Les gouvernements
américain et britannique font face à un vol de navette spatiale. L'agent 007 et
Holly Goodhead, charmante espionne américaine, tentent de déjouer les noirs
desseins du mégalomaniaque Hugo Drax, fasciné par la conquête spatiale. Une
course contre la montre s’engage pour éviter rien de moins que l’extinction de
l’espèce humaine...
Le générique de fin de L’Espion qui m’aimait (1977) annonçait le retour de James Bond dans Rien que pour vos yeux. Le succès
immense de L’Espion qui m’aimait (qui
relance la Bondmania et installe définitivement Roger Moore dans le rôle) et l’engouement
du public pour la science-fiction avec les triomphe de Star Wars (1977) et Rencontre
du troisième type (1977) en décideront autrement. Cubby Broccoli voit donc
grand pour l’opus suivant et va remanier considérablement la trame du roman
original de Ian Fleming, la fusée destinée à détruire Londres devenant un
génocide planétaire mâtinée de relecture de l’Arche de Noé. Pour des raisons
fiscales l’essentiel du tournage est délocalisé en France dont la majorité des
studios sont monopolisés, e qui n’empêchera pas un budget pharaonique supérieur
à celui de l’ensemble des six premiers Bond réunis.
Cet investissement comporte néanmoins une faille, puisque
pour être remboursé il va nécessiter un opus bien plus orienté grand public,
dans le mauvais sens du terme. Tout démarre plutôt bien avec un pré-générique d’anthologie
où Bond défie les airs sans parachute à travers une cascade mémorable (même si
le gag final de la scène annonce les dérives à venir). La première heure est
prenante par ses confrontations larvées (la première entrevue glaciale entre
Bond et Hugo Drax (Michael Lonsdale), le mystère distillée par l’enquête de
Bond et l’inventivité des environnements tel ce château français implanté en
Californie. Alors que L’Espion qui m’aimait
avait su trouver un certain équilibre en action premier degré et une certaine
dérision collant à la personnalité de Roger Moore, Moonraker va progressivement dérailler. Le retour de l’homme de
main Jaws (Richard Kiel) se fait en dépit du bon sens, la popularité du
personnage en faisant un grand dadais maladroit plutôt qu’un impitoyable tueur –
ce côté cartoon étant accentué par la rencontre de son grand amour.
Cette schizophrénie se traduit par des élans de noirceur et
de suspense typique des Bond classique – Bond qui passe un mauvais quart d’heure
dans une centrifugeuse, où la tragique exécution de Corinne Clery sur une
superbe composition de John Barry – et le grotesque de certaines situations, le
soupçon de mauvais goût qui vient casser toute la mise en place. La gondole
truffée de gadgets de Bond et les réactions de la population (redite ratée du
même effet avec la Lotus amphibie de L’Espion
qui m’aimait) prêtent à rire, et tout le film est ainsi avec une amorce
dramatique et/ou formelle intéressante dont la chute parodique brise tous les
efforts. Ainsi la composition de plan, la direction artistique et la photo
splendide éblouissent lors d’un combat dans la tour d’une horloge, mais la mort
ridicule de l’antagoniste annihile l’impact de la séquence.
Ce problème de ton est d’autant plus regrettable que les
équipes techniques ont fournis des efforts exceptionnel sur cet opus. Lewis
Gilbert même parasité par l’orientation légère retrouve l’ampleur et l’élégant
sens du cadre propre à magnifier les décors naturels traversés (notamment les
séquences au Brésil) et capturer le gigantisme des créations folle de Ken Adam
au design. La salle de contrôle nichée au sein d’un temple Inca égale ainsi en
démesure le volcan/base secrète de On ne vit que deux fois (1967) par son mélange improbable de rococo ancestral et
de technologie. Le plus grand défi restait cependant les séquences spatiales,
avec l’argument vendeur des affiches Where
all the other Bonds ends this one begins ! Et effectivement après l’ensemble
poussif qui a précédé, la dernière partie relève largement la tête.
Le
décollage des fusées de Drax, leur arrivée et la découverte de la station
spatiale de ce dernier offre un vrai effet de sidération et de monumental porté
par le score grandiose de John Barry (qui semble s’être trompé de film pour
lâcher pareille composition). Les maquettes de Derek Meddings et les effets
optiques de Robin Brown et John Richardson offrent un résultat impressionnant
en ces heures pré effets numériques et vaudront une nomination aux Oscars pour
le film. Les écarts kitsch ne sont certes jamais loin (les combats spatiaux au
laser) mais l’approche épique fait tout de même fonctionner l’ensemble.
Roger Moore traverse le film de manière assez anonyme sans
le flegme distancié de l’opus précédent, Michael Lonsdale est plutôt
convaincant par sa présence torturée et Lois Chiles (gratifiée d’un nom dans la
tradition des jeux de mots salaces des héroïnes bondiennes avec ce savoureux
Holly Goodhead) ne parvient pas à faire oublier Barbara Bach en égal féminin de
Bond. Le film sera un triomphe au box-office, le plus gros de la saga jusqu’à
la sortie de Goldeneye (1995), mais reste désormais décrié pour ses
orientations douteuses.
Sorti en bluray et dvd zone 2 chez Sony
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