Pendant la deuxième guerre mondiale Silvio Magnozzi est résistant et participe à la rédaction d'un journal clandestin. Alors qu'il cherche refuge dans un hôtel il est découvert par un allemand qui veut le fusiller. Il est sauvé de justesse par Elena, la fille de la patronne de l'hôtel. Celle-ci le cache et ils tombent amoureux. Quelques mois plus tard Silvio reprend le maquis. La guerre finie il travaille comme journaliste et à l'occasion d'un déplacement professionnel décide de la retrouver. Elena le suit à Rome où ils se marient. Mais les prises de positions radicales de Silvio ne rapportent pas d'argent et ils n'ont pas toujours de quoi manger. Suite à sa participation spontanée à une tentative d'insurrection Silvio est incarcéré, il débute la rédaction d'un roman "une vie difficile".
Un des plus beaux films de Dino Risi qui délivrait là sa première grande réussite vraiment personnelle avec ce parfait équilibre entre le récit intimiste, farce et une facette plus noire et politisée. Quand doit on renoncer à ses rêves et ambitions pour se résigner à une vie "normale" et rangée ? Tel est la question que ce posera tout au long du film le héros incarné par Alberto Sordi. Intellectuel de gauche aux rêves de grandeurs, il se voit régulièrement confronté à la dure réalité où son intégrité mais aussi sa vanité l'amènent dans une impasse impossible à surmonter.
Silvio est un personnage jusqu'au boutiste ne renonçant jamais à ses principes, quitte à s'autodétruire et à perdre progressivement tout ceux qu'il aime. Formidablement incarné par Alberto Sordi, notre héros poissard passe en un clin d'oeil de l'orgueil le plus démesuré à la bouffonnerie pure, à un pathétique touchant et pognant dans ses contradictions. Le film analyse très bien l'évolution de la société italienne, du tout politique de la fin de la deuxième guerre mondiale au matérialisme naissant du début des 60's qui va broyer le héros. On voit peu à peu les espoirs de gauche nés de la libération s'effondrer à l'image de la vie du héros où la fierté de son engagement va devenir un véritable poids pour sa famille. Quelques grands évènements politiques du pays sont passées en revues notamment la tragique défaite de la gauche en 1948 qui brisa pas mal d'élan et espoirs né de l'après Mussolini et le film exprime très bien certaines notions comme l'opposition entre les riches du nord et les paysans pauvres du sud, encore vivace alors. Malgré le fond dramatique, c'est l'angle comique qui domine par la manière dont un Sordi dépassé ne saura s'adapter à cette nouvelle donne pour se ridiculiser plus qu'à son tour.
Les moments hilarant sont légions tel cette scène où le couple de héros affamé et fauché parvient à s'incruster à dîner chez des royalistes un soir d'élections et que Sordi ne peut s'empêcher de se réjouir ouvertement (après avoir fait bien des efforts pour se contenir) de la victoire de son camp face aux convives effondrés (qui le congédient aussi sec). L'ambiguïté de Sordi entre conviction et plus basses ambitions se dévoile dans les moments où il s'abaisse le plus notamment les mots cruels que ivre il déverse de frustration à sa femme (magnifique Lea Massari) briseuse de carrière qui a entravé son destin en l'enfermant dans une prison domestique.
Sordi annonce en tout point le personnage de Stefano Satta Flores dans
Nous nous sommes tant aimés (traité en octobre sur le blog) dans cette figure d'intellectuel exalté et vindicatif mais imbu de lui même au risque de se perdre. Le ton du film aurait cependant être bien plus désenchanté et sombre (Risi y viendra avec le terriblement cynique
Au nom du peuple italien) notamment une dernière partie où Sordi abandonne tout par amour et se rabaisse. A la place du triste renoncement annoncé, c'est pourtant par la voie de ces sentiments profond réunissant le couple que les idéaux s'affirment intact et fiers lors d'une réjouissante dernière scène. Splendide.
Extrait du repas chez les royaliste énorme !
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