Le tristement célèbre
tueur à gages Duke Togo, aussi connu sous le pseudonyme de Golgo 13, est chargé
d'assassiner Robert Dawson, le fils du riche baron du pétrole Leonard Dawson et
le futur héritier des entreprises Dawson. Il fait face à la vengeance de Dawson.
Après avoir accompli sa mission, Golgo est attaqué par l'armée et découvre que
son informateur a été tué par un assassin mystérieux connu sous le nom de
Snake. Aidé par l'armée, le FBI et la CIA, Dawson est déterminé à tuer Golgo et
venger la mort de son fils.
Golgo 13 : The
Professionnal est la troisième adaptation du manga de Takao Saitō et plus
précisément la première transposition animée. Le manga s’impose dès sa parution
à partir de 1968 comme un sommet du gekiga, courant plus réaliste qui connaît
un véritable essor dans les années 60/70 au Japon. Golgo 13 est un personnage
emblématique des héros à la virilité toute puissante de cette période, croisant
les attributs séducteurs et implacables d’un James Bond tout en assumant le
métier plus explicitement immoral de tueur à gage.
Le manga célèbre ainsi le
mystère entourant Golgo 13 ainsi que son efficacité relevant les défis les plus
impossibles lors de ses assassinats virtuoses. L’œuvre de Saito remportera un
immense succès (au point d’être toujours publiée actuellement) et aura droit à
deux adaptation live assez ratées (Golgo
13 (1973) et Golgo 13: Assignment
Kowloon (1977)) avec Ken Takakura puis Sonny Chiba dans
le rôle-titre. Golgo 13 trouvera ses lettres de noblesse dans l’animation et
plus particulièrement avec ce Golgo 13 :
The Professional que signe Osamu Dezaki en 1983.
Dezaki est à l’époque au sommet de son art, ayant rôdé une
approche réaliste et marquée dans des séries TV comme Rémi sans famille, Lady Oscar
et Cobra. Le réalisateur croise un
découpage et des compositions de plan s’inspirant du cinéma live avec une
stylisation donnant une forme de grandiloquence et dramatisation qui culmine
avec les arrêts sur image crayonnés lors des moments de tension. L’univers à la
fois réaliste et pop de Golgo 13 se prête d’autant plus à cette approche et l’ensemble
du film constitue un vrai sommet esthétique. L’histoire possède un fil
conducteur avec la vengeance d’un baron du pétrole dont Duke Togo (supposé vrai
nom de Golgo 13) a assassiné le fils, mais est également entrecoupé de missions
et d’antagonistes qui auraient pu (et c’est sans doute le cas dans le manga)
constituer des aventures à part entière. Si l’aspect collage se fait un peu
ressentir, l’avantage est que chaque séquence est un morceau de bravoure en
soi, dans le récit même par les prouesses de Duke mais également formelle par l’inventivité
constante de Dezaki pour les mettre en scène.
Le réalisateur joue tout d’abord des distances et angles
improbables des tirs de Duke avec son fusil d'assaut M-16 A2. Dezaki peut faire
surgir la mort dans un moment anodin (la scène d’ouverture) avant de révéler
son bras armé dans une pure logique de stupéfaction. D’autres fois nous
assisterons au long préparatif où le suspense se distend dans le temps d’attente
avant le tir, voire le tir en lui-même en accompagnant la trajectoire de la
balle jusqu’à sa victime. Lorsque Duke se trouvera traqué mais devant quand même
accomplir sa mission, ces deux aspects se conjuguent avec à la fois la
sidération dans la manière dont il aura trompé ses ennemis mais aussi dans le
défi des lois de la physique que signifie l’assassinat (le meurtre de l’homme d’affaire
ancien nazi). Le scénario sait également faire brillamment surgir les coups de
théâtre telle cette amante docile qui s’avère être une redoutable cible.
L’approche adulte se ressent autant dans une violence
décomplexée et sanglante que tout ce qui touche au sexe. L’éloge de la virilité
et le machisme prononcé donne une véritable célébration du repos du guerrier où
les plantureuses héroïnes (Dezaki avait déjà eu l’occasion de se faire plaisir
de ce côté-là sur Cobra) sont en
pâmoison pour un Duke aussi stoïque à l’horizontale qu’en mission. Aussi
putassière soient-elles, ces scènes s’inscrivent dans les clichés hard-boiled d’alors et son magnifiée par la mise en scène
de Dezaki jouant sur les contre-jours, sur les angles mettant en valeur ces « créatures »
féminines. Une insoutenable scène de viol se dote ainsi d’une approche
opératique tout sauf gratuite, mais traduisant dans sa grandiloquence la double
émotion de la détermination et du renoncement de personnages qui ont tout
perdus.
Les envolées baroques, la dimension pop et les éclats
ensanglantés outranciers font presque penser à du Seijun Suzuki (le candidat
idéal pour une version live s’il avait été encore en odeur de sainteté avec les
studios) transposé en animation. L’univers part d’une base réaliste que Dezaki bouscule
en le soumettant aux émotions des personnages. La scène où Dawson perd
définitivement pied dans son désir de vengeance s’orne d’une photo écarlate où
il n’est plus qu’un démon en furie. C’est cependant dans l’action pure que
Dezaki donne le meilleur. Les adversaires se voient dotés d’une menace reposant
sur leur pur aspect repoussant (le libidineux Snake) ou un background
inquiétant (le duo de tueurs final qui ont droit à un aparté glaçant sur leurs « origines »
un vrai film dans le film oppressant) qui créent une forme d’attente captivante
avant la confrontation - et vraiment chacun aurait pu être un antagoniste à
part entière pour tout le film.
Dezaki ne déçoit pas lorsque la rencontre a
lieu, notamment le virtuose combat dans l’ascenseur avec Snake jouant
simultanément sur l’exiguïté du lieu tout en prenant de la distance dans un jeu
d’ombres et zoom/dézoom où l’on observe les silhouettes s’affronter de
loin. Les deux tueurs sont eu auréolés d’une présence de quasi film d’horreur
dans leur facultés et la manière dont les éclairages traitent leur présence à l’image. Le fil rouge n’est pas oublié sous le déluge d’action avec une
révélation finale dramatique qui remet tout en question. Une date dans la
japanimation et une éclatante réussite de plus pour Dezaki qui retrouvera le
personnage bien tard dans Golgo 13 :
Queen Bee (1998).
Sorti en dvd zone 2 anglais et doté de sous-titres anglais
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