Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram
Trois ans après La Vie privée d'Henry VIII
son premier grand succès dans l'industrie cinéma anglaise , Alexander Korda s'associait à nouveau à
Charles Laughton pour signer une seconde fresque historique. Plus
précisément, il s'agit ici d'un biopic où Charles Laughton donc
l'illustre peintre. Korda propose ici un portrait désenchanté et
romantique de Rembrandt au parti pris assez étonnant : si ce n'est au
détour d'une scène où il est conspué pour son art étrange, on ne verra
pratiquement aucun tableau. La personnalité du peintre imprègne pourtant
l'ensemble du film et Korda la soulignera principalement par la grâce
de son script et de l'interprétation magistrale de Charles Laughton.
Une large part de l'œuvre de Rembrandt est consacrée à l'illustration
des membres de sa famille et notamment les nombreux portrait qu'il tira
de ses compagnes Saskia et Hendrickje. La scène d'ouverture montre
dans un dramatique montage alterné cet attachement à sa première épouse
Saskia pour laquelle il exprimera son amour dans une magnifique tirade à
ses compagnons et parallèlement la perte de ce modèle aimé succombant à
la maladie. Brisé par cette perte Rembrandt dépressif peut ainsi céder à
ses démons et explorer une part plus sombre de son art.
Le scénario
introduit ainsi à chaque drame et rebondissement de la vie de l'artiste
une facette supplémentaire de ses motifs connus, la seconde étant ici
son attrait pour les visages marqués, usés par les vicissitudes de la
vie dont il parviendrait à capturer la bonté et l'humanité par son
regard unique. Une nouvelle fois une scène explicite bien cette approche
avec un Rembrandt qui bien que voyant venir les premières difficultés
financières livre une commande importante comme il la voit réellement
avec cette peinture de la Garde Civile présentée dans toute la laideur
d'âme que ces membres lui inspire tandis que parallèlement il ira
chercher un mendiant dans la rue pour en faire un roi déchu sur sa
toile.
Le procédé pourrait sembler lourd mais est si bien lié à la progression
dramatique de l'ensemble que ce n'est jamais le cas, Korda sachant faire
preuve de plus de finesse comme lors des nombreuses tirades biblique
qu'entonne Rembrandt et faisant écho à ses peintures en appelant à
l'iconographie religieuse et mythologique. De même la séquence de retour
à la campagne, la vue des hommes au travail ainsi que l'altercation
amusante avec des paysans rappellera à nouveau les toiles du maître
dépeignant les milieux populaires.
C'est principalement quand il joue
sur le registre de la pure émotion que Korda exploite le mieux cette
idée tel le lien qui se noue puis se défait à travers les scènes de
rencontre puis de cruelle séparation entre Rembrandt et sa seconde
épouse Hendrickje Stoffels (magnifique Elsa Lanchester, épouse de
Charles Laughton à la ville) où les même dialogue saisissent la première
rencontre innocente puis les derniers instants avant la mort. Un même
effet miroir s'effectue entre le début et la fin du film, Rembrandt
célébrité au centre de l'attention puis source de moquerie d'un banquet
dans les deux situations temporellement éloignée quittant ses convives
pour se consacrer à son art. Là encore le vendeur obséquieux pour le
jeune peintre vedette laisse place à un accueil bien plus sec pour le
vieillard sans le sous venu acheter ses peintures.
Alexander Korda reprend sa mise en scène statique mais aux compositions de plans fouillés entrevue dans La Vie privée d'Henry VIII,
en beaucoup maîtrisée. On a ainsi des plans d'ensemble où ce le
mouvement tout en retenue et riche de la reconstitution somptueuse
(Vincent Korda signe des décors impressionnant) renforce ce sentiment
d'assister au défilement d'une suite de tableaux. Charles Laughton,
incroyablement habité impressionne de bout en bout avec cette figure de
Rembrandt détachée, rêveuse et obsessionnelle. L'acteur dégage une belle
mélancolie, jamais aussi forte que lors de cette dernière scène où
désormais seul et son pinceau comme seul compagnon il contemple ses
traits fatigués dont il s'apprête à tirer un autoportrait.
Sorti en dvd zone 1 chez MGM et doté de sous-titres français ou encore dans un coffre Criterion consacré à Korda et doté de sous-titres anglais
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