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vendredi 2 septembre 2022

L'Espion qui venait du surgelé - Le spie vengono dal semifreddo, Mario Bava (1966)


 Le Dr Goldfoot, un savant fou (Vincent Price), veut tuer les principaux dirigeants militaires de l'Est et de l'Ouest, de manière à diriger ensuite le monde avec les Chinois. Pour arriver à ses fins, il crée dans son laboratoire secret un grand nombre de bombes ayant l'apparence de très belles filles, qui explosent quand on les embrasse.

L’Espion qui venait du surgelé est une tentative de comédie pop assez poussive de la part de Mario Bava, avant la vraie réussite qu’il signera dans le genre avec Danger Diabolik (1967). Le cinéma de divertissement des années 60 est plongé en plein Bondmania avec le succès des aventures de l’agent 007, notamment le triomphe de Goldfinger (1964) et Opération Tonnerre (1965). Les décalques et les parodies se multiplient alors avec Coplan et autres OSS 117 en Europe, de grosses comédies prétexte au kitsch et mise en valeur de la plastique de starlettes aux Etats-Unis. Justement en 1965 les producteurs Samuel Z. Arkoff et James H. Nicholson produisent pour leur compagnie American International Pictures le film Dr. Goldfoot and the Bikini Machine, parodie bondienne qui rencontrera un certain succès et dans laquelle brille la star maison Vincent Price en méchant mégalo. Ce premier film mélangeait film d’espionnage et film de plage (prétexte à avoir le plus souvent ses actrices en maillot de bain), sous-genre destiné au public adolescent et réalisé par Norman Taurog qui s’était illustré dans ce registre durant les années 60. Les producteurs décident d’en produire une suite qui se déroulerait en Europe et plus précisément en Italie. 

Pour partager les dépenses, ils décident de s’associer au producteur italien Fulvio Lucisano qui vient de produire La Planète des Vampires (1965) de Mario Bava qu’il va proposer à la réalisation. Fulvio Lucisano a rencontré aussi récemment le succès avec sa propre parodie de James Bond, Deux Mafiosi contre Goldginger (1965) porté par le duo comique Franco Franchi/ Ciccio Ingrassia. Il est sollicité par les Américains alors que lui-même s’apprêtait à produire une suite sa comédie bondienne. Le film ayant bien marché aux Etats-Unis, il est alors décidé de faire du film à la fois la suite de Dr. Goldfoot and the Bikini Machine et une continuité de Deux Mafiosi contre Goldginger en engageant aussi le duo comique. Autant dire que le malheureux Mario Bava n’a pas une très grande marge de manœuvre dans ce contexte et le résultat s’en ressent malheureusement. 

Les meilleurs détournements de James Bond brillent soit par leur folie pop comme la première version de Casino Royale (1967, Val Guest, Kenneth Hughes, John Huston, Joseph McGrath et Robert Parrish) et/ou alors par une vraie rigueur narrative en faisant un spectacle réussi qui n’a pas à rougir face à son modèle comme l’excellent Plus féroce que les mâles de Ralph Thomas (1967). Le film pèche sur ces deux points. Malgré quelques fulgurances, l’humour est totalement inconsistant entre les pitreries paillardes et triviales de Franco Franchi/ Ciccio Ingrassia, l’approche gentiment sexy voulue par les producteurs américains et les velléités plus subtiles recherchées par Mario Bava comme la scène parodiant le cinéma muet.

Sans ligne directrice et en courant plusieurs lièvres à la fois, rien ne fonctionne vraiment même si l’on ne passe pas un mauvais moment. Le film démarre sans remise en contexte comme si tout le monde avait vu le premier volet, Vincent Price semble bien s’amuser et brise plusieurs fois le quatrième mur pour s’adresser au spectateur, et les jeunes filles courtes vêtues défilent sans discontinuer. Les ruptures de ton empêchent de s’intéresser un minimum à l’ébauche de scénario tournant autour de complot à l’OTAN et les personnages sont des caricatures plus qu’autre chose.

Formellement c’est très décevant également puisque Mario Bava génie formel capable de faire paraitre le triple de son budget à la production la plus fauchée a dû déléguer les effets spéciaux et le production design à un tiers. Le résultat sera si cheap qu’il devra finalement mettre la main à la patte mais bien trop tard, et donc le film ne remplit pas non plus le contrat du spectaculaire (une poursuite en ballon très laide). On sourira au mieux de temps en temps notamment sur les éléments plus italiens de comédie (ce forain gueulard qui poursuit les héros de sa véhémence même mort) et du charme et charisme déjà palpable de la belle Laura Antonelli dont c’est le quasi premier rôle. Pas une franche réussite donc, mais Mario Bava se rattrapera dans ce registre avec l’autrement plus plaisant Danger Diabolik


 Sorti en dvd zone 2 français chez Artus Film

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