En 1797, le « Téméraire » est envoyé rejoindre
la flotte britannique en Méditerranée. À son bord, le lieutenant
Scott-Padget est un homme cruel qui s'acharne sur l'équipage au moindre
prétexte. Conscient de la révolte qui gronde, le capitaine Crawford
tente de reprendre en mains le navire en attaquant un navire français au
large de la Corse.
Lewis Gilbert signe un de ses meilleurs films avec ce H.M.S. Defiant, adapté du roman Mutiny de Frank Tilsley (paru en 1958) et qui tout comme le plus célèbre Les Révoltés du Bounty (le roman de James Norman Hall et Charles Nordhoff ainsi que ses multiples adaptations) transpose un fait historique réel. . En mars 1797, la Royal Navy dû en effet
faire face à la Mutinerie de Spithead
soit la rébellion concertée des marins de onze navires contestant les
conditions de vie épouvantable en soldes misérables, discipline
intraitable et recrutement forcé. Après une rude négociation, les marins
auront gain de cause et reprendront le service sans subir de sanction
le 15 mai 1797.
Pour plus de tension, l'intrigue du film intègre
ce contexte aux Guerres Napoléoniennes même si cela s'avère
historiquement inexact puisque tout en respectant la date des évènements
on anticipe un conflit dont les prémisses se situent plutôt en 1799. La
brutalité inhérente à la Royal Navy s'illustre avant même que le récit
ait gagné la mer avec la violente séquence de The Press
soit le recrutement forcé de quidam arraché avec violence à leur
quotidien. Les deux personnalités amenées à s'opposer sont présentées en
parallèle dans cette ouverture. On voit le Capitaine Crawford (Alec
Guinness) prendre ses ordres de mission auprès de ses supérieurs dans un
dialogue où on le devine compatissant pour les conditions misérables de
son équipage quand dans le même temps son second le lieutenant
Scott-Padget (Dirk Bogarde) est le meneur prenant plaisir à enrôler des
malheureux contre leur gré. Une fois en mer, les jeux de pouvoirs
associés à la gronde sociale latente va faire monter graduellement la
tension.
On voit ainsi les minutieux préparatifs de la fameuse mutinerie
dont la volonté augmente ou s'amenuise selon la domination à bord entre
l'humaniste Crawford et le sadique Scott-Padget soumettant les matelots
au fouet au moindre embryon d'incartade. Dirk Bogarde est excellent
dans ce rôle détestable, il faut le voir littéralement jouir du
claquement de fouet sur le dos de ses malheureuse victimes ou de
savourer la crainte qu'il génère au sein de l'équipage glacé par un
simple regard. L'acteur se montre très subtil, sa cruauté jouant à la
fois de la conscience de supériorité de classe, sadisme pur et simple et
volonté de domination - il est sous-entendu que son attitude a
précédemment poussés ses précédents capitaines à la cour martiale.
Lewis
Gilbert filme avec brio le quotidien du navire, de la colère grondant
dans les cales au duel psychologique sur le pont entre les officiers et
réussit avec fluidité à caractériser habilement un grand nombre de
protagonistes (Anthony Quayle est excellent en meneur pacifiste et
réfléchi de la fronde). Les enjeux sont intelligemment relancés à
travers un conflit feutré et retors qui laisse voir les failles de ces
codes militaires maritimes - Crawford impuissant face aux maltraitances
de son jeune fils aspirant sur le navire - et l'ascendance sociale
devenir un instrument de pouvoir pour Dirk Bogarde.
Parallèlement
Gilbert nous offre un vrai grand film d'aventure spectaculaire avec des
affrontements épiques et variés. On aura droit à du duel frontal entre
navires français et anglais où le réalisateur témoigne d'une belle
ampleur (les plans d'ensemble des deux navires face à face), d'un sens
de la destruction certains et d'une violence sanglante lors des
abordages. A d'autre moment cela jouera sur la pure stratégie avec un
navire de guerre camouflé en bateau de commerce et le superbe final joue
la carte de l'émotion avec un choix cornélien entre la cause sociale et
la patrie, là aussi dans une impressionnante péripétie. Une très belle
réussite portée par un grand trio d'acteur Alec Guinness/Dirk
Bogarde/Anthony Quayle.
Sorti en dvd zone 2 anglais chez Columbia et doté de sous-titres anglais
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