Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram
Les Complices de la dernière chance - The Last Run, Richard Fleischer (1971)
Un ancien bandit vivant reclus dans un
village de pêcheurs au Portugal accepte un dernier contrat, qui consiste
à conduire un prisonnier évadé jusqu'en France.
Richard Fleischer réalise un superbe polar désenchanté et crépusculaire avec The Last Run,
titre plutôt méconnu de sa filmographie bien fournie. Cette dimension
crépusculaire est d'ailleurs bien plus parlante avec le titre original
(quel titre français ridicule tout de même) qui illustre bien la nature
de baroud d'honneur signifiée par les actes menés par le personnage de
George C. Scott. Ancien bandit retiré des affaires depuis neuf ans,
Harry Garmes (George C. Scott) vit une existence solitaire dans une
petite cité portuaire au Portugal.
On découvrira qu'il abandonna la vie
criminelle pour s'installer avec sa famille mais la mort accidentelle de
son fils suivi du départ de sa femme en fait désormais un être éteint
et reclus. La longue introduction le voyant bricoler sa voiture puis
faire vrombir son moteur sur les routes désertes du Portugal illustre
bien le caractère éteint de cet homme désormais plus animé au contact de
sa machine qu'à celui des humains. C'est uniquement là qu'il se sent
encore vivant et c'est précisément ce qui va l'inciter à reprendre du
service en acceptant dernier job, conduire le tueur évadé Paul Rickard
(Tony Musante) et sa fiancé Claudie (Trish Van Devere) en France. La
remarquable première partie quasiment sans action (si ce n'est la scène
d'évasion) sert donc à poser les liens qui vont unir le trio. Paul
jeune chien fou rouleur de mécanique va d'abord prendre de haut le
"fossile" Garmes avant d'être virilement mis au fait de ses capacités
intactes (géniale séquence où Scott accepte sans répondre les petites
humiliations de Musante avant de le prendre à part pour une rouste
sévère). On constate ainsi le fossé entre les deux générations de
malfrat avec un Scott taciturne, professionnel et vigilant s'opposant à
un Musante expansif et arrogant.
Ce sont ces différences qui vont créer un
surprenant triangle amoureux avec une Claudie de plus en plus séduite
par la droiture (et la fragilité qu'elle dissimule) de Garmes. Fleischer
dépeint cela avec brio s'appuyant sur ses acteurs sans surligner par le
dialogue tel ce moment où Paul envoie Claudie séduire Garmes pour
l'amadouer et que surprise par la douceur et le respect de celui-ci on
la devine amoureuse en un plan sur son regard soudain moins superficiel.
L'enjeu de la fuite s'ajoute ainsi à celui du choix de cet homme
attentionné et synonyme de sécurité. Le film connu un tournage quelque
peu mouvementé où John Huston initialement engagé quitta le navire après
une bagarre avec George C. Scott, ce dernier trouvant également le
moyen de se battre avec Tina Aumont qui devait au départ jouer le
premier rôle féminin repris par Trish Van Devere. Dans tout ce tumulte
George C. Scott et Trish Van Devere tombèrent amoureux se marièrent
après le tournage. Cela se ressent à l'écran dans le lien sobre et
touchant unissant leur personnage et constitue vraiment le ciment du
film, le superbe score de Jerry Goldsmith restranscrivant bien cette mélancolie latente.
Ce n'est qu'une fois les enjeux chargé de cette facette
émotionnelle que l'action peut se manifester car désormais impliquante.
Les morceaux de bravoures sont peu nombreux mais rondement menés avec le
savoir-faire habituel de Fleischer avec un gunfight tendu dans une
usine abandonnée et surtout une longue poursuite en voiture sur les
routes sinueuses de la campagne portugaise, tout en dérapages effrénés
et tôle froissée. Le final résigné et poignant fait merveille à nouveau
grâce à l'alchimie entre Scott et Van Devere comme leur ultime échange
où ils nient pudiquement leurs espoirs et attentes surtout le dernier
regard de Claudie trahissant à nouveau ses vrais sentiments.
La dernière
course de Garmes n'était pas de se prouver qu'il était toujours un
homme d'action mais un être pouvant aimer et l'être en retour. Un vrai
petit classique étonnamment sous-estimé dans la carrière de Fleischer et
une des grandes prestations de George C. Scott qui n'en manque pas. Les
deux se retrouveront l'année suivante pour un chef d'œuvre du polar, Les Flics ne dorment pas la nuit.
Sorti en dvd zone 1 dans la collection Warner Archives et donc sans sous-titres
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