Depuis sa victoire sur
Deacon Frost, Blade continue sa chasse aux suceurs tout en cherchant Abraham
Whistler, son père adoptif et mentor, laissé pour mort dans le premier film. Celui-ci
a survécu et succombé au virus du vampirisme. Blade l’a cherché à travers la
Russie, et en Europe de l’Est, enrôlant au passage un jeune homme surnommé Scud
afin de lui concevoir une nouvelle ligne d’équipements et d’armes. Pendant ce
temps, une crise est en cours dans la communauté vampire. Le virus du
vampirisme semble avoir muté en une nouvelle souche (le virus reaper) qui
balaie leurs rangs, donnant de nouvelles caractéristiques redoutables à ses
transporteurs. Le transporteur original du virus semble être Jared Nomak, un
mystérieux vampire aux intentions étranges.
Le succès de Blade
ainsi que ses choix artistiques forts ayant fait école contribuèrent à lancer
une première vague de film de super-héros Marvel, notamment un X-men (2000) lui étant fort redevable. C’est
tout naturellement qu’une suite fut envisagée et après des relations orageuses
avec Stephen Norrington, le choix de la production se porta sur Guillermo Del
Toro à la réalisation. Celui-ci avait connu une première expérience hollywoodienne
cauchemardesque avec le film d’horreur Mimic
(1997) où il fut malmené par les frères Weinstein. La société de Peter
Frankfurt, l’un des producteurs de Blade
2 avait signé le générique de Mimic
et ce dernier avait ainsi décelé dans le visuel de Del Toro sa capacité à
apporter une plus-value à cette suite. Del Toro posera donc ses conditions en
obligeant le studio à attendre qu’il réalise le plus personnel L’échine du
diable (2001) avant Blade 2.
Blade 2 diffère de
son prédécesseur en bien des points. La dichotomie ente le monde réel et celui sous-terrain
et parallèle des vampires au centre du premier film disparait. L’atmosphère
urbaine réaliste et paranoïaque s’estompe
donc pour celle gothico-industrielle des pays de l’est où nous ne quitterons
pas les ténèbres de l’univers des vampires. Blade doit en effet faire équipe
avec ses pires ennemis pour répondre à une nouvelle menace : une mutation
du virus vampirique a créé les reapers, nouvelle race de prédateurs se nourrissant
de vampire avant de passer aux humains. Le film est typique des qualités et des
défauts de Del Toro avec un visuel flamboyant mais un récit un peu basique et
trop référencé.
L’intéressante exploration des fêlures de Blade du premier opus
disparaît donc complètement au profit d’un pur ride d’action survitaminé. Blade
même si sous influence avait su inventer un ton et une forme largement reprise
par la suite (ambiance urbaine gothique, incursion des arts martiaux, look SM
cuir) par Matrix (1999) entre autre
mais sans emprunt explicite. Avec Del Toro c’est nettement plus explicite avec
le commando de vampires accompagnant Blade lorgnant à la sauce gothique sur les
marines d’Aliens (James Cameron, 1986), la démesure des combats s’inspirant
de la japanimation et plus particulièrement Yoshiaki Kawajiri et son furieux Ninja Scroll (1994). Des séquences
entières nous rappellent ces glorieux prédécesseurs comme l’exploration d’égouts
sous haute tension (l’arrivée des marines sur la planète décimée d’Aliens encore) mais une chose que l’on
ne peut retirer à Del Toro, c’est son style plein de panache.
Blade 2 offre donc
un faramineux crescendo d’action alors que le premier film ne parvenait pas à égaler
une entrée en matière mémorable. Del Toro y poursuit les tentatives de Matrix de marier la nervosité du cinéma
d’action de Hong Kong (Donnie Yen est chorégraphe des combats et tient un petit
rôle), jeux vidéo et animation japonaise. Il créera ainsi pour les besoin du
film la « L-cam », caméra pouvant effectuer des mouvements impossible
et accompagner ainsi Blade dans les chorégraphies aérienne les plus surhumaine
(l’ouverture où elle tournoie autour de lui et le suit de son saut d’un
immeuble de quatre étage à son atterrissage au sol). Les acteurs sont également
secondés par des doublures numériques durant les combats, leur permettant d’adopter
les postures les plus improbables et iconiques. Du jamais vu à l’époque même si
le rendu fait désormais très jeu vidéo mais en tout cas l’usage est d’une
efficacité maximale dans l’action.
La dimension gothique est également très
soignée, notamment tout ce qui tourne autour de la caractérisation de
Damaskinos (Thomas Kretschmann), chef des vampires dont le riche passé
transparaît dans la majesté et la vétusté très étudiée des décors qui l’entoure.
Del Toro vise donc à l’adrénaline alignant les répliques viriles (les échanges
fleuris entre Blade et le méchant aux penchants nazis qu’incarne génialement
Ron Perlman), ce côté flambeur s’expliquant par la volonté du réalisateur de
démontrer son savoir-faire en vue de convaincre les studios de financer son
adaptation du comics Hellboy de Mike
Mignola. Cela déteint sur l’interprétation de Wesley Snipes toujours aussi
charismatique et poseur en Blade (superbe composition de plan à la Frazetta
lorsqu’il est assaillit par les reapers dans les égouts) mais qui perd un peu
de la vulnérabilité et de la crise identitaire qui faisait l’intérêt du
personnage dans le premier film. Ici c’est la course en avant qui importe
(parfois au détriment du scénario voir le retour tiré par les cheveux du mentor
Whistler) malgré les esquisses de moments intimistes entre Blade et Nyssa
(Leonore Varela).
Del Toro parvient à équilibrer tout cela dans la dernière
partie où se dessine un inattendu drame shakespearien quant aux liens unissant
les méchants mêlé à des morceaux de bravoures toujours plus outrancier. Nomak
incarne un splendide méchant tragique et s’offre nombre de séquences furieuses
(la scène d’introduction qui détourne celle du piège vampire du premier volet),
les reapers et leurs vélocités bestiales faisant basculer ce Blade 2 dans le pur film d’horreur (le reapers
transpercer préférant s’éventrer pour s’enfuir). Le duel final entre Blade et
Nomak est sans doute une des séquences les plus brillantes vue dans un film de
super-héros, la virtuosité de Del Toro se mettant au service d’une empoignade
tout en démesure comics.
Tous les outils précédemment évoqués forment un tout
virevoltant (arts martiaux, doublure numérique, caméra voltigeuse) pour un pur
moment de jubilation bourrine. La dernière scène fait même preuve d’un romantisme
et d’une poésie inattendue avec ce poignant coucher de soleil. Guillermo Del
Toro parfois si ennuyeux dans son fantastique « d’auteur » le plus
chichiteux (Le labyrinthe de Pan (2006)
son défilé de créatures et son propos creux faussement poétique, L’échine du diable resucée mal digérée de
la bd Paracuellos, Crimson Peak (2015) et son gothique
victorien pour les nuls) signe son meilleur film en visant à la seule
efficacité, ce qu’il réussira dans une moindre mesure avec Hellboy (2004).
Sorti en dvd zone 2 français et bluray chez Metropolitan
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