Un film qui révèle un des secrets les mieux gardés du cinéma anglais à savoir la carrière de John Krish, documentariste de films institutionnels emblématiques et auquel il parvint à donner un ton personnel en dressant un vrai portrait de l'Angleterre d'après-guerre dans diverses couches de la population. Le réalisateur contribua à lancer également quelques futures grandes figures du cinéma anglais comme Karel Reisz ou encore Kevin Brownlow qui fut son monteur. A Day in the Life rassemble quatre de ses documentaires parmi les plus brillants, réalisés entre 1953 et 1964, période où il s'associa au producteur Leon Clore au sein de sa compagnie Graphic Films.
The Elephant Will Never Forgets (1953)
C'est une partie de l'histoire de la ville qui disparait avec ce tramway, histoire passée avec ce vieux couple dont la caméra de Krish accompagne la complicité et les sourires lors de ce dernier trajet et histoire récente plus douloureuse lorsque le tramway traverse des zones bombardées lors du Blitz et pas encore reconstruites. La voix off pleine d'emphase de Brewster Mason capture bien cet état d'esprit et l'émotion de cet instant est encore souligné par la belle utilisation du standard Riding on the top of the car sur lequel s'appuie la musique d'Edward Williams.
Le soucis pédagogique est également constant dans la description de ce savoir-faire amené à disparaitre, le travail de chacun étant minutieusement dépeint avec une pointe d'émotion lorsque la voix off s'immisce dans les pensée du conducteur pour lequel tout va changer dès le lendemain. Le tout s'achève dans une belle communion lorsque les londoniens viennent la nuit venue faire leurs adieux au dernier tram pénétrant au New Cross Depot et piloté par le ministre des transports. Un très beau moment qui donne un peu le sentiment d'avoir un instantané de l'Angleterre si souvent dépeinte dans les films de Terence Davies.
They Took Us to the Sea (1961)
Quelques inserts sur leurs quartiers austères suffiront en plus de leurs réactions pour saisir à quel point cette sortie leur fait échapper à leur quotidien et de l'urgence de la gare au petit matin, au repas complices en passant par les jeux divers et variés sur la plage (beaux moment lorsque les jeunes citadins enfourchent hilares des ânes) Krish saisi avec une belle sobriété le panel d'émotions de ces protagonistes en culottes courtes mais aussi de la satisfaction des adultes de leurs offrir ce moment. La beauté (et un souci formel permanent particulièrement dans celui-ci où la photo est partagé par trois chefs opérateur) de ces lieux n'aura jamais semblé plus palpable que par l'enchantement ressentis par ses enfants semble nous dire John Krish en revenant filmer ce décor vide et désolé sans l'agitation et les rires de ses visages poupins. Par sa liberté de ton et sa respiration, Krish révolutionnait ce type de film institutionnel si didactique habituellement.
Our School (1962)
Une nouvelle fois, la voix-off est réduite au strict minimum (en début et fin de film) pour privilégier les moments isolés où Krish excelle à saisir les tranches de vie futiles mais essentielles (le réfectoire, les cours de sport, les classes turbulentes) comme celles plus cruciales où les attentes et interrogations des adolescents restent finalement les mêmes. Les aspirations à la vie adulte sont encore incertaines (voir le moment où les jeunes filles en passe de quitter l'école expriment de leur vision de la vie de couple et du fait de fonder un foyer assez significatif de l'époque) et où ils n'ont pas encore appris à se situer tel cette discussion passionnante où le un professeur interrogent ses élèves sur les différences de langage entre eux et avec les adultes, les incitant à se tirer vers le haut en tenant constamment une expression soutenue.
John Krish parvient à se faire oublier par un dispositif sobre à deux caméras (une arpentant la classe et captant les émois des élèves à divers moments et l'autre sur le professeur) et toujours saisir un échange, un sourire ou une moue inattendue avec un naturel confondant. Une vision de la jeunesse anglaise qui va au-delà de la commande avec brio.
I Think They Call Him John (1964)
Une très belle réussite donc et vrai et poignant portrait d'une époque.
Sorti en bluray et dvd zone 2 anglais par la BFI et doté de sous-titres anglais
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire