Été 1979, une petite ville de l'Ohio. Alors qu'ils tournent un film en super 8, un groupe d'adolescents est témoin d'une spectaculaire catastrophe ferroviaire. Ils ne tardent pas à comprendre qu'il ne s'agit pas d'un accident. Peu après, des disparitions étonnantes et des événements inexplicables se produisent en ville, et la police tente de découvrir la vérité, une vérité qu'aucun d'entre eux n'aurait pu imaginer.
Installé depuis longtemps dans le milieu hollywoodien en tant que producteur et scénariste (Forever Young, Armageddon),JJ Abrams accède à la notoriété avec la création des séries Felicity et surtout Alias, narrant les aventures mouvementées de l’agent secret Sidney Bristow. C’est ensuite avec Lost qu’il confirmera les promesses pour ce qui sera la série phénomène des années 2000. D’un postulat faussement simpliste (les rescapés d’un crash sur une île déserte), la série s’élève à des hauteurs insoupçonnées, où une intrigue tortueuse nous promène dans tous les genres et se permet les audaces narratives les plus folles. Une des clés de ses différentes réussites est également la science d’une communication savamment orchestrée. Elément qui montrera ses limites lors de son passage au cinéma.
En 2006 en effet, Tom Cruise en personne convoquera Abrams pour mettre en scène le troisième volet de la franchise Mission : Impossible. La déception est de taille tant les qualités d’Abrams se transforment en terribles défauts dans ce passage du petit au grand écran. L’artificialité de la narration ne reposant que sur des astuces de scénariste et l’efficacité de l’instant se fait criante et ne fonctionne que le temps d’un pré-générique mémorable, l’intrigue se révélant par la suite terriblement creuse. Là où John Woo avait contourné un script indigent par sa virtuosité dans le deuxième volet, Abrams se révèle incapable de donner l’ampleur souhaitée à ses scènes d’action, leur conférant un chaos non maîtrisé qui culmine lors de l’illisible évasion du méchant, pourtant spectaculaire sur le papier. L’intérêt croissant pour les séries offrira paradoxalement bonne presse au film pour ces même raisons : avoir transposé les codes tv au cinéma, mais malheureusement sans les adapter à ce médium tout différent.Abrams corrigera une partie de ses failles lorsqu’il se chargera de relancer la saga Star Trek. L’esprit bien plus « serial » du célèbre space opera convenant bien mieux à la patte Abrams qui, tout en respectant l’esprit et les codes de la série, lui offre un lifting mémorable. Le script malin s’inscrit dans l’esprit ludique à rebondissements qu’affectionne Abrams, mais la mise en scène s’avérait à nouveau très limitée lors des morceaux de bravoure et indigne des moyens alloués. A l’inverse, sa production Cloverfield en mettait plein la vue, avec son Godzilla revu et corrigé à la sauce Blair Witch, mais l’art du buzz d’Abrams montrait ses limites par un récit indigent et bourré de facilité, puisque transposant une simple intrigue soap (un homme cherche à se réconcilier avec sa fiancée et la retrouver) dans un cadre spectaculaire, sans l’élever.Avec Super 8, la phase d’apprentissage d’Abrams semblait terminée et on pouvait enfin attendre de lui une approche réellement cinématographique. Le film est la fusion de deux projets différents, l’un intimiste sur des adolescents des seventies réalisant des films en Super 8 et l’autre, plus spectaculaire, imaginant un déménagement de la fameuse Zone 51 qui tourne mal. Les film vue s’équilibre parfaitement entre ces deux options, notamment l’introduction entre présentations des jeunes protagonistes et mystères autour de la créature extraterrestre. Il ne manque que le logo Amblin’ pour définitivement appuyer la patine 80’s de la chose, et pour cause, Spielberg est à la production. Un appui de poids qui semble inspirer Abrams puisque, tant dans le jeu parfait du jeune casting que dans le mélange d’intime et de fantastique plane l’ombre du réalisateur d’ET (1982) et du producteur des Goonies (1985.On sent pourtant poindre la patte d’Abrams dans la difficile relation du héros et de son père après la perte récente de sa mère, qui n’est pas sans rappeler celle entre Sidney Bristow et son géniteur dans Alias. Abrams exprime ce fossé le temps d’une courte scène de dialogue tout en non-dits d’une belle subtilité. L’aspect le plus personnel réside dans les séquences ludiques montrant les adolescents en action pour tourner leur film. Là encore, les portraits sont croqués avec tendresse et humour dans une scène limpide qui esquisse une jolie amourette adolescente. Le point le plus intéressant semble également être la mise en scène d’Abrams, enfin au diapason. Le déraillement de train qui voit s’échapper la créature est un sacré morceau de bravoure que des cadrages amples et des mouvements virtuoses rendent terriblement efficace, les héros dévalant autour des débris s’écroulant sur eux. Enfin, la furtive attaque de la créature dans une station-service porte indéniablement la marque de Spielberg par sa lente montée en puissance, l’humour latent (qui ne désamorce par l’angoisse) étant dû à Abrams et définissant bien l’objectif du film. C’est néanmoins dans la partie intimiste que l’émotion fonctionne pleinement, la dimension spectaculaire étant un peu trop référentielle au fil de l’avancée du récit. On aurait préféré que Super 8 assume de pencher davantage vers la mélancolie du Stand by me de Rob Reiner (1986) plutôt que la pyrotechnie finale (où l’on peine à ressentir quelque chose pour la créature) car Abrams est sans doute contraint par son image d'entertainer, mais dans l’ensemble c’est tout à fait digne des meilleurs divertissements des 80’s. Sans doute le meilleur film de JJ Abrams, même s’il semble avoir été éclipsé par le succès de la série Stranger Things par la suite, nourrie des mêmes influences dans une veine plus feuilletonesque.Sorti en bluray et dvd zone 2 français chez Paramount
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