Cody est un petit
criminel psychopathe. Arrêté pour un délit mineur, il est enfermé avec un
codétenu, qui est en réalité un policier, Vic chargé de le mettre en confiance
pour ensuite infiltrer la bande de Cody. Ils arrivent à s'échapper et
commencent leurs forfaits. La police prévenue par Vic parvient à arrêter le
gang. Cody est poursuivi jusque dans une usine et meurt en provoquant une
explosion.
En dépit d’un bagage artistique complet (dont des talents de
chanteur et danseur qu’il exploita dans les comédies musicales), l’image de
James Cagney est définitivement associée à la figure du gangster. S’il put en
donner une interprétation plus nuancée avec le malfrat au grand cœur du Bataillon des sans amours (1933), c’est
surtout dans le registre le plus menaçant, brutal et torturé qu’il associa son
image à celle du hors-la-loi. L'Ennemi
public (1931), son premier vrai grand rôle, l’impose avec ces éclairs de
sadisme tel ce moment où il écrase une orange sur le visage de Jean Harlow et
la Warner exploitera cette image tout au long des années 30 avec d’autres
grandes réussites comme Les Anges aux
figures sales (1938) de Michael Curtiz ou encore Les Fantastiques Années 20 (1939) de Raoul Walsh. Là de cet emploi
et en conflit avec le studio, James Cagney quitte un temps la Warner pour
fonder sa propre société de production et produire des œuvres plus intellectuelles.
Ce sera Le Bar aux illusions (1948),
adaptation prestigieuse de la pièce éponyme de William Saroyan (1939)
récompensée par le Prix Pulitzer. C’est un échec retentissant qui l’amène à
revenir dans le giron de la Warner, fort d’un contrat lucratif qui lui laisse
désormais un grand pouvoir sur les films qu’il tournera. Pour marquer le coup et signer ce retour au
sommet, Cagney tournera donc pour la première fois depuis huit ans un nouveau
film de gangster, L’Enfer est à lui.
Retrouvant Raoul Walsh, Cagney ne cède cependant pas à la facilité et son
interprétation ne sera pas une redite de ses autres rôles de gangster.
Le scénario d’Ivan Goff, Ben Roberts et Virginia Kellogg s’inspire
notamment de Francis Crowley, truand de 18 ans dont l’arrestation fut épique et
avant son exécution sur la chaise électrique envoya ses ultimes vœux à sa mère.
Cette image maternelle fut également malmenée durant les années 30 avec Ma
Barker, matriarche criminelle qui sema la terreur avec son gang et dont Robert
Aldrich s’inspirera grandement dans son mémorable Pas d’orchidées pour Miss Blandish (1971). Fort de cette base, James
Cagney puise également dans son propre passé avec la terreur que lui inspirait
son père alcoolique ou la visite qu’il fit enfant d’un asile d’aliéné. La
différence avec ses autres rôles de gangster sera donc la nature
authentiquement psychotique de ce terrifiant Cody Jarrett. Cagney reprend bien
sûr certains éléments des autres films du genre qu’il a popularisé mais la
folie, l’outrance grotesque et la nature imprévisible de Cody Jarrett doit tout
autant à son expérience dans des comédies comme The Strawberry Blonde (1941) de Raoul Walsh mais de l'excentricit des
personnages haut en couleurs et survoltés de ses comédies musicales façon Prologue (1933) ou La Glorieuse Parade (1942) qui lui valut un Oscar.
Tout cela
donnera un spectacle d’une efficacité redoutable et constamment déséquilibré
par la présence inquiétante et maladive de Cody Jarrett. L’attaque de train en
ouverture donne à voir le génie criminel du personnage dans son déroulement,
mais aussi son impitoyable détermination et le réel plaisir qu’il éprouve à
faire le mal – voir le meurtre des deux conducteurs de train dans un rictus de
satisfaction. C’est paradoxalement quand il se montre le plus humain et
vulnérable que Cody Jarrett s’avère le plus terrifiant, cloué par de violentes
migraines qu’il apaise en se réfugiant dans les bras protecteur de sa maman (Margaret
Wycherly). Tout l’entourage est caractérisé à l’aune de ce héros agité,
poussant les clichés dans leurs derniers retranchements. Virginia Mayo est
parfaite de vulgarité en traînée cupide se raccrochant au plus fort, tout comme
Steve Cochran (qui interprètera à son tour un mémorable truand psychopathe l’année
suivant dans Témoin de la dernière heure) en acolyte ambitieux.
Le scénario varie avec brio les situations et environnements
pour servir au mieux la folie de Cody Jarrett avec un habile récit d’infiltration.
La crise de démence de Jarrett en prison quand il apprend la mort de sa mère
est un moment sacrément dérangeant où James Cagney s’abandonne totalement, la
stupéfaction des figurants pas prévenu du déroulement de la scène n’étant pas
feinte. A cette outrance face à ses repères menacés s’oppose la froide
assurance lors qu’il s’agit de tuer avec une mort mémorable de Steve Cochran.
James Cagney parvient pourtant à rendre le personnage pathétique par ces
instincts criminels ne s’épanouissant que dans un épanouissement affectif, d’abord
par sa mère puis par le frère de substitution que semble constituer le flic
infiltré incarné par Edmond O'Brien.
Troublant dans sa terrible solitude – la scène
où il avoue parler seul à sa mère disparue –, son équilibre mental ne tient qu’à
un fil prêt à se rompre fasse à la perte de ce lien affectif. Cagney exprime un
stupéfiant mélange de rage et de déception au bord des larmes lorsqu’il saura
la véritable identité d’Edmond O’Brien. Les derniers liens à la réalité sont
rompus et nous mènent à un final apocalyptique où la folie de Cody Jarrett
déchaîne tout simplement l’enfer. Un très grand film dont la démesure ne se
retrouvera sans doute que dans l’Al Pacino de Scarface (1984).
Sorti en dvd zone 2 français chez Warner
Un très grand film qui marque grâce à l'extraordinaire prestation de James Cagney. Pas revu depuis trente ans mais un souvenir encore fort.
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