Une statuette brésilienne de la
civilisation maltèque est volée au musée de l'Homme. Elle faisait partie
d'un ensemble de trois statues, ramenées par trois explorateurs : le
professeur Catalan (Jean Servais) qui travaille au musée de l'Homme, le
professeur Villermosa tragiquement disparu et André de Castro, un riche
homme d'affaires brésilien. Le professeur Catalan est enlevé devant le
musée. Le deuxième classe Adrien Dufourquet est témoin de l'enlèvement
de sa fiancée Agnès, fille d'un célèbre ethnologue. Il part à sa
recherche, qui le mène au Brésil...
La fantaisie de
Philippe de Broca s'était exprimée sur ses premiers films dans une veine
encore imprégnée de la Nouvelle Vague. Sans réellement s'inscrire dans
le mouvement, sa manière de dynamiter la romance et le marivaudage
classique (
Les Jeux de l'Amour et
Le Farceur (1960)) s'inscrivait dans une même volonté moderniste. Avec
Cartouche (1962), grand film d'aventures historique, on pouvait deviner le virage plus populaire qui allait libérer ces œuvres suivante.
L'Homme de Rio
établit ainsi un pont idéal entre le De Broca des débuts et celui plus
ouvertement grand public de la suite de sa carrière où l'énergie arty de
la Nouvelle Vague se télescope à un horizon plus vaste, à l'évasion et
la grande aventure.
Le film naît au départ d'un projet d'adaptation de
Tintin
auquel est associé De Broca (après le départ d'Alain Resnais
initialement envisagé) mais le réalisateur constate vite les limites
d'une transposition littérale des cases de Hergé et jette l'éponge.
Plutôt qu'une vraie adaptation, il réfléchira à un récit original où il
pourra mêler son propre ton à l'énergie et le style des aventures de
Tintin.
Un séjour à Rio en compagnie de Jean-Paul Belmondo pour la promotion de
Cartouche impose immédiatement ce cadre dans son esprit pour le futur
film et après une longue écriture en compagnie de son collaborateur
habituel Daniel Boulanger et son ami Jean-Paul Rappeneau pas encore
passé à la réalisation,
L'Homme de Rio va progressivement voir le jour.
L'influence
de Tintin est manifeste, que ce soit en terme visuel, narratif ou
d'idées scénaristiques. Le vol d'ouverture de la statuette, la
silhouette du voleur et le décor du musée de l'Homme ramène d'emblée à
L'Oreille cassée. Les enlèvements et plus tard la quête des statuettes et la malédiction qui les entoure lorgne bien sûr vers le diptyque
Les Sept boules de cristal/
Le Temple du Soleil.
Le plus bel emprunt sera cependant cette énergie trépidante et vitesse
du récit et de la même manière qu'Hergé pouvait nous emmener d'une Europe grisâtre aux contrées les plus exotiques en deux
pages et maintes péripéties, De Broca quitte Paris pour le soleil du Brésil
en vingt minutes d'introduction idéales.
Dans une ligne claire
narrative parfaite, toutes les informations et la caractérisation des
personnages se fait dans un mouvement perpétuel jubilatoire. Cela va du
plus explicite (le passé des savants, les trois statues) au plus subtil
(le regard furtif et légèrement concupiscent de Jean Servais sur
Françoise Dorléac qui permet de vaguement se douter de la suite à son
sujet) et on devine la patte de Jean-Paul Rappeneau déjà si habile pour
marier anarchie et construction rigoureuse. Le couple Jean-Paul
Belmondo/Françoise Dorléac apporte la touche romantique vacharde et
adulte qui rend l'ensemble si pétillant.
Plutôt que le mièvre Tintin,
Belmondo serait plutôt plus proche d'un Capitaine Haddock juvénile avec
ce héros franchouillard et râleur voué à deux seul but, sauver sa
fiancée et être rentré à temps de sa permission à Paris.
C'est vraiment
dans ce film que naît "Bebel", le héros casse-cou et gouailleur mais
plutôt que le rouleur de mécanique indestructible des années à venir, sa
silhouette frêle et élastique apporte vraiment ce côté bd/cartoon
irrésistible le faisant se relever de toute les chutes, riposter aux
adversaires autrement plus imposant. Françoise Dorléac est adorable en
demoiselle en danger capricieuse et les échanges orageux du couple en
pleine action son un régal de bout en bout.
De Broca nous promène
dans un Brésil 60's envoutant dont il visite avec autant de brio
l'urbanité moderne (avec son lot de bâtiment aux designs high tech) que
les plus grouillant et festifs milieux populaires mais aussi une nature
dépaysante et bariolée (le côté bd n'étant pas oublié là non plus tel ce
crocodile factice attendant Belmondo lors de son atterrissage en
parachute.).De Broca multiplie les péripéties et environnements avec une
inventivité rare, ne fatiguant jamais grâce à des respirations comiques
ou gags en pagaille (la voiture rose à étoiles vertes !).
Ce mouvement perpétuel
reprend également le principe de ligne claire qui guide le script. On
constatera que dans sa poursuite effrénée, il suffira toujours à
Jean-Paul Belmondo de foncer droit devant lui pour rattraper les
méchants ravisseurs de Françoise Dorléac.
A moto, en voiture, à pieds ou
en avion, Bebel ne fait que suivre une ligne droite où même lorsqu'il
les perd de vue, ceux qu'il recherche se retrouveront forcément tôt ou
tard dans son champ de vision. Cela souligne la détermination de notre
héros et inscrit une fois de plus le film dans cette facette bd où l'on
est destiné à se retrouver quelques cases plus tard.
Un univers de tous les possibles où le réalisateur ose les transitions les plus incohérentes (la séquences des lianes à la fin) et les faux-raccords en pagailles sans que cela ne gêne tant l'on sent que c'est l'énergie et le mouvement qui compte (ces expérimentations évoquant justement la Nouvelle Vague). Comme toujours, ce côté foutraque alterne avec la
vraie élégance et recherche formelle dont est capable De Broca avec ces
compostions de plan splendides des décors où déambule notre couple et la
photo ensoleillée de Edmond Séchan.
Le dépaysement est total et le
bonheur constant tout au long du de cet
Homme de Rio qui inspirera tant Spielberg pour
Les Aventuriers de l'Arche Perdue
et que De Broca conclut sur une note sobre et amusée idéale sur les
notes enfin apaisées de George Delerue qui peut laisser s'exprimer sa
mélancolie.
Sorti en dvd zone 2 français chez TF1 Vidéo
J'ai toujours été amusé par les emprunts de l'Homme de Rio aux aventures de Tintin.. J'ai fini par en faire un quiz disponible ici : bgrabot.wix.com/tintin-homme-de-rio
RépondreSupprimerLe lien ne fonctionne pas, curieux de faire votre quizz en tout cas ;-)
RépondreSupprimerLe lien fonctionne pour moi. Très bon article et excellente initiative que ce jeu des comparaisons images à l'appui. Je vois là sur vos sites, et par ses pages, concrétiser la même idée qui me trottait depuis un moment dans la tête. Sans être expert de Tintin, c'est plus difficile. En tout cas bravo à Justin et à ce mystérieux Anonyme, auteur du quizz.
RépondreSupprimerMerci d'avoir retenté le lien j'ai pu faire le quizz avec quelques années de retard ^^
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