Le détective privé
Philip Marlowe est engagé par une riche veuve, Elizabeth Murdock, pour trouver
une pièce de collection connue du nom de Brasher Doubloon. Marlow se retrouve
au milieu d'une affaire bien plus compliquée, avec chantage et meurtre, qui
l'oblige à côtoyer un nombre d'étranges individus. Ceci inclus Merle Davis, la
secrétaire plutôt dérangée de Mme Murdock, le rôle de cette dernière étant
beaucoup plus sinistre qu'il parait.
Les années 40 sont la période faste de la carrière de John
Brahm qui signera ses plus belles réussites à la Fox. Le réalisateur s’inscrit
dans les grands genres en vogue de la période tout en se les appropriant par sa
virtuosité formelle. Jack l’éventreur
(1944) et Hangover Square (1945)
surfent sur le courant du thriller et de l’épouvante gothique, Le Médaillon (1946) sur le film noir
psychanalytique tandis que Singapour
(1947) figure parmi les variations réussies de Casablanca (1942). Avec La
Pièce maudite, c’est donc l’occasion pour Brahm d’adapter le célèbre
détective privé de Raymond Chandler, Philip Marlowe. Il s’agit déjà la de la
sixième aventures cinématographique de Marlowe, la plus mémorable et
l’interprétation la plus marquante du personnage demeurant celle d’Humphrey
Bogart dans Le Grand Sommeil d’Howard
Hawks (1946). L’univers de Raymond Chandler se prête particulièrement bien aux
audacieuses variations sur le même thème, qu’elles soient narratives avec la
tortueuse intrigue de Le Grand Sommeil,
stylisée pour La Dame du lac et sa
caméra subjective (1947) ou encore la modernisation désabusée de Le Privé (1973).
On pouvait espérer que
John Brahm s’approprie à son tour le personnage de façon mémorable mais le film
reste finalement assez sage. Le film adapte le roman La
Grande Fenêtre (une première adaptation avec Lloyd Nolan en Marlowe fut
produite en 1942) et déroule sans trop de surprise le programme attendu.
L’intrigue nébuleuse voit Marlowe (George Montgomery) engagé pour retrouver une
pièce de collection dérobée à une riche veuve. Le culte de du secret de sa
commanditaire n’a d’égale que les rencontres dangereuses et inattendues que lui
réserve son enquête. Conscient de ses zones d’ombres, Marlowe ne l’accepte que
sous le charme de Merle Davis (Nancy Guild), la charmante et très torturée secrétaire
de Mme Murdock. La résolution fera preuve d’une vraie originalité avec son
mystère résolu dans les rushes d’un film amateur mais tout ce qui précède aura
été fort poussif.
Les indices et les situations peinent à distiller l’aura d’étrangeté
qui auraient pu captiver malgré l’intrigue un peu lâche et visuellement John
Brahm se montre trop sobre. Quelques fulgurances laissent éclater ses élans
gothiques (la scène nocturnes où Marlowe s’introduit chez Mme Murdock) et la
mise en scène se fait percutante lors des scènes de bagarres mais dans l’ensemble
ni l’histoire ni l’approche formelle ne suscitera de surprise. Néanmoins il
faut saluer l’interprétation pleine de panache de George Montgomery, moins
glaciale et pince-sans-rire qu’un Bogart mais tout en arrogance rieuse et
juvénile qui fonctionne très bien. La tension érotique entre lui et la
troublante Nancy Guild offre les quelques sorties de route qui manquent au film
qui donne plus dans la série B sage.
Sorti en dvd zone 2 français chez Rimini
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