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mardi 21 octobre 2025

Joe Kidd - John Sturges (1972)

Dans les années 1900, au Nouveau-Mexique, Joe Kidd, un ancien chasseur de primes fraîchement libéré de prison, est engagé par un puissant propriétaire, Frank Harlan, pour débusquer Luis Chama qui aide les petits propriétaires mexicains face aux colons américains qui s'approprient leurs terres. Dégoûté par les méthodes d'Harlan, Kidd passe dans le camp de Chama.

Joe Kidd marque le rendez-vous en partie manqué entre John Sturges et Clint Eastwood. Leurs trajectoires sont inversées avec un Sturges sur la pente descendante (il ne signera plus que trois films par la suite) tandis qu’Eastwood est en train de s’installer comme une valeur sûre du paysage hollywoodien. Le film est d’ailleurs une des premières production Malpaso, la société de production d’Eastwood et on remarquera au générique nombre des collaborateurs attitrés que l’on retrouvera dans ses travaux futurs (Bruce Surtees à la photo, Buddy Van Horn aux cascades, James Fargo assistant-réalisateur). Le script d’Elmore Leonard s’inspire de l’action de l’activiste mexicain Reies Tijerina qui, en juin 1967, pris une cour de tribunal en otage afin de dénoncer la spoliation des terres des autochtones hispaniques par les colons américains dans l’état du Nouveau Mexique aux Etats-Unis. Le scénario transpose cet argument dans un cadre de western et fait de Reies Tijerina un hors-la-loi soutenant la même cause par différents coups d’éclats.

Le début du film s’inscrit d’ailleurs dans le courant du western démythificateur et politisé des années 70. Nous observons un groupe de mexicains échouer à faire valoir leurs droits par la voie honnête, une cour de tribunal réfutant la réalité de la propriété de leur terre, et ce soutenu par le système – les documents prouvant les faits ayant « brûlés » dans un incendie. C’est là qu’interviendra Luis Chama (John Saxon), pendant fictionnel de Reies Tijerina, brûlant les documents prouvant la possession des terres par les propriétaires blancs. En parallèle se dessine la figure de Joe Kidd (Clint Eastwood), quidam rétif au système de façon plus désinvolte, et alors emprisonné pour avoir abattu un cerf sur des terres protégées. La mise en place est très réussie, mettant en parallèle la réelle injustice sociale et une dimension plus caustique avec un Kidd décalé, dure à cuire et pince sans rire.

Cela se joue aussi dans la caractérisation des méchants. Robert Duvall amène une certaine bonhomie en propriétaire terrien impitoyable, secondé par une galerie de sbires dont l’excentricité n’a d’égale que les penchant sanguinaires. C’est l’observation impuissante de leur méfait qui provoque progressivement l’engagement de Kidd, dont le passif armé nous est peu à peu révélé. Sans être mémorable, l’intrigue est ainsi solidement tenue par un John Sturges toujours capable de livrer des morceaux de bravoures secs et nerveux. La tonalité politique, ou du moins sociale, prolonge l’héroïsme de Les Sept mercenaires (1967), et sa science du morceau de bravoure dans des environnements singuliers (se souvenir de son formidable Fort Bravo (1953) ressurgit ici avec notamment l’introduction d’un armement plus moderne comme le fusil à lunettes.

C’est surtout côté scénario que le bât blesse à mi-parcours. Un rebondissement a l’idée intéressante de montrer Luis Chama sous un jour plus ambigu et narcissique, mais n’en fait rien. Après s’être montré capable de sacrifier des innocents par égo, Chama est ramené à la raison par une simple remontrance de Kidd (dont le revirement avait été au contraire bien construit) et renoue avec son destin de héros du peuple. 

La dernière partie part donc sur un mauvais pied et, malgré un climax spectaculaire (presque trop au vu de la retenue qui a précédée) avec un déraillement de train, on reste sur un léger sentiment d’inachevé. La courte durée du film (moins d’une heure et demie) laisse penser que des coupes au montage ont sans doute altérées la portée du film. Joe Kidd reste cependant un honorable divertissement, mais l’on pouvait attendre plus au vu des talents en présence. 

Sorti en dvd zone 2 français chez Universal 

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