"Watchmen - Les Gardiens" - se passe dans une Amérique alternative de 1985 où les super-héros font partie du quotidien et où l'Horloge de l'Apocalypse -symbole de la tension entre les Etats-Unis et l'Union Soviétique- indique en permanence minuit moins cinq. Lorsque l'un de ses anciens collègues est assassiné, Rorschach, un justicier masqué un peu à plat mais non moins déterminé, va découvrir un complot qui menace de tuer et de discréditer tous les super-héros du passé et du présent. Alors qu'il reprend contact avec son ancienne légion de justiciers -un groupe hétéroclite de super-héros retraités, seul l'un d'entre-eux possède de véritables pouvoirs- Rorschach entrevoit un complot inquiétant et de grande envergure lié à leur passé commun et qui aura des conséquences catastrophiques pour le futur.
Après plusieurs tentatives avortées (de Terry Gilliam et Paul Greengrass notamment) le comics culte de Alan Moore se voyait enfin adapté en 2009 par le plus inattendu des candidat, Zack Snyder. Le réalisateur avait précédemment donné un ton plutôt musclé à
Zombie, classique de George Romero dont il fit un fort réussi remake avec
L'Armée des morts. Vint ensuite
300, péplum brutal sous testostérone à l'esthétique inédite où il parvint tant bien que mal à poser sa patte sous les relents fascisants du comics de Frank Miller. Pas vraiment le candidat idéal pour traiter avec finesse des thèmes et questionnements passionnants de l'oeuvre de Alan Moore et Dave Gibbons. Mais que raconte ce fameux
Watchmen version papier ? Alan Moore y plaçait ces super-héros dans une réalité alternative revisitant l'histoire de l'Amérique sous le prisme de leur influence. Les héros costumés s'y montraient alors plus humain (et dénué du moindre pouvoir hormis le Dr Manhattan), faillible et torturé. L'histoire les plaçait dans une situation d'urgence sous forme de menace nucléaire qui donnait une dimension crépusculaire et introspective loin des exploits spectaculaire attendus.
Contre toute attente, Zack Snyder malgré quelques maladresses et fautes de gouts (surtout les divers effets sanguinolents excessifs lors des scène d'actions) parvenait à délivrer une très belle adaptation. La transposition est pratiquement littérale et le lecteur du comics retrouve ses héros idéalement incarné du papier à l'écran. Le film fait la part belle à un groupe de super héros déchu, les
Watchmen que la mort brutale du plus controversé d'entre eux
Le Comédien incitent à se retrouver alors que le monde semble courir à sa perte.
Parmi eux on trouve Rorschach (Jackie Earle Haley parfait), véritable sociopathe à la vindicative soif de justice sanglante. Il y a également Le Spectre Soyeux (Malin Ackerman) jeune femme vivant dans l'ombre sa mère ayant endossé cette identité avant elle, et la petite amie du Dr Manhattan, véritable demi dieu omniscient et tout puissant depuis qu'il a été victime d'un accident nucléaire. On complète le tableau avec Ozymandias (Matthew Goode seule vraie erreur de casting manquant vraiment du charisme requis) génie scientifique fascinés par les figures de pouvoir antique et Le Hiboux (excellent Patrick Wilson comme souvent), emprunté et timide dans la vie et qui gagne toute son assurance avec son identité secrète et sa horde de gadget.
Le récit nous promène donc dans les réminiscence du passé de chacun, le poids que fait peser sur eux l'arrêt de leurs activité. C'est d'ailleurs là un des point où Snyder s'approprie le plus fortement le matériau d'origine sous la fausse impression de relecture servile. La bd montrait la déchéance de héros n'existant réellement que sous leurs costumes et s'avérant égarés dans le quotidien, le rapport aux autres, les relations amoureuse. Pour ce faire Alan Moore avait choisi de leur retirer tout super pouvoir, leur statut venant de leur choix d'endosser la tenue définissant leur seconde et finalement véritable identité. Pour opposer cette déchéance à la confiance et la magnificence qu'ils arborent en super-héros, Snyder propose donc des scènes d'actions hypertrophiées, à coup de cadrage dynamique, ralenti en pagailles et pose icôniques en diable (il faut voir l'arrivée triomphale du Spectre Soyeux redevenue elle même dans l'immeuble en flamme). Ce qui passait par les multiples et brillants échanges dans le comics s'exprime donc ici par l'image avec cette dichotomie entre austérité et imagerie grandiloquente.
Certains tableaux fascinants offrent de superbes moments de cinéma comme la longue introspection du Dr Manhattan, surhomme en proie au doute, le somptueux générique de début sur du Bob Dylan et surtout cette scène d'amour insensée (venant après celle ratée sous leurs vraies identités) entre Le Hibou et Le Spectre Soyeux affirmant avec véhémence et humour (le
Halleluja de Leonard Cohen apportant un décalage bienvenu) que leurs capacités ne se déploient que sous leurs vrais jours, des êtres costumés. Une supposée toute puissance qui se trouve interrogée à travers la fameuse question
Who watch the Watchmen ?
La version Director's Cut plus riche de 24 minutes aère grandement la narration, les interactions entres les personnages et corrige quelques erreurs de la versions salle dues aux coupes. La fin trop étrange du comics (il eut été impossible de reprendre l'enjeu d'origine) est le seul point réellement revisité par le film mais posant la même question morale sur la possibilité d'une paix reposant sur une utopie. Imparfait et pas dénué de longueur, une oeuvre néanmoins passionnante qui parvient à tirer le meilleur d'un matériau fort ardu et qui gagne ses galons de grands film dans cette version longue.
Version cinéma sortie en dvd zone 2 français mais pour cette version longue uniquement en zone 1, les maniaque du comics se pencheront eux vers l'ultimate cut rajoutant une partie animation avec le "Les Contes du vaisseau noir", récit dans le récit vu dans le comics et coupé à juste titre du film.
En effet, c'est un film autrement plus important que ce tas de boue gluant de 300... Un tour de force visuel, y compris pour quelqu'un comme moi qui n'ai pas lu le comic. Et il y a aussi un humour d'une grande subtilité, ce qu'on n'attendait décidément pas de Snyder...
RépondreSupprimerOui je l'avais vu sans avoir lu puis après lecture du comics et ça m'avait laissés à chaque fois bonne impression renforcé par cette version longue. Il a vraiment réussi à éviter le côté trop illustratif par quelques choix risqués.
RépondreSupprimerSinon comme toi pas grand amateur de "300" mais les autres valent le détour en général même le petit dernier "Sucker Punch" qui a l'air de se prendre un four massif.
Tout a fait d'accord avec tous ce qui c'est dit précédemment, cependant 300 reste pour Snyder le galot d'essai qui l'a amené à ce visuel particulier qui rend ces films unique.
RépondreSupprimerQue l'on aime ou pas ce watchmen, il nous apporte une vision du super heros bien différent et plus intelligent que les x-men ou spiderman encore sur nos écrans.
Et pour finir, avec Sucker Punch, il apporte un ton nouveau avec des images terribles, personnellement c'est pour ca que je vais me faire une toile, et puis que fait réellement Baby doll quand elle danse? mais c'est un autre film que je vous encourage à voir maintenant, ou lors de sa sortie DVD.
Oui j'aime beaucoup aussi le dernier Sucker Punch, sans doute sans meilleur film puisque libéré de toutes les contraintes d'adaptation ou de fidélités des films précédent.
RépondreSupprimerUn fascinant patchwork provocateur et psychanalytique sous le débordement d'action ça montre que Snyder est bien plus fin qu'il n'en a l'air. Je suis vraiment curieux de voir ce qu'il va faire de "Superman" et je redonnerais sa chance à "300" à l'occasion promis ! :-)