Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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dimanche 30 décembre 2012

Nowhere in Africa - Nirgendwo in Afrika, Caroline Link (2001)


En 1938, fuyant une Allemagne de plus en plus inhospitalière pour les Juifs, les Redlich partent s’installer au Kenya où Walter, avocat de formation, s’occupe désormais d’une ferme. Son épouse, Jettel, issue d’une famille aisée, a toutes les peines du monde à accepter cette rupture. Seule leur fille, Régina, s’adapte et découvre ce nouveau monde en se liant d’amitié avec Owuor, leur cuisinier kényan.

Superbe film que ce Out of Africa allemand se penchant sur un aspect méconnu de la Seconde Guerre Mondiale, le sort des juifs allemands en exil à travers le monde. On suit ici le destin de la famille Redlich qui, sentant l'étau des mesures nazies se faire de plus en plus oppressant fuit l'Allemagne dès 1938 pour l'Afrique et le Kenya. Le père Walter (Merab Ninidze) parti en reconnaissance sera bientôt rejoint par son épouse Jettel (Juliane Köhler) et leur fillette Régina (Lea Kurka) où ils seront en charge de la gestion d'une ferme.

Un déracinement profond où chacun réagira à sa façon. Régina, gamine chétive et craintive en Allemagne s'épanouit et s'imprègne des rites et mœurs locaux sous l'influence du cuisinier Owuor (Sidede Onyulo) qui deviendra un second père, son meilleur ami et confident. Walter fait contre mauvaise fortune bon cœur et oublie son ancienne vie d'avocat pour se démener à la tâche tandis que Jettel ne parvient pas à se faire au changement après le train de vie aisée qu'elle a connu.

C'est cette ouverture et ce bonheur simple africain que Caroline Link cherche principalement à traduire et ce de manière de plus en plus prononcée au fil de l'intrigue. Les premières scènes en Allemagne sont ainsi grisâtre, austère et monotone, la menace nazie se traduisant de manière feutrée mais déjà angoissante (ce petit garçon arborant le sigle nazi sur un terrain de jeu) tandis les séquences au Kenya en adoptant surtout le point de vue de Régina ne sont que mystères, curiosités et espaces à perte de vue. La scène où Régina pose pour la première fois le pied sur le sable rouge de la ferme portée tout sourire par Owuor exprime déjà la grande histoire d'amour que vivra la fillette avec le continent noir.

Le film est d'ailleurs adapté du roman éponyme de Stefanie Zweig qui y narrait les souvenirs de cette enfance africaine puisque cette histoire est la sienne et celle de ses parents qui vécurent 9 ans au Kenya. Caroline Link cherche donc avant tout à adopter le point de vue émerveillé de Regina et nous faire partager la découverte de ce nouveau monde. Ainsi une grande partie du film est en Swahili qu'apprend rapidement Régina partagée entre éducation occidentale et sagesse, pragmatisme et philosophie de vie locale. La jeune Lea Kurka jouant Régina enfant est des plus attachante avec une bouille avenante pleine de curiosité et Karoline Eckertz prenant le relai pour la jouer adolescente dans une superbe ellipse est tout aussi épatante.

Le film dépasse ce simple effet dépaysant et carte postale par les questionnements des adultes moins immédiatement séduit. Rongés par l'angoisse pour leur proches demeurés en Allemagne, Jettel et Walter s'interroge ainsi tout au long du film sur leur identité allemande, reniée ou revendiquée et seul lien avec leur vie passée. Le couple sera en conflit constant tout au long de l'histoire. Jettel d'abord dans le rejet de ce nouveau cadre et au comportement hautain avec les autochtones y trouve finalement une seconde famille, une autonomie en tant que femme où elle ne sera plus la simple épouse suivant son époux où qu'il aille (un rebondissement va particulièrement dans ce sens).

A l'inverse, Walter n'aura de cesse de chercher à revendiquer ses racines souillées par le nazisme en se portant volontaire auprès des alliés où par sa volonté de retour final. La quête de soi est un des grands thèmes du film d'autant qu'on évoque ici des faits méconnus comme l'isolement des juifs au sein même de cette communauté des alliés tel ces moment révoltant où les enfants juifs sont désignés et mis de côté dans l'école anglaise que fréquente Régina.

L'universalité et la fraternité tient donc finalement plus aux liens que tissera la famille avec les diverses personnalité rencontrée et le film regorge de moment de grâce : Régina escaladant à moitié nue sans pudeur les arbres avec son meilleur ami kenyan, n'arrivant pas à dormir et allant se blottir dans la couche d'Owuor ou encore toute la ferme unie pour chasser une invasion de sauterelle.

C'est avec une même mélancolie que les Redlich sur le départ qu'on quitte ce film enchanteur (un des meilleurs films allemands des années 2000 décennie du renouveau) et qui obtiendra en 2003 l'Oscar du meilleur film étranger. Il est dommage que le livre suivant de Stefanie Zweig Irgendwo in Deutschland racontant le retour en Allemagne n'ai pas été adapté ensuite tant on s'est attaché aux personnages. Dépaysant et plein de grâce.

Sorti en dvd zone 2 français chez Studio Canal


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