Serge Alexandre Stavisky est un 
puissant conseiller financier, propriétaire de nombreux établissements. 
Ses relations étroites avec notables et hommes politiques lui confèrent 
de nombreux privilèges et lui évitent beaucoup d'ennuis judiciaires. 
Pourtant, une enquête est menée dans l'ombre par l'inspecteur Bonny qui 
l'accuse de détourner des millions de francs: c'est le début du scandale
 des faux bons de caisse de la banque de Bayonne. 
Stavisky
 marque sans doute pour Jean-Paul Belmondo la fin de sa carrière 
d'interprète pour désormais ne plus être pour le meilleur (Le 
Magnifique) et pour le pire (Les Morfalous) que "Bebel", le héros 
casse-cou et rigolard qu'il promène dans les gros divertissement qui 
firent sa gloire durant les années 70/80. L'échec du film (ajouté à 
celui de 
La Sirène du Mississippi
 de Truffaut) cassera donc le si brillant équilibre entre film d'auteur 
et populaire qu'il sut mener jusque-là ce qui est regrettable au vu de 
sa remarquable interprétation de Stavisky. Le film dépeint ainsi un des 
plus grands scandales politico-financier des années 30 avec l’affaire 
des bons de Bayonne des bons de Bayonne orchestré par l'escroc Alexandre
 Stavisky.

 
Même si on comprend grossièrement les tenants et 
aboutissants des magouilles de Stavisky, Resnais cherche plutôt à nous y
 perdre afin de dresser le portrait contrasté de son héros. Il nous est 
d'abord présenté comme un viveur flamboyant et dépensier dont le seul 
but est d'être vu, admiré et le seul sujet de conversation de sa 
société. Femmes (excellente scène où il couvre une inconnue séduisante 
de fleur en cinq minutes), politiques, banquiers, personne ne résiste à 
Stavisky ou plutôt à son nouvelle incarnation respectable Serge 
Alexandre. C'est bien cette schizophrénie qui causera sa perte puisque 
Serge Alexandre mène des affaires ambitieuses et respectables avec la 
roublardise de Stavisky, le prestige du premier s'opposant à la moralité
 toute relative du second.

 
Resnais captive en sondant cette dualité à 
travers sa narration (divers personnages donnant avec recul leur 
sentiment sur le héros dans des séquences interrompant la trame générale
 et en fait issue de l'enquête qui suivit la mort de Stavisky) mais 
surtout par un Stavisky rendu insaisissable par la superbe prestation 
d'un Belmondo parlant de lui-même à la troisième personne.
C'est dans la
 source de ce dédoublement de personnalité qu'il faudra chercher la 
cause du drame de Stavisky. Sept ans plutôt, son père dentiste 
respectable voyant son nom souillé se suicida suite à une des énièmes 
arrestations de son fils pour escroquerie et Stavisky après avoir noyé 
la perspective d'un procès à coups de pot de vins réapparu dans le monde
 en tant que Serge Alexandre. Ce passé le ronge et n'a jamais pu être 
complètement effacé, notamment par les traquenards tendus par 
l'Inspecteur Bonny (Claude Rich) qui a juré sa perte.

 
Resnais 
enveloppe habilement (à l'image de la photo vaporeuse de Sacha Vierny) 
cela d'un voile de mystère, ne surlignant jamais les évènements et 
laissant deviner ce que les évènements et agissements de Stavisky révèle
 de lui et de l'époque. La soif de reconnaissance vient ainsi de son 
besoin d'intégration, qui doit se faire sans courber l'échine comme le 
fit son père mais ce confronte au contexte politique agité et corrompu, 
où les prémisses du Pétainisme trouve déjà leurs sources. Si ce n'est 
l'amour indéfectible d'Arlette (magnifique Annie Duperey), Stavisky 
malgré son faste et son entourage est un homme seul.

 
C'est ce qui 
causera sa perte au final, Stavisky aurait fui pour tout recommencer 
ailleurs, Serge Alexandre souhaite rester et se défendre même si tout 
est perdu. L'ambiguïté du final obéit à cela, Stavisky a certainement 
été assassiné mais Serge Alexandre se serait plus probablement lui 
suicidé face à ce déshonneur. Lequel a été découvert par la police, là 
est la question. Un des films les plus accessibles de Resnais, 
visuellement somptueux (superbe reconstitution) et à l'atmosphère du 
rêve que n'a cessé de vouloir vivre Belmondo.
Sorti en dvd zone 2 français chez Studio Canal
 
Je trouve que c'est le film le plus "mainstream" de Resnais... Je ne sais pas si je me trompe ou si c'était effectivement conscient dans l'esprit de Resnais mais c'est un peu comme s'il essayait de se glisser dans un film "qualité france" pour le moduler, le modifier... (Bon, après, il s'est fait assassiner par la critique, et personne et aller le voir, donc a priori, c'est raté.)
RépondreSupprimerEst-ce qu'il y a des interviews, des analyses qui vont dans ce sens, ou est-ce que j'élucubre ?
C'est sûr que c'est un des Resnais les plus ouvertement accessibles et le fait de collaborer avec la superstar de l'époque Belmondo participe à ça. Après il y a une certaine ambition narrative et visuelle qui rend la chose un peu plus personnelle que du simple "qualité France", on est pas dans "Borsalio" (que j'aime bien quand même) quoi. Et puis même si certains de ces films peuvent être hermétique j'ai quand même l'impression (contrairement à un Godard par exemple) que des velléités plus grand public ne représentent pas une aberration pour Resnais, il n'y a qu'à voir son intérêt pour d'autres art populaire comme la bande dessinée.
SupprimerEt puis quand même on a rarement vu Belmondo aussi torturé dans ses rôles 70's c'est même la dernière fois où il prend autant de risque.