Durant les cinquante années passées, un  accord international avait assuré à la Grande-Bretagne sa domination  sur une petite île du Pacifique : un accord passé inaperçu… jusqu'à ce  que la mort du roi du petit territoire en question rappelle cet état de  fait à Whitehall, au Ministère des Affaires étrangères. Ainsi décide-on  d'envoyer sur place Cadogan de Vere Carlton-Browne dans le but de  rétablir des relations amicales…
Carlton-Browne of the F.O.  est une satire jubilatoire digne du meilleur de Ealing. L'association  des frères Boulting (aux rôles interchangeables de producteurs,  scénaristes et réalisateurs selon les films) est d'ailleurs un 
trademark tout aussi marquante que Ealing durant les années cinquante où ils sortiront plusieurs classiques de la comédie anglaise comme 
I'm All Right Jack,
 Lucky Jim ou ce 
Carlton-Browne of the F.O..  Le sujet est des plus savoureux : par l'intermédiaire d'un vieil  ambassadeur oublié par sa hiérarchie, la Grande-Bretagne découvre  l'existence de l'Etat de Gaillardia, petite île du pacifique où elle  bénéficie d'avantage économiques.

Problème, le roi de Gaillardia meurt  victime d'un attentat et tout se voit remis en question, les  britanniques subissant désormais la concurrence des américains et des  russes pour les faveurs locales et le profit des richissimes minerais de  l'île. L'incompétent Carlton-Brown (Terry Thomas) installé  à  l'habituellement oisif poste de Responsable des Territoires Divers  (grâce aux relations familiale de son père) se voit dépêché sur les  lieux bien malgré lui.

La farce est féroce et fait feu de tout  bois. Les occidentaux passent pour d'immenses profiteurs cyniques prêts  dans la plus pure tradition coloniale à s'approprier une terre et des  richesses qui ne sont pas les leurs. Les réunions de cabinet sous  couvert d'humour sont plutôt glaçante, tout comme l'accord communs des  Nations Unies qui permet aux Etats d'investir et d'exploiter Gaillardia  sous couvert de crainte de révolution. Le script fait de Gaillardia une  sorte de république bananière corrompue à la 
Tintin  ou Peter Sellers en conseiller fourbe et ambitieux offre un grand  numéro comique avec un accent sud-américain outrancier dont il a le  secret. Terry-Thomas en benêt improvisé ambassadeur est tout aussi  irrésistible de bêtise et très attachant sous ses airs ahuris.

Carlton-Brown représente un certain cliché de l'anglais insulaire jamais  sorti de son île et à son désavantage en toute circonstance, tandis que  les autres personnages anglais (le ministre des affaires étrangères  joué par Raymond Huntley, le Colonel Bellingham qui accompagne  Carton-Brown) illustrent eux le travers inverse de celui se croyant en  terrain conquis partout où il pose les pieds. Les dialogues tordant et  les gags énormes s'enchaînent sans discontinuer : l'arrivée de Carlton  Brown à l'aéroport de Gaillardia et la misérable parade locale qui  l'attend, l'écroulement des tribunes lors des festivités nationales, le  français folkorique et improvisé pour s'adresser aux autochtones, les  jeux de dupes avec les russe et les américains...

Le film est  sauvé du cynisme total par une jolie histoire d'amour entre le prince  héritier Loris (Ian Bannen charmant) et la concurrente présentée pour  lui disputer le trône Ilyena (Luciana Paluzzi dont on souvient pour la  plantureuse et féroce James Bond girl qu'elle fut dans 
Opération Tonnerre  plus tard). Au milieu de toute cette ironie, leur romance apporte une  respiration bienvenue et une certaine touche Hollywoodienne (
Vacances Romaines  n'est pas loin) dans la nature des quiproquos les rapprochant.
Message  acerbe, humour grinçant et idées loufoques en pagailles le tout avec  sens du rythme certain (malgré la densité de l'intrigue tout est bouclé  en 88 minutes), un excellent film. Les Boulting (dont on a déjà évoqué l'excellent 
The Family Way de Roy sur le blog) encore une belle filmographie à explorer.
Sorti en dvd zone  2 anglais et dépourvu de sous-titres
Extrait
 
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