Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram
Le Lit conjugal - Una storia moderna: l'ape regina, Marco Ferreri (1963)
Alfonso, la quarantaine, épouse Regina,
une jeune fille catholique et vierge afin de l’initier au devoir
conjugal selon ses désirs. Mais Regina va vite s’avérer insatiable et
l’épuiser jusqu’à ce qu’elle soit fécondée, tout comme la reine des
abeilles…
Le Lit conjugal
est un des premiers succès public et critique de Marco Ferreri, dont le
sujet sulfureux lui vaudra également ses premières démêlées avec la
censure. Le film est en quelque sorte un prolongement plus acide encore
de La Petite Voiture (1961)
qu'il réalisa en Espagne. Dans ce dernier un octogénaire se voyait mis
de côté par sa famille pour laquelle il n'avait plus d'utilité et
négligeant ses demandes telle cette petite voiture pour laquelle il
retrouvera toute sa pugnacité envers les siens.
Féroce satire contre la
famille, le mariage et l'église, Le Lit conjugal
est encore plus cinglant avec cette fois un protagoniste dans la fleur
de l'âge qui va connaître le même sort que le vieillard de La Petite Voiture.
Alfonso (Ugo Tognazzi) renonce à sa vie de célibataire pour épouser la
Regina, jeune fille catholique et vierge. Avant même l'union les signes
avant-coureurs du désastre affluent avec cette belle-famille partagée
entre vieilles tantes bigotes envahissante et beau-frère idiot, Regina
dont les regards provocants (dont un échange fort ambigu avec une bonne
sœur à la complicité coupable durant la scène de mariage) contredisent
les attitudes chastes et timorées.
Impression confirmée une fois
le mariage célébré lorsque la prude Regina se transforme en véritable
chatte en chaleur harcelant de ses assauts amoureux Alfonso à tout
instant et en tout lieu. Le mâle italien viril est largement moqué avec
un Tognazzi rapidement éreinté, obligé de se faire des piqûre d'hormones
pour suivre la cadence et surtout surpris du féroce désir de son épouse
alors qu'il attendait du mariage un paisible ronron après une vie de
célibataire agitée. La famille est ici un enfer pour lequel vous devez
tout sacrifier, qui vous use jusqu'à la corde et se débarrasse de vous
lorsque vous ne pouvez plus répondre à sa demande.
L'élément le plus
manifeste est bien sûr les étreintes incessantes du couple de la part
d'une Regina désirant au plus vite être engrossée. Il faut voir le
sourire malicieux de satisfaction de Marina Vlady lorsque l'heureux
évènement est annoncé, signant l'arrêt immédiat des ébats du couple
puisque ayant atteint son but elle se refuse désormais à Alfonso de
toute manière très diminué. Les autres renoncements s'avèrent plus
matériels (Regina prenant en charge l'entreprise, Alfonso renonçant à
son appartement luxueux pour vivre avec la nombreuse famille de son
épouse) ou symbolique (la vue sur Rome de l'appartement d'Alfonso
devient une terrasse donnant sur le Vatican une fois marié, puis
carrément sur une impasse à la fin lorsqu'il est malade et isolé).
Ce
déroulement "naturel" des choses obéit aux vertus procréatrices de
l'église qui en prend pour son grade mais masque surtout la dimension de
sangsue de la cellule familiale où l'homme doit être vidé dans tous les
sens du terme. Le mâle faible et manipulé, la femme en quête d'un
géniteur et d'un financier, la famille en profitant et l'église cautionnant le tout
constitue un ensemble vicié où personne n'est épargné. Dans son premier
rôle majeur Ugo Tognazzi est parfait en chien battu rapidement dépassé
mais c'est surtout une sournoise Marina Vlady qui emporte l'adhésion en
passant de la jeune fille innocente à la matrone dominatrice avec une
finesse épatante et récompensée du Prix d'interprétation féminine à
Cannes (même si entaché de polémique puisque comme souvent dans le
cinéma italien elle fut doublée puisque française). Un grand Ferreri.
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