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mercredi 27 août 2025

Les Étrangleurs de Bombay - The Stranglers of Bombay, Terence Fisher (1959)

En Inde, à la fin du XIXe siècle, une secte d'étrangleurs appelée les Thugs est la source d'enlèvements, de meurtres et de mutilations de voyageurs qui traversent les régions du pays sous leur influence. Les actes violents perpétrés par les membres de la secte ont pour but d'offrir des sacrifices rituels à la déesse indienne Kali. Un régiment britannique se lance alors aux trousses des tueurs, afin de les mettre hors d'état de nuire.

Les Étrangleurs de Bombay est une production Hammer s’appuyant habilement sur une réalité historique pour installer son récit à suspense. En l’occurrence il s’agit ici de la lutte de l’Empire colonial britannique contre la secte des Thugs en Inde. Certains éléments, comme l’introduction didactique ou encore l’épilogue citant de véritables officiers britanniques ayant dirigé cette lutte, tendent à inscrire le film dans une certaine véracité. Il n’y a par exemple aucune dimension explicitement fantastique ou d’éléments pulps qui feront plus tard le sel du nettement plus extravagant Indiana Jones et le Temple Maudit de Steven Spielberg (1984) mettant aussi en scène les Thugs.

Sans forcément aller jusqu’à lui attribuer un réalisme documentaire, les rituels et exactions de la secte correspondent dans les grandes lignes à ce que l’on sait de leur culte vénérant la déesse Kali. Terence Fisher prend le même soin dans la description du quotidien colonial. Le Capitaine Harry Lewis (Guy Rolfe), lui-même déconsidéré et déclassé dans le corps de l’armée malgré ses aptitudes, est ainsi par ce biais le plus préoccupé et en empathie envers la population locale. C’est lui qui, dédaigné par sa hiérarchie, finit par comprendre l’influence des Thugs en étant le confident de ses amis autochtones lui rapportant les enlèvements et disparitions mystérieuses parmi leurs proches. 

Le clivage de classe typique de la société anglaise se prolonge dans ces contrées lointaines et en mettant au ban le seul protagoniste bienveillant et ancré localement, empêche un individu tout en plaçant une communauté sous la menace des Thugs. Le scénario exprime frontalement la seule raison d’être du colonialisme, celle d’exploiter les ressources et une population à des fins capitalistes, générer des profits East India Company. Ce n’est que quand le profit commencera à être menacé que les lignes bougeront quelque peu.

Fisher étend son étude au système de caste indienne, l’absence d’entraide des locaux face à la menace s’y heurtant. Les plus pauvres en subissent les conséquences, tandis que les Thugs infiltrés sont issus des hautes castes. Il y a une certaine ambiance paranoïaque qui en découle et fonctionne assez bien, évitant le racisme sous-jacent (même si jouant sur cette tonalité pulp) que l’on pouvait malgré tout ressentir devant Indiana Jones et le Temple maudit malgré ses évidentes vertus divertissantes. Cette rigueur historique rend le film prenant, mais en freine parfois les pures vertus de frayeur. Terence Fisher tire son épingle du jeu par une violence surprenante, toute en sadisme et imagerie macabre. Les tortures inhérentes au culte de Kali et leurs conséquences sont dépeintes avec une frontalité à peine atténuée par les ciseaux de la censure anglaise horrifiée par le premier montage. 

Yeux crevés au fer rouge, tranchage de membres, découvertes de cimetières clandestins, rien ne nous est épargné et Fisher lui-même se surprendra à constater qu’il a sans doute eu la main lourde. La photo d’Arthur Grant s’équilibre entre les clair/obscur stylisé des scènes nocturnes inquiétantes, et des séquences diurnes rendant la moiteur palpable – même si de toute évidence le film n’a pas été tourné en Inde et que les extérieurs sont parcimonieux. Malgré une conclusion un peu trop expéditive, c’est en tout cas ce qui fait le sel de cette production gardant juste ce qu’il faut du cinéma d’exploitation pour privilégier une authenticité louable.

Sorti en bluray anglais sous-tiré anglais chez Powerhouse 

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