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jeudi 7 octobre 2021

Chasseur de Vampires D - Kyûketsuki hantâ D, Toyoo Ashida (1985)


 Dans un lointain futur, sur une Terre dévastée, l'humanité est revenue à un mode de vie quasi-médiéval. Dans le même temps, les vampires sont sortis de leurs retraites millénaires et terrorisent les habitants des villages. C'est dans un de ces villages que D, le très mystérieux chasseur de vampires, rencontre une jeune fille qui va l'entraîner au cœur des ténèbres, à la poursuite du Seigneur Vampire vieux de 10.000 ans...

Vampire Hunter D est la première adaptation du héros de la série de romans de Hideyuki Kikuchi. Démarrées en 1983, les aventures littéraires de D sont longues de 45 romans (le dernier datant de 2018) et diverses déclinaisons.  Le succès des livres devait autant au fascinant personnage mi-homme/mi-vampire de D qu’aux illustrations qu’en donna l’artiste Yoshitaka Amano, façonnant une vraie esthétique à l’univers de Kikuchi. Si cette imagerie sera magnifiée avec virtuosité dans Vampire Hunter D : Bloodlust (2000), la seconde et tardive adaptation, ce sera un vrai problème sur ce premier film témoignant de toute la complexité à animer les designs complexes de Amano. Cette première transposition est donc plutôt mal-aimée et oubliée mais mérite vraiment le coup d’œil. 

L’histoire se déroule dans un futur postapocalyptique où plusieurs formes de créatures démoniaques ont ressurgi et pris le pouvoir dont les vampires. D est le fruit des amours d’un Noble (seigneur vampire ancestraux) et d’une humaine qui s’est converti en chasseur de vampire, défendant les humains tout en combattant les pulsions sanglantes de son héritage. Il va être engagé par une jeune fille étant la cible d’un Noble millénaire terrifiant la région. L’aventure sera donc l’occasion pour D de se confronter au même dilemme qui contribua à sa naissance, à travers l’attirance qu’il aura pour sa cliente et du dégoût ressenti pour le Noble prédateur.

Le film questionne la dimension d’attirance/répulsion de la figure du vampire. Cela se joue à travers une notion de classe sociale, tant dans la société des vampires où la fille du Noble voit comme une régression de voir son père s’unir à une humaine de basse extraction, que chez certains humains dont un antagoniste rêvant d’être récompensé de l’immortalité pour ses actions. D est quant à lui une figure taciturne captivante dont les silences trahissent la nature torturée. Laisser prévaloir sa part humaine et étouffer ses instincts vampires réclament chez lui une maîtrise qui l’oblige à ce tempérament stoïque et détaché. Sa jeune cliente malgré son dégoût des vampires va d’ailleurs progressivement deviner en lui une âme douce et ressentir une attirance. 

Visuellement le film soutient difficilement la comparaison en termes d’animation avec l’opus de 2000. Les personnages sont icônisés avec brio tant qu’ils restent immobiles mais dès qu’il s’agit de les faire se mouvoir dans l’action, l’animation trahit une vraie raideur peinant à dynamiser les dessins d’Amano. Cependant le film a pour lui un vrai sens de la composition qui nous offre nombre de somptueux tableaux gothiques et de désolations dont se dégage une atmosphère oppressante de tous les instants. La réalisation s’autorise des envolées psyché inventives et typiques de la liberté de l’animation japonaise de l’époque où l’expérimental s’entremêle au velléités grand public. Un des rares avantages par rapport au second film réside aussi dans ses grands écarts de nudité et de violence. Le film de Kawajiri certes formellement somptueux était, à cause de la coproduction américaine, dépourvu de tous les éléments borderline et dérangeant faisant son cinéma et malgré l’écrin formel splendide Vampire Hunter D : Bloodlust était un film assez sage et « occidentalisé » . Rien de tout cela ici avec son lot de créatures innommables dont l’effroi et la soif de sang sont magistralement retranscrits à l’image, notamment lors de l’expédition de D dans le château du Noble où il fera de sinistres rencontres dans les sous-terrain (harpies, Golem, démons aux allures improbables). 

Malgré ses défauts, le film a donc pour lui son ambiance réellement inquiétante et oppressante, un vrai mélodrame d’horreur  tandis que le film suivant émerveillera presque trop sans réellement faire peur - un film d'action avec des éléments fantastiques. On peut aussi trouver que le personnage de D est bien plus fouillé et intéressant ici, notamment dans le poignant rapport qu’il entretient avec la jeune fille, le mystère et la solitude qu’il dégage – notamment la piste entrevue sur ses origines et la raison de son invulnérabilité. A ce titre la conclusion se dote d’un beau souffle romanesque passant essentiellement par l’image. Donc même si vous vénérez le film de Kawajiri, ce premier volet en dépit de ses scories est un superbe objet ayant largement sa place dans le mythe de Vampire Hunter D – une traduction française des livres serait bienvenue d’ailleurs. 

Sorti en dvd zone 2 français chez Kazé

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