mercredi 24 juillet 2013
Haute Société - Our Betters, George Cukor (1933)
Une américaine fortunée découvre que son mari, un aristocrate anglais, l'a épousée pour sa fortune et aime une autre femme.
Avec ce quatrième film au sein de la RKO de son ami David O Selznick, George Cukor s'affirmait définitivement comme le peintre virulent des milieux nantis et observateur sensible des personnages féminins, ce que confirme ses deux autres films réalisés cette année-là ( Les Invités de huit heures et Les Quatre filles du Docteur March). Il adapte ici une pièce de Somerset Maugham où seront dépeintes sous son regard acéré les affres de la haute société britannique.
Un des thèmes majeur sera également le complexe d'infériorité des américains face aux anglais, perdant en quelques sorte leurs âmes en se pliant à la froideur des mœurs de l'aristocratie britannique et leurs origines constituant un poids presque honteux ou pour les plus lucides un paradis perdu. C'est une cruelle désillusion qui va ainsi former à cette dure réalité notre héroïne Pearl Grayston (Constance Bennett), riche héritière américaine découvrant le jour de son mariage que son noble d'époux en aime une autre et ne l'a épousée que pour son argent.
On la retrouvera cinq ans plus tard désormais bien rodée à ce manège de cynisme et d'hypocrisie et Cukor illustre brillamment ce changement en une scène magistrale. Une réception mondaine à la cours voit Lady Pearl se démarquer de ses compagnes lors de sa présentation toute de noir vêtue tandis que le protocole exige le blanc, sans parler de son salut plus provocant que gracieux et de ses manières désinvolte. Elle est l'attraction principale de cet univers et souhaite désormais y former sa jeune sœur Bessie (Anita Louise) en la mariant à un aristocrate.
Le scénario ne propose pas de vraie intrigue directrice mais plutôt des tranches de vie où Cukor va sonder les codes de ce milieu avant de placer les personnages face à leurs contradictions. Le cercle de Lady Pearl est ainsi constitué d'américains exilés se donnant de grands airs, et ceux qui ne le font pas ont un portefeuille suffisamment garni pour se le permettre à l'image de Fenwick (Minor Watson) amant et bienfaiteur qui a conservé un accent et des manières rustres tout ce qu'il y a de yankee. Tout se joue en fonction du regard de l'autre, à l'image de l'aveu d'adultère où le malaise est dissimulé sous un éclat de rire commun tant qu'il n'est pas avéré et qui provoquera le scandale dès qu'il sera découvert aux yeux de tous.
Les rares élans de désir sincère (Pearl cédant aux avances du gigolo Pepi) s'avéreront aussi éphémère que factice, tous les écarts et trahisons son permis tant que leurs écho ne dépassent pas le cercle (Fenwick autorisant presque Pearl à le tromper tant qu'il n'est pas au courant) qui forme ainsi un vase clos voué à la superficialité.
Sous ce constat amer, Cukor parvient néanmoins à faire rire grâce à quelques scènes hilarantes comme les manœuvres de Pepi pour se faire payer une voiture par sa protectrice et l'émotion se manifeste enfin lors de la prise de conscience finale de Pearl face au dégout de sa sœur. Entre rédemption, recul et éternel recommencement (un cours de danse résolvant tous les conflits) Cukor conclut l'ensemble entre cynisme et espoir.
Sorti en dvd aux éditions Montparnasse dans la collection RKO
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