Eté 1912. Depuis la mort de sa femme, M. Ladmiral, un vieux peintre sans génie, vit seul avec Mercédès, sa domestique. La routine de ses vieux jours est ponctuée par les visites dominicales d'Edouard, son fils, un garçon rangé, épris d'ordre et de bienséance, qu'accompagnent invariablement son épouse, Marie-Thérèse et leurs trois enfants, Emile, Lucien et Mireille. Mais un dimanche, sans crier gare, Irène, sa fille, une jeune femme joviale et anticonformiste, vient bousculer ce paisible rituel...
Bertrand Tavernier réalisait une de ses œuvres les plus réussies et plébiscitées avec
Un dimanche à la campagne dont la spontanéité découle également des circonstances de sa production. Ne parvenant pas à monter un projet onéreux de Tavernier avec Nathalie Baye nécessitant un tournage à l'étranger, le producteur Alain Sarde lui demande de s'atteler à une œuvre plus modeste. Tavernier ne semble guère inspiré lors de l'entrevue quand Sarde remarque parmi ses affaires un exemplaire du court roman de Pierre Bost
Monsieur Ladmiral va bientôt mourir. Le producteur dépité lui suggère d'adapter le roman, Tavernier lui rétorque qu'il est sans doute trop court pour faire un film mais s'attèlera néanmoins au script. Finalement très inspiré, il en tirera suffisamment de matière pour lancer la production modeste et bien aidée par l'unité de temps et de lieu de l'intrigue.
Le film est placé sous le signe de la nonchalance et de l'habitude. Le vieux peintre M. Ladmiral (Louis Ducreux) accueil comme tant d'autres dimanche son fils et sa famille passer la journée avec lui à la campagne. Le rituel suit son court, les échanges sont amicaux, quelconques et attendus et chacun fait preuve d'une bienveillance infantile envers le vieil homme. Les personnalités ternes du fils Edouard (Michel Aumont) et de son épouse Marie-Thérèse se révèle dans les dialogues où la voix off littéraire à la Truffaut de Tavernier lui-même.
Dans cette atmosphère ronronnante, la langueur du début d'après-midi semble déjà signifier la fin de la journée quand un ouragan débarque. Irène (Sabine Azéma), exubérante et énergique fille cadette de Ladmiral vient bousculer tout cela. Tavernier déploie alors une gamme de sentiments touchants dans cette atmosphère joyeuse et feutrée où la saveur du moment accompagne aussi les interrogations de chacun. Irène éclatante de joie de vivre dissimule sous les rires ce qu'on devine être un dépit amoureux, Ladmiral voit lui sa fille préférée lui échapper de plus en plus tandis qu'Edouard le fils modèle souffre en silence de cette préférence affiché.
Tous les comédiens sont parfaits notamment Sabine Azéma qui rayonne et séduit devant la caméra de Tavernier (qui avait hésité à l'engager à cause d'un rôle plus introverti qui avait précédé chez Resnais) pour un de ses plus beaux rôles, Louis Ducreux apporte quant à lui cette fragilité et ce décalage (sa petit fille coincée dans un arbre il ne se préoccupe que de la préparation du thé) qui sied si bien à Ladmiral à travers ce regard aimant et mélancolique. Pas de conflits ni de grand rebondissements dramatiques, tout passera par des échanges sensibles (le dialogue père/fille au bal où le conformisme du premier est remis en cause par la modernité de la seconde) ou les regards, geste à la dérobées bien plus révélateurs.
Tout cela est capturé avec une recherche esthétique raffinée d'un Tavernier s'inspirant des impressionnistes dans de superbes compositions de plans où la photo de Bruno de Keyzer fait merveille. Cette tonalité éveille autant la nostalgie des souvenirs d'enfance que la mélancolie du temps qui passe dans une belle harmonie. Joli moment qui offrira un de ses grands succès à Tavernier notamment aux Etats-Unis.
Sorti en dvd chez Studio Canal
Extrait
Ce film reste un grand souvenir (à revoir donc!) comme tous les films de Tavernier...
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