A Pimlico, un quartier de Londres,
l'explosion d'une bombe, dernier vestige de la guerre, met à jour un
trésor du XVe siècle ainsi qu'un édit royal certifiant que Pimlico est
la propriété des ducs de Bourgogne. Aucun décret n'ayant annulé depuis
cet héritage, les habitants décident de proclamer leur indépendance à
l'égard du Royaume-Uni.
Passeport pour Pimlico
est une des plus audacieuses productions Ealing de l'époque et témoigne
magnifiquement de la capacité du studio se faire un prolongement de la
réalité anglaise d'alors dans une tonalité où s'entremêlent la
célébration et la critique de cette anglicité. Le pitch audacieux voit
Pimlico, un petit quartier de Londres bouleversé par la découverte d'un
décret d'Edward IV enterré depuis le XVe siècle en faisant une propriété
du Duc de Bourgogne et donc une terre indépendante en pleine
Angleterre. Par jeu les habitants vont rapidement défier l'autorité mais
seront rapidement dépassé par les enjeux socio-politiques de ce nouveau
statut.
Le film arbore un postulat commun à plusieurs
productions Ealing, à savoir une petite communauté ligué contre une
entité puissante le plus souvent symbolisé par la Grande-Bretagne
elle-même. Ce sont les villageois écossais alcoolisés du génial Whisky à gogo (1949), les chansonniers tout aussi avinés de Champagne Charlie (1944) ou encore le village défendant son train à vapeur dans Titfield Thunderbolt
(1953), les protagonistes luttant dans ces trois films sur une forme
d'autoritarisme de l'état britannique qu'il soit politique ou moral.
Des
thèmes cher au scénariste T. E. B. Clarke qui dans Il pleut toujours le dimanche
(1947) aura également fait le portrait d'une Angleterre d'après-guerre
assez sinistre pour une des productions Ealing les plus sombre. Le film
surprend ainsi par ce ton vindicatif faisant sous l'humour du pays une
nation sclérosée et autoritaire via l'attitude du gouvernement, mais se
moquant aussi dans un sens du côté insulaire et autarcique typiquement
anglais par l'attitude fermée des héros quand ils se découvrent malgré
eux citoyens bourguignons. Une approche osée qui se rééquilibrera et
évitera la froide démonstration par la truculence et l'empathie typique
d’Ealing envers ses héros modestes.
Quelques années après la fin
de la guerre l'Angleterre est encore un pays sinistré et criblés de
dette, les quartiers en ruine (dont celui de Pimlico) venant rappeler le
souvenir des difficiles années du Blitz. Une période de privation
encore vivace qui explique le sentiment de défi des habitants qui voient
là une occasion de s'en sortir mais mettra à jour les dérives du moment
avec une foules d'individus louches profitant de cet espace hors la loi
pour faire fructifier le marché noir et trafic de bons de rationnement.
Derrière la légèreté de l'ensemble vient donc pointer une réalité pas
si éloignée encore mais c'est à nouveau la communauté qui sera ici mise
en avant pour célébrer l'Angleterre.
Si effectivement le gouvernement
est fustigé par son attitude ambiguë (qui les verra affamer et assoiffer
Pimlico pour soumettre les dissidents), le peuple ayant survécu par
l'entraide et la solidarité est représentée ici par le microcosme des
habitants de Pimlico dont l'astuce est louée lors des séquences où il se
joue de l'autorité pour assurer leur survie.
Ironiquement, des
situations de film de guerre (exactement comme dans Whisky à gogo)
sont reprises avec évasion, guet-apens et camouflage pour permettre à
nos héros passant sous les barbelés et sortant de nuit de se rationner.
Cette solidarité sera même étendue lorsque les denrées arriveront de
tout le pays pour aider nos héros. Une habile pirouette scénaristique
verra tout de même les rebelles rentrer dans le rang tout en gardant la
main, rétablissant intelligemment l'ordre moral cher à Michael Balcon,
tatillon patron d’Ealing.
Tout cela ne fonctionnerait par sans un
merveilleux casting de monsieur et madame tout le monde attachants à la
tête desquels trône le génial Stanley Holloway (ou une tordante Margaret Rutherthord en historienne farfelue). Henry Cornelius qui
triomphera plus tard avec la géniale comédie automobile Genevieve (1953)
mène l'ensemble à la perfection, autant pour pousser le postulat de
départ jusqu'à l'absurde que pour conférer une chaleur et émotion de
tous les instants.
Sorti en dvd zone 2 français chez Tamasa
[Film] Ghost Nursing, de Wilson Tong (1982)
Il y a 3 heures
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