est pourtant bien Ava Gardner qui bouleverse totalement avec cette femme perdue, le regard en détresse et se raccrochant à un amour qui ne peut (du moins physiquement) lui être rendu.
Elle irradie vraiment l'écran par sa beauté et sa fragilité la maintient à une échelle plus humaine qu'unPandora, le film de King contribuant avec ce dernier et aussi La Comtesse aux Pieds Nus à l'association mythique Ava Gardner/Espagne. On signalera aussi une apparition remarquée d'une séduisante Juliette Greco (dont s'était entiché Zanuck) en début de film en jeune séductrice intéressée. La belle conclusion apaisée mais qui ne résout rien nous laisse définitivement dans ce sentiment mélancolique et résigné qui aura imprégné tout ce splendide film.
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