Édouard Berlon est un séducteur
impénitent, qui vit chez son oncle Théodose, avec sa belle-sœur Pilou,
son frère Guillaume, et la bonne Olga. Un jour, il tombe amoureux
d'Hélène, la femme d'un riche industriel, guère habituée à tant de
fantaisie...
Après le premier beau galop d'essai que fut Les Jeux de l'Amour
(1960), la carrière de Philippe De Broca était lancé et serait ponctuée
de retrouvailles régulière avec son double cinématographique de
l'époque Jean-Pierre Cassel le temps de trois autres films : Le Farceur, L'Amant de cinq jours et Un monsieur de compagnie. Cassel y promène son personnage immature et amoureux découvert dans Les Jeux de l'Amour dans des œuvres où s'entremêlent joyeusement fantaisie et marivaudage.
Les Jeux de l'Amour
avait gardé un certain ancrage dans le réel où un Paris bien
contemporain côtoyait l'univers plus déluré des amoureux, tout en se
jouant au sein de l'intrigue même avec un Jean-Pierre Cassel reculant
devant tout engagement. Le Farceur
plonge lui cette fois de plein pied dans cet univers pétillant et si
caractéristique de De Broca. Cela s'annonce dès la merveilleuse
ouverture où le sautillant Édouard Berlon (Jean-Pierre Cassel) échappe
au foudre d'un mari jaloux en fuyant par les toits parisiens qu'il
dévale joyeusement. C'est dans ce périple incertain qu’Édouard échoue
dans une demeure bourgeoise où il va tomber sous le charme de la belle
Hélène (Anouk Aimée), épouse mélancolique délaissée par son industriel
surmené de mari.
De Broca oppose leurs deux mondes avec brio. La
monotonie, l'immobilisme et la solitude pour Hélène tandis que la
famille d'Édouard regorge de d'excentriques plus farfelus les uns que
les autres entre le grand frère râleur et photographe décalé (François
Maistre), la belle-sœur bienveillante et maternelle (Geneviève Cluny où
dans une référence extra-diégétique aux Jeux de l'Amour Cassel en parle
constamment comme de sa première femme), la soubrette secrètement
amoureuse (Anne Tonietti) et l'oncle rigolard et confident le soutenant
dans toutes ses entreprises (Palau).
C'est l'occasion de divers moments
d'une folie contagieuse entre les séances photos historico délirantes,
la cacophonie de l'orchestre familial et bien sûr les disputes épiques
entre tout ce petit monde. De Broca dessine là un portrait de famille
aristocrate bohème et libérée où sous l'extravagance transparaît
constamment le profond amour qui unit ses membres.
Au centre de
toutes les préoccupations, l'éternel homme-enfant Jean-Pierre Cassel
étincelle de charme innocent et frénétique. Le passé de danseur de
l'acteur fait merveille avec ce personnage séducteur et en mouvement
perpétuel dont l'abattage aura progressivement raison de la froide
Hélène dans une cour effrénée. Les influences sont multiples ici, De
Broca maintenant constamment le mimétisme entre Cassel et des figures du
burlesque comme Charlot ou Tati dans sa manière de le fondre dans le
décor, l'iconiser dans son rapport aux objets (le début où il dévale
Paris en vélo) et ce costume qui ne le quitte pas.
Le travestissement et
les déguisements divers viennent compléter la panoplie de ce grand
loufoque capable de passer de la plus grande joie au désespoir le plus
touchant. La cause sera une ambivalente Anouk Aimée tourneboulée par
l'énergie de son trublion de prétendant mais qui ne se départira jamais
complètement de sa distance de grande bourgeoise. L'enjeu diffère
pourtant grandement ici des Jeux de l'Amour
où il fallait enfin retrouver l'âge de la raison.
Anouk Aimée et la
réalité qu'elle représente n'est finalement qu'égoïsme et hypocrisie
restant figée dans les conventions. Ce réel rattrape comme souvent les
héros de De Broca pour instaurer une mélancolie surprenante où la
frénésie s'estompe progressivement. Mais fort heureusement c'est cette
insouciance qui emportera l'adhésion lors d'une conclusion parfaite.
Encore plus que dans Les Jeux de l'Amour,
le réalisateur crée une sorte d'entre-deux parfait où les innovations
formelles et les thèmes personnels se mêlent à une tonalité populaire
au-delà des clivages de l'époque notamment ceux amorcés par la Nouvelle
Vague. Un équilibre qu'il partagera avec Rappeneau, Louis Malle et
quelques autres.
Sorti en dvd zone 2 français et blu ray chez Gaumont
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