Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram
Retour à Howards End - Howards End, James Ivory (1992)
Dans l'Angleterre du début du XXème
siècle, deux jeunes femmes fort émancipées, Margaret et Helen Schlegel,
vont se lier d'amitié avec une famille traditionnelle, les Wilcox. La
modernité des deux sœurs va créer des tensions et des drames chez les
Wilcox, mais leurs destins sont maintenant liés.
Après Chambre avec vue (1986) et Maurice (1987), Howard Ends
est la troisième adaptation d'EM Forster que signe le trio James Ivory/
Ismail Merchant/Ruth Prawer Jhabvala. Après les amours contrariés par
l'immaturité (Chambre avec vue) puis par la transgression de l'interdit (Maurice)
le récit traite plus frontalement de cette opposition de classe déjà au
cœur des deux précédent films. On suivra ici les destins liés de deux
familles anglaises sous l’Angleterre edwardienne, les Schlegel et les
Wilcox.
Les premiers de par leur parenté germanique via leur père font
preuve d'une ouverture sur le monde et d'une modernité où s'illustre
leur gout pour la littérature, la musique et une vraie curiosité envers
leur semblable à travers les deux sœurs Margaret (Emma Thompson) et
Helen (Helena Bonham Carter). Les Wilcox représentent eux une Angleterre
plus traditionnelle et aristocratique, fermée sur elle-même. Les
chemins des deux familles ne cesseront de se croiser sur plusieurs
années dans un mouvement d'attirance et de répulsion toujours plus
complexe et soulevant les grandes idéologies qui les oppose.
L'attirance
concernera dans une échelle toujours plus intense les liens amoureux et
amicaux noués avec une vraie sincérité et la répulsion naîtra elle des
entraves sociales rendant l'union impossible. Chaque pas en avant se
verra brutalement stoppé pour des conséquences allant en s'aggravant :
de l'innocente romance entre Helen et Paul Wilcox naît un malentendu qui
rafraîchira les rapports une première fois.
L'amitié entre Margaret et
Ruth Wilcox (Vanessa Redgrave merveilleusement indolente et effacée)
voit son symbole le plus fort étouffé lorsque le testament de cette
dernière léguant sa propriété d'Howard Ends à son amie est détruit par
sa famille. Ce sera enfin le mariage entre Margaret et le patriarche
Henry Wilcox (Anthony Hopkins) qui s'avérera voué à l'échec. Quand le
caractère ardent des Schlegel est constamment guidé par les élans du
cœur, les Wilcox y répondent par une froideur bassement matérielle et
égoïste.
Le personnage fantasque d'Helena Bonham Carter ne pourra se
résoudre à cette indifférence quand une Emma Thompson (superbe et récompensée par l'Oscar de la meilleure actrice) plus nuancée et
touchante tentera sans y parvenir le compromis par amour. Ivory filme
avec élégance et dans une superbe direction artistique ces mouvements
contradictoire où son talent de narrateur évite un côté trop schématique
(reproche que j'ai un peu sur Chambre avec vue)
grâce à ses petits moments préparant aux entraves à venir (la rencontre
à la gare qui empêche la première visite attendue de Howard Ends) où
l'intensité des scènes de conflits comme celle vers la fin où Emma
Thompson goutte douloureusement au refus brutal d'Anthony Hopkins pour
une demande simple et sincère.
La fameuse demeure de Howard End
au centre de tous les enjeux n'est finalement pas si visible que cela
durant le film. Sa beauté n'est qu'entraperçue au début via les
déambulations vaporeuse de Vanessa Redgrave ou plus tard Emma Thompson
dans un mimétisme de mise en scène étudié pour Ivory. La nature
environnante, le poids du souvenir de cette maison s'exprime sobrement
et avec poésie (tout comme les rêveries interdite par sa condition au personnage sacrificiel de Leonard Bates) mais les lieux sont finalement surtout les centres du
drame et du compromis qui confère à la conclusion un esprit de statu quo
et de résignation.
C'est un film magnifique, qui m'a beaucoup touchée. Je trouve Elena Bonham Carter et Emma Thompson magistrales d'un bout à l'autre.
RépondreSupprimer