Sans le sou, Nick Bianco décide de
cambrioler une bijouterie pour offrir un Noël décent à sa famille.
Arrêté par la police, il se voir proposer par l'assistant du District
Attorney Louie D'Angelo une réduction de peine s'il dénonce ses
acolytes. Nick refuse, pensant que ses amis aideront sa famille à
survivre. Apprenant trois ans plus tard que sa femme s'est suicidée et
que ses deux filles ont été placées dans un orphelinat, il se met à
table, et recouvre sa liberté. Alors qu'il tente de reconstruire sa vie
loin du milieu du crime, Nick apprend que le psychotique Tommy Udo,
qu'il a pourtant dénoncé, est en liberté, sur ses traces...
Kiss of Death
s'inscrit dans la veine des polars réalistes produit au sein de la Fox
et qui se démarquaient par un tournage délaissant les studios pour des
cadres urbains réels renforçant l'immersion. Henry Hathaway en fut le
chantre et signa de nombreuse réussites dans le genre dont notamment
l'excellent
Appelez nord 777 (1948).
Le Carrefour de la mort
est tout aussi brillant même si l'aspect urbain s'avère plus
sous-jacent que dans d'autres polar de la Fox, Henry Hathaway inscrivant
cette tonalité réaliste dans un dessein plus global que le seul
environnement. Ici il est plutôt question de la fatalité liée à
l'appartenance, à l'évolution dans un cadre misérable destinant au monde
du crime et la possibilité d'échapper à ce destin.
C'est problématique
qui hantera tout le film notre héros Nick Bianco (Victor Mature), la
voix-off présente dans la première partie du film appuyant cette idée de
fatalité. Nick est un fils de malfrat dont le père fut tué sous ses
yeux enfant et il aura tout naturellement embrassé la voie du crime une
fois adulte. Marqué de ce passif, les employeurs se refusent à lui
donner sa chance et le ramène vers l'illégalité, seul moyen de nourrir
sa famille. C'est dans cet état d'esprit que nous le retrouvons dans la
scène d'ouverture où il est arrêté suite à un cambriolage de bijouterie
qui tourne mal. Engoncé dans le code d'honneur de la rue, Nick va
repousser l'offre du procureur Louie D'Angelo (Brian Donlevy) lui
promettant la clémence s'il dénonce ses complices. Nick reste inflexible
pensant que ses acolytes prendront en charge sa famille mais il n'en
sera rien, la misère poussant sa femme au suicide et ses deux fillettes
étant placées à l'orphelinat.
Le scénario très moral de Ben
Hecht et Philip Dunne montre ainsi le cheminement de Nick dépassant son
éducation et environnement pour assumer ses responsabilités. Victor
Mature dans ce type de personnage au bon fait mais dépassé est
formidable d'authenticité (magnifique scène de retrouvailles avec ses deux petites filles), un roc qui dissimule une grande
vulnérabilité. Face à lui par contre une véritable ordure irrécupérable
avec le terrifiant Tommy Udo (Richard Widmark), psychopathe en puissance
et chargé des basses œuvres quand il s'agit de réduire les balances au
silence définitif.
Hathaway nous place dans une communauté
italo-américaine populaire où le meilleur (la sollicitude de Nettie
(Coleen Gray) envers Nick en prison, le procureur joué par Brian Donlevy
en appelant à la famille pour remettre notre héros sur la bonne voie)
côtoie le pire en la personne de Tommy Udo, où l'on passe d'une ruelle
paisible aux bouges les plus mal famés voyant se dérouler le pire dans
leurs arrières salles. Le stoïcisme et la détermination paisible de
Victor Mature va ainsi s'opposer à la pure démence de Richard Widmark
qui crève l'écran pour son premier rôle au cinéma. Visage en lame de
couteau gorgé de tics nerveux, regard dément et rire glaçant
caractérisent ce Tommy Udo imprévisible et sadique.
Il suffira d'une
scène terrifiante où il balance une femme en fauteuil roulant dans un
escalier pour situer son degré de folie et dès lors Hathaway n'a nul
besoin de donner dans la surenchère pour rendre angoissante la simple
promesse d'une réapparition de ce monstre. Nick ayant été démasqué, la
vengeance de Tommy semble inévitable et sa silhouette comme son rire se
profilant comme une terrible menace pour notre héros ayant refait sa
vie. Cela constituera la dernière étape du film, très américaine dans
l'idée ou plutôt que la voie du crime (sans issue) ou celle de la loi
(boiteuse puisque libérant son pire ennemi) Nick devra faire face à ses
actes et son passé dans une dimension héroïque et sacrificielle qui
permettra enfin une réelle renaissance et la paix pour lui et ses
proches. Il ne sera plus marqué.
Le face à face final, faussement amené comme un règlement de
compte désamorce complètement cela et signe la définitive rédemption de
Nick par un astucieux et symbolique rebondissement, réécrit d'ailleurs
par Philip Dunne quand le scénario initial voyait Nick se cacher plutôt
qu'aller au-devant de la menace. Un des meilleurs films d'Henry Hathaway
qui connaîtra deux remakes :
The Friend Who Walked the West (1958) de Gordon Douglas transposant l'intrigue en western et le plus récent
Kiss of Death (1995) de Barbet Schroeder où Nicolas Cage offre une mémorable relecture du personnage de Richard Widmark.
Sorti en dvd zone 2 français chez Catlotta
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