Une petite ville frontière de l'Ouest américain est sous la coupe de Phil Decker et de sa bande. À la suite de la mort du shérif, Decker nomme à ce poste l'ivrogne du village, Barnaby. Ce dernier fait appel alors au fils de son vieil ami, Tom Destry. Quand ce dernier arrive, il n'a pas du tout la figure de l'emploi…
George Marshall signe avec Le Nettoyeur un remake de son Femme ou démon réalisé en 1939. Il s’agit là de la troisième adaptation du roman de Max Brand (une première version avec Tom Mix datant de 1932), sans compter les remakes officieux comme Frenchie de Louis King (1951) ce qui prouve le fort potentiel de cette histoire incitant à de nouvelles variations. La grande idée du film est le choix d’Audie Murphy dans le rôle d’un shérif procédurier, à cheval sur l’application stricte de la loi et rejetant l’usage des armes. Des qualités à la fois contradictoires dans ce contexte de l’Ouest où règne la loi du plus fort, mais aussi si l’on se penche sur la vie personnelle de son interprète.
Engagé encore mineur au sein de l’armée américaine durant la Deuxième Guerre Mondiale, Audie Murphy va s’y distinguer de manière impressionnante puisque sa bravoure lui vaudra de remporter toutes les décorations militaires existantes de l’armée de terre américaine. Devenu une célébrité après-guerre, il entame une carrière cinématographique qui exploitera largement ce passif, indirectement dans un film historique comme La Charge victorieuse de John Huston (1951) ou frontalement dans L’Enfer des hommes de Jesse Hibbs qui adapte son autobiographie. Murphy a malheureusement développé suite à ces expériences des syndromes de stress post-traumatique, souffrant notamment d’insomnie, de crises de violence et entretenant une fascination pour les armes (et en gardant d’ailleurs une sous son oreiller).C’est donc assez captivant de le voir incarner un personnage aussi stoïque et maître de lui-même, l’autre contraste résidant dans le physique poupin et éternellement juvénile d’Audie Murphy. Le cadre du récit est une ville de l’Ouest vivant sous la tyrannie du riche Decker (Lyle Bettger) qui avec sa bande fonctionne justement sur la menace, l’intimidation et la violence explicite. Tom Destry (Audie Murphy) est annoncé par Rags (Thomas Mitchell) shérif par défaut et ancien frère d’armes de son père, comme un dur à cuir qui va mettre la ville au pas. Dans cet environnement hostile fonctionnant grandement sur les apparences et le machisme, l’apparition de Destry, sa carrure frêle et ses manières de gendre idéal, vont ainsi prêter à la moquerie. Marshall joue grandement de la connaissance du spectateur de l’époque des réelles aptitudes de Murphy pour créer un contre-emploi et décalage amusant (les plans d'ensemble accentuant la petite taille de Murphy, les contre-plongée sur les personnages qui le toisent), mais aussi un sentiment d’attente du moment ou Destry va hausser le ton. Murphy/Destry n’a pas besoin de montrer ce dont il est capable, ou du moins que lorsque ce sera nécessaire puisqu’il sait et nous savons ce qu’il en est.On appréciera donc la patience du personnage, appliquant rigoureusement la loi quitte à se mettre à dos ceux qu’il doit défendre, pour user de son esprit plutôt que de ses muscles. L’intrigue est assez simple mais le plaisir réside à voir Destry mettre ses interlocuteurs en porte à faux par son sens de la déduction, ses manières déstabilisantes tel un Sherlock Holmes western jusqu’à recouper les informations qu’il recherche et appliquer la loi à bon escient. Les démonstrations de force sont brillamment amenées et là aussi dans une volonté de désarçonner les adversaires. Destry qui ses attitudes de « pied tendre » pour montrer sa virtuosité au revolver, avec l’arme que ses ennemis le croyant inoffensif lui ont confiés et faire ainsi une analyse balistique afin de trouver des preuves. Un pur exemple où l’agressivité frontale n’aurait pas fonctionné. Le film est peu trop sage par ailleurs malgré une tenue formelle honorable ne tient donc qu’au seul charisme d’Audie Murphy. En effet contrairement à la version de 1939 où James Stewart en Destry partageait la vedette avec Marlène Dietrich, Destry est plus central ici et la relation avec la danseuse de saloon Brandi (Mari Blanchard) est plus secondaire – malgré quelques amorces d’émotions plus profondes. Un agréable divertissement donc et une proposition de western plutôt singulière.Sorti en dvd zone 2 français chez Sidonis
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