Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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lundi 23 avril 2012

Une femme disparaît - The Lady Vanishes, Alfred Hitchcock (1938)


Dans un train en provenance d'Europe centrale, Iris Henderson voyage en compagnie de Miss Froy, une vieille dame britannique comme elle, dont elle a fait connaissance dans un hôtel la veille. Au cours du voyage, Miss Froy disparaît mystérieusement. La jeune femme s’inquiète, mais personne ne veut la croire et on tente de la convaincre qu'elle a tout imaginé.

The Lady Vanishes est l'avant-dernier dernier film de la période anglaise d'Hitchcock (le dernier étant La Taverne de la Jamaïque l'année suivante) dont l'immense succès lui permettra de négocier en position de force son futur départ à Hollywood après l'échec commercial de ses trois précédents films. Au départ cette production Gainsborough ne lui est pourtant pas destinée. Un an plus tôt, le réalisateur Roy William Neill devait réaliser le film sous le titre The Lost Lady mais parti en repérage en Yougoslavie, l'équipe est prise à part puis expulsée par la police locale qui a découvert le portrait peu reluisant fait des autorités du pays dans le script. Hitchcock hérite donc du projet après l'éviction de la première équipe et comme à son habitude remanie considérablement le roman The Wheel Spins d'Ethel Lina White à l'origine du script pour le plier à sa vision.

Par rapport au premier projet Hitchcock invente la contrée imaginaire de la Bandrika en lieu et place de la Yougoslavie, modifie le rôle désormais un peu moins innocent de Miss Froy, introduit les duettistes amateurs de cricket Charters and Caldicott et modifie plusieurs évènements (le trouble de l'héroïne causée par la chute d’un pot de fleur et plus un coup de soleil, le McGuffin ou encore la conclusion alors que le train ne s'arrête jamais dans le livre). Au casting le réalisateur fait confiance à deux inconnus, Margaret Lockwood qui n'a alors que quelques seconds rôles derrière elle et Michael Redgrave surtout célèbre au théâtre à l'époque (et qu'il ne souhaitait guère quitter son ami John Gielgud le convaincant d'accepter le rôle qui ferait de lui une star).

The Lady Vanishes est un des films d'Hitchcock où s'entremêlent le mieux sa causticité et son art du suspense. La première partie est ainsi un régal d'humour anglais où s'illustrent quelques moments savoureux présentant les différents protagonistes coincés dans un hôtel après le retard de leur train. On retiendra ces anglais choqués par le sans gêne de cette femme de chambre locale se changeant en toute décontraction dans leur chambre ou encore l'amusante altercation façon screwball comedy entre le bruyant musicien Michael Redgrave et Margaret Lockwood.

La tension s'instaure de manière fort inattendue le temps d'une brève et mystérieuse séquence annonçant une suite moins détendue. L'intrigue se noue donc durant le voyage en train où Margaret Lockwood perd la trace de l'avenante vieille dame Miss Froy (Dame May Whitty) se volatilise et que personne ne semble l'avoir aperçue. Hitchcock instaure une paranoïa oppressante où la langue inconnue, les personnages double (les plus avenant étant toujours les plus fourbes) et les idées visuelle née de la confusion de Margaret Lockwood créent l'empathie en lui faisant progressivement perdre pied.

A cela s'ajoute une veine plus critique et décalée entre le couple adultère qui par peur d'être découvert refuse d'appuyer les dires de Lockwood ou encore le duo Charters et Caldicott qui fait de même par peur qu'une enquête retarde le train et leur fasse rater un match de cricket (obéissant à un motif récurrent du cinéma anglais de l'époque où les personnages sont punis de leur "anglicité").

Charters and Caldicott sont de pures création des scénaristes Sidney Gilliat et Frank Launder qui les feront réapparaître (toujours incarnés par Naunton Wayne et Basil Radford qui réclameront sans succès une part plus importante dans les intrigues) dans d'autre films comme Train de nuit pour Munich de Carol Reed (très voisin du Hitchcock avec toujours Margaret Lockwood plongée dans un suspense ferroviaire) et le film à sketch Ealing Au cœur de la nuit.

Alors que son argument principal permettrait de tenir un film entier chez un autre, Hitchcock amène lui de nombreux rebondissement surprenant qui relance constamment l'action. Après la paranoïa pure, c'est le jeu de piste, la course poursuite puis le siège qui s'alterneront au sein du train tout au long de l'intrigue trépidante. Hitchcock multiplie les idées ludiques sollicitant constamment notre attention tel les divers indices prouvant la véracité des dires de Lockwood mais que ces interlocuteurs ne voient pas ou trop tard.

L'ensemble est rondement mené avec comme toujours chez Hitchcock son lot de péripéties extravagantes tel cet acolyte adepte de la magie (et une longue et laborieuse scène de bagarre) où cet épilogue où ne voit même pas être neutralisé un comparse qui menaçait nos héros d'une arme ! Un excellent suspense et un des meilleurs Hitchcock de sa période anglaise.

Sorti en dvd zone 2 français chez TF1 et pour les anglophones le Criterion est recommandé voire le coffret Margaret Lockwood où la copie est très belle.


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