Quatre détenues d'un pénitencier, dirigé par Mc Queen, une invalide sadique, décident de s'échapper afin de dénoncer les pratiques de leur bourreau.
Aujourd'hui, le nom de Jonathan Demme est plutôt associé à un cinéma américain inventif et ambitieux grâce à la moisson d'Oscars de
Philadelphia et du
Silence des Agneaux. On aurait ainsi tendance à oublier qu'il débuta chez Roger Corman et œuvra d'abord dans la grosse série B qui tâche avant de mener bien plus tard la carrière prestigieuse que l'on sait.
Caged Heat est donc le premier film de Jonathan Demme qui en signe également le scénario. Il était déjà rompu aux méthodes frustres de Roger Corman puisqu'il produisit et écrivit pour lui auparavant deux films avec
Angels Hard as They Come (1971) et
The Hot Box (1972).
Caged Heat s'inscrit dans un genre aussi populaire que racoleur d'alors, le
WIP aka
Women in Prison. L'argument principal est de réunir plusieurs (jolies) jeunes femmes dans un cadre pénitentiaire où cette promiscuité sera la porte ouverte à tous les écarts pouvant titiller la gent masculine : scène saphique entre prisonnière, uniforme sexy, matons sadique et voyeur...
Sous cette approche racoleuse, le genre peut receler de vraie pépite lorgnant vers le film d'aventure (
The Big Doll House,
Black Mama White Mama) où au Japon le brûlot féministe pop avec la brillante série de
La Femme Scorpion avec Meiko Kaji. Roger Corman toujours à l'affût des succès rentables à la mode produira nombre de films dans cette veine et c'est tout naturellement qu'il demande à son protégé Jonathan Demme de signer un WIP pour ses débuts à la réalisation. Réticent à le lancer à ses frais, Corman exige une approche différente du genre à Demme et l'oblige à trouver lui-même le financement du film qu'il se contentera de distribuer.
Demme relève le défi et si
Caged Heat recèle tous les passages obligés du WIP (tous les prétextes sont bons pour dénuder nos prisonnières, scène de douche, bataille en t-shirt mouillé et autres joyeusetés aptes à satisfaire le public masculin) on sent déjà que le ton détone quelque peu de la série B efficace et sans relief habituelle. L'histoire s'attache au destin de cinq détenues et de leur mésaventure dans le redoutable pénitencier tenue par McQueen (Barbara Steele reine de l'épouvante gothique ici épatante en directrice handicapée et sexuellement frustrée).
Le récit les caractérise longuement entre la nouvelle venue Jackie (Erica Gavin), la forte tête Maggie (Juanita Brown) ou encore la kleptomane sexy Belle (Roberta Collins habituée du WIP puisque déjà vue dans les réussis
The Big Doll House et
Women in Cage produit par Corman également). Toutes vont se trouver confrontée à leur tour à la tyrannie ambiante régnant dans l'établissement. Psychologiquement troublée par son handicap lui retirant toute sexualité, la rigide McQueen se servira donc de sa position pour briser tout élan de féminité trop affirmé chez ses détenues.
La prison devient un espace mental oppresseur où toute manifestation de du désir emprunte des voies détournées, que ce soit le monde du rêve (plusieurs séquences onirique et fantasmée traversent le film pour montrer les songes torrides des prisonnière mais aussi de McQueen) ou par l'humour lorsque des prisonnières organisent un spectacle olé olé pour lequel elles seront sévèrement réprimées. Lorsque le sexe se manifeste réellement, c'est pour prendre une tournure malsaine avec les sévices du médecin qui sous couvert de mater les prisonnières violentes par un traitement radical satisfait également ses pulsions à leur détriment.
Le film emprunte une réflexion à travers le melting-pot de personnages sur le racisme, l'homosexualité et surtout un vrai brûlot féministe et social où le salut viendra de l'union sacrée des détenues. Tous les hommes sont des monstres libidineux et la seule femme se reniant en tant que telle est encore plus sournoise en se vengeant de sa frustration. Le message s'affirme par les choix inattendus (tous les aspects les plus ouvertement "facile" et racoleur du WIP sont réduits à la portion congrue par le script de Demme) dans le ton décalé ou franchement dramatique et les rebondissements surprenants.
Ainsi lors d'une conclusion épique, des prisonnières évadées reviennent armées jusqu'aux dents sur le lieu de leur tourment afin de prendre leur revanche et sauver leurs camarades. Un final rageur et nerveux en forme de "girl power" vindicatif dont saura se souvenir Quentin Tarantino dans la conclusion jubilatoire de son
Boulevard de la Mort (on pense aussi au
Sucker Punch de Zack Snyder). Le montage est certes parfois en roue libre, la mise en scène brinquebalante (au passage le fidèle Tak Fujimoto est déjà là à la photo) et le rythme boiteux mais une chose est sûre, une vraie personnalité et un auteur s'impose déjà dans ce produit de série.
Sorti en dvd zone 1 chez Paramount et sans sous-titres
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