Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram
Fred Staples est engagé au siège
new-yorkais de Ramsey & Co, un véritable empire industriel. Il y
fait la connaissance de Bill Briggs, le vice-président de la compagnie.
Mais dès la première réunion avec l’impitoyable patron Walter Ramsey,
Staples comprend qu’il est là pour succéder à Briggs. Tiraillé entre son
ambition et son sens moral, Staples va devenir le témoin de la descente
aux enfers de Briggs.
Patterns est une petite perle méconnue
qui marqua le premier succès public et critique de Rod Serling, future
légende de la télévision et créateur de La Quatrième Dimension.
A l'origine cette histoire fut filmée pour la télévision dans le cadre
d'une pièce télévisée, format très populaire alors et prenant le relai
des pièces radiophonique où Serling œuvra de longues années avant de
travailler pour le petit écran en pleine ascension. Ces pièces en partie
financées par un sponsor publicitaire étaient soumises à un format de
52 minutes, tournées en direct (avec trois coupures pub permettant aux
acteurs de souffler) et diffusées le soir dans une tranche horaire
permettant (en équivalent de ce que sera le cable quelques années plus
tard) d'aborder des sujets plus adultes et audacieux dans les limites
autorisées.
Le programme a un tel impact (Serling se voyant bombardé
d'appel alors que la diffusion est en cours !) tant au niveau de
l'audience que de la critique que Serling pourtant pas un débutant se
voit réellement mettre le pied à l'étrier par cette notoriété nouvelle.
Il réitéra l'exploit l'année suivante avec dans le même format le
téléfilm Requiem for a Heavyweight
mais il n'en a pas fini encore avec Patterns qui est rejoué et
rediffusé deux mois plus tard et qui se voit transposé au cinéma avec le
réalisateur (Fielder Cook) et une partie du casting original (seul Van
Heflin remplace Richard Kiley dans le rôle de Staples.).
Patterns est une des plus saisissante et glaçante description du monde de l'entreprise, tendance en partie lancée par le très bon Marchands d'illusions de Jack Conway (1947) et dont les questionnements son très en vogue dans le cinéma américain des années 50 avec notammentL'Homme au complet gris de Nunally Johnson (1956) voir même en plus humoristique mais tout aussi incisif dans La Blonde explosive de Frank Tashlin (1959). Le film s'ouvre sur une visions des buildings
imposant du siège Ramsey et annonce ce côté froid et dominant d'une
entité passant avant l'humain. C'est là que Staples (Van Heflin) ancien
directeur d'une usine de province est engagé par Ramsey pour collaborer
avec le vice-président vieillissant Briggs (Ed Begley). Pourtant Staples
va se rendre compte à coup de petites décisions insidieuses, de
vexations et d'humiliations de plus en plus marquées qu'il est là pour
prendre la place de Briggs qu'on pousse à bout pour qu'il démissionne.
L'intérieur de l'entreprise est filmé avec la même froideur que
l'extérieur, avec cette caméra partant du plafond pour redescendre en
plongée sur ce long corridor où les employés indistincts s'agitent comme
des fourmis, anonymes et débordés. Les réunions des exécutifs
fonctionnent de la même manière, avec la caméra placée au bout de la
longue table où les employés soumis et anonyme sont sur le côté alors
que le dominant et tyrannique Ramsey (Everett Sloane) est au centre, en
légère contre plongée. Quiconque osera sortir du rang et le contredire
sera rabaissé plus bas que terre, les autres ne sont plus que des
pions et comme le contenu de ces entretiens le démontre le profit et les
spéculations ont désormais pris le pas sur les hommes et sont l'unique
préoccupation de l'entreprise.
Briggs (poignant Ed Begley au bord de la
rupture), homme du passé est ainsi pressuré et broyé par cette logique
implacable sous les yeux lâche de ces collègues et ceux impuissant de
Staples bien saisit dans cette ambiguïté entre ambition et morale. Van
Heflin délivre une grande prestation et le script de Serling est
brillant pour dépeindre son impasse personnelle où l'amitié, la fidélité
et ses propres aspirations deviennent soudain incompatibles. Everett
Sloane, sorte de serpent froid et manipulateur dont le venin peut vous
frapper à tout moment l'a bien compris et campe un terrifiant dirigeant
adepte du harcèlement moral raffiné.
Personne ne sera ainsi dupe du
pseudo happy-end où Staples reste en pensant pouvoir changer les choses
alors qu'on devine qu'il ne peut avec le temps que devenir un monstre
comme Ramsey ou une victime comme Briggs. Comme une réplique l'a
souligné peu avant, dans cet univers tout ce résume à l'opposition entre
les forts et les faibles, les ambitieux et les mous.
Sorti en dvd zone 2 françis chez Wild Side
Extrait
Et petite curiosité le programme tv originel de Rod Serling visible en entier sur youtube
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