Dans un appartement
moderne de Riverside Drive, à New York. Mary se réveille dans le lit de John,
un garçon qu'elle a rencontré la veille dans un bar. Alors qu'il est encore
endormi, Mary fouille dans la maison pour en savoir plus sur son mode de vie.
John est un jeune homme très méticuleux, alors que Mary est plutôt brouillonne.
Elle a un amant occasionnel tandis que lui a mal vécu la séparation d'avec
Ruth, un top model. Les deux jeunes gens se plaisent, mais chacun d'eux craint
d'être prisonnier d'une nouvelle liaison. Mary quitte la maison et John est
désemparé. Il part à sa recherche. En vain, car il ne sait rien d'elle...
Les années soixante amenèrent leur lot de bouleversements
sociologiques, notamment dans les rapports homme/femme. Le cinéma, et plus
précisément américain, mené par les jeunes loups du Nouvel Hollywood, devait
intégrer cette nouvelle donne à leur film. L’exemple le plus parlant serait
certainement le Bonnie and Clyde
d’Arthur Penn avec son duo de gangsters fragile et glamour à la fois, faisant
de Faye Dunaway l’égal de Warren Beatty (implicitement gratifié d’impuissance
sexuelle) dans les scènes d’action. Le meilleur terrain de jeu pour témoigner
de cette mutation (sexualité libérée, code Hays malmené…) était certainement la
comédie romantique, genre audacieux mais timoré en raison de la censure,
obligeant les cinéastes à aborder certains thèmes de manière détournée. John
and Mary, belle réussite de l’inégal Peter Yates (Bullit, La Guerre de Murphy)
en est un bel exemple, pris entre modernité et sentimentalité intemporelle.
Au petit matin, Dustin Hoffman et Mia Farrow se réveillent
dans le même lit après une nuit passée ensemble. C’est le point de départ de
cette comédie romantique qui inverse le propos en amenant tout le registre de
la séduction après l’acte, dans une unité de temps et de lieu épatante
(Greenwich Village se dévoilant en toile de fond). Un peu empruntés et méfiants
l’un envers l’autre, les deux vont apprendre à se connaître durant la journée
qui suit ce qui devait être une coucherie sans lendemain. Yates multiplie les
astuces narratives géniales et ludiques : arrêt sur image, flashback dévoilant
la rencontre finalement assez quelconque de la veille ou encore le passé des
héros, faux flash forward où ils imaginent ce qu’ils feront du reste de leur journée
après s’être débarrassés l’un de l’autre.
Les pensées des héros dévoilées en
voix off à des moments clés du film créent un décalage hilarant, que ce soient
les tactiques de séduction, les mots mal interprétés qui déclenchent la
suspicion des deux côtés (dont un passage tordant où Hoffman soupçonne Farrow
de vouloir s’installer chez lui, lorsqu’elle réfléchit au dîner du soir en
contemplant ses provisions). Sans vraiment s’en rendre compte, les deux sont
tombés amoureux et sont incapables de se « décoller », sentiment renforcé par
une intrigue qui ne quitte jamais l’appartement d’Hoffman. Cette contrainte
spatiale crée progressivement une fausse nonchalance, un ennui factice tandis
que le rapprochement inconscient est lui bien réel.
Le film adopte le mécanisme narratif des comédies
romantiques de l’âge d’or hollywoodien, tout en usant des inventions formelles
du Nouvel Hollywood, largement influencé par la Nouvelle Vague et notamment par
À bout de souffle (la ressemblance physique de Mia Farrow avec Jean Seberg et
son fameux look cheveux courts, ou les longs instants oisifs dans
l’appartement). L’alchimie entre Hoffman (qui a gardé tout le charme juvénile
du Lauréat) et une Mia Farrow
absolument craquante (époque Rosemary’s
Baby) font le reste. La dimension sexuelle est bien présente sans être
appuyée outre mesure. C’est d’ailleurs là une des réussites du film : amener la
rencontre par des voies nettement moins conventionnelles qu’auparavant, tout en
illustrant la romance naissante par des attitudes et comportements universels.
Le contexte a beau se faire plus moderne, au final, la maladresse est la même
chez tous les amoureux, quelle que soit l’époque…
Sorti en bluray et dvd zone 2 français chez Solaris découverte
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