Fay Grim élève seule
son fils adolescent Ned, depuis que son mari Henry Fool est en fuite après
avoir commis involontairement un crime. Mais Simon, le frère de Fay, emprisonné
pour avoir aidé Henry à échapper à la police, s'interroge sur la véritable personnalité
de celui-ci. Dans le même temps, la CIA prend contact avec Fay afin de mettre
la main sur les carnets de note de Henry...
Fay Grim est la
suite tardive du cultissime Henry Fool
(1997), pic artistique et populaire d’Hal Hartley qui le verra friser la Palme
d’or et remporter le prix du scénario au Festival de Cannes. Henry Fool avait à
travers son héros-titre (Thomas Jay Ryan) développé une figure flamboyante et
pathétique, un autoproclamé génie décontenancé par le vrai talent littéraire de
Simon Grim (James Urbaniak), jeune homme mal dans sa peau qu’il a ouvert au
monde. Henry Fool dégageait à la fois un vrai mystère contenu dans ses « mémoires »
précieusement conservées dans des cahiers tout en se montrant particulièrement
gauche côté sentimental dans sa relation avec Fay (Parker Posey). La fin
ouverte du premier laissait voir ces deux facettes avec la fuite d’Henry.
Cette suite laisse tout d’abord voir les conséquences de cette
disparition, judiciaire pour Simon emprisonné pour l’avoir aidé à fuir et
intime pour Fay élevant désormais seule leur fils Ned. Fay Grim estompe à la fois le mystère de la fin ouverte du premier
film mais aussi celui entourant le passé d’Henry. Les fameux carnets de ses
mémoires contiendraient ainsi sous les digressions loufoques de vraies
informations où ses pérégrinations à travers le monde s’avèrent réelles et peu
flatteuses sur la politique américaine des dernières décennies. Contactée par
la CIA, Fay est lancée malgré elle sur la piste des carnets manquants que
divers agents, groupuscules et agences internationales. C’est donc vraiment la
présence de personnages familiers qui maintiennent le lien avec un film d’espionnage
loin du ton intimiste d’Henry Fool voire de la filmographie 90’s d’Hal Hartley.
Les multitudes de rebondissements, coup de théâtre et
rencontres incongrues constituent donc un véritable voyage dans la psyché
tourmentée d’Henry, son esprit imprégnant le film avant son attendue
réapparition finale. L’incongruité de la progression du jeu de piste participe
à cette idée mais également le filmage d’Hal Hartley. Le choix de la caméra
numérique change complètement de la texture formelle de ses films 90’s et
cadrage quasi ininterrompu en plan cassé de biais participe à ce côté quelque
peu halluciné. La remise en perspective
formelle et narrative de son univers par Hartley est donc audacieuse et
intéressante mais ne convainc pas totalement.
Pour détourner les codes du film
d’espionnage encore faut-il les installer rigoureusement avant de tout dérégler
mais ici la mise en place est d’emblée trop laborieuse. Hormis le beau
personnage de Bebe (Elina Löwensohn parmi les actrices fétches d’Hartley) tous
les protagonistes sont des pantins sans profondeurs et l’ancrage géopolitique
est assez maladroit - tout comme la topographie des différentes villes et pays traversés guère exploités. Du l’implication se dilue progressivement et il faut
vraiment le retour d’Henry Fool dans la dernière partie pour vaguement relancer
l’intérêt. Une suite qui paie un peu son audace finalement et n’égale
pas son glorieux prédécesseur. Au vu d’une nouvelle fin ouverte, Hal Hartley
apportera cependant un troisième volet à la saga avec Ned Rifle (2014) s’attardant sur le destin du fils tout en
retrouvant l’ensemble des protagonistes.
Sorti en bluray chez Possible Films
J’aime beaucoup ce film policier. L’intrigue est surprenante et je souhaite le regarder à nouveau. De plus, cette réalisation d’Hal Hartley a été présentée au Festival International de Toronto en 2006.
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