Une brillante avocate
troublée par le charme d'un gigolo manipulateur accusé de meurtre, décide de le
défendre malgré les preuves évidentes de sa culpabilité.
Guilty as sin est
un Lumet très mineur mais pas désagréable, porté par le scénario d’un Larry
Cohen toujours habile à tisser des pitch de thrillers roublards. Lumet y
explore un environnement récurrent de sa filmographie, la cour d’un tribunal.
Ces lieux et leurs alcôves sont pour le réalisateur vecteur de dilemmes moraux captivants dans des œuvres comme Douze hommes en colère (1957), Le Prince de New York (1981), Le Verdict (1982),
Dans l’Ombre de Manhattan (1997) et
de comédie humaine hilarante dans le plus tardif Jugez-moi coupable (2006). L’Avocat
du diable est bien loin de la richesse thématique de ces films mais fait
également du tribunal le cadre d’un affrontement intéressant. La brillante
avocate Jennifer Haines (Rebecca De Mornay) y règne en maître, imposant son
charme, bagout et autorité comme le montre la scène d’ouverture où elle fait
acquitter un homme d’affaire véreux. Les plans d’ensemble de l’héroïne
arpentant et dominant la cour, la silhouette séduisante ainsi que l’assurance
déterminée qu’elle dégage affirment par l’image son charisme. Il en va de même
dans sa vie privée avec une scène sensuelle la montrant après son procès se
montrer une amante aussi entreprenante qu’elle ne l’est lors de ses
plaidoiries. C’est une femme accomplie dont le vernis va progressivement se
fissurer avec la rencontre de David Greenhill (Don Johnson).
Jennifer y voit un défi de plus avec ce gigolo accusé du
meurtre de sa femme, mais ce client pas comme les autres va au contraire
révéler sa fragilité. Don Johnson déploie dans un premier une bonhomie
sympathique avec ce personne d’ineffable séducteur prenant tout à la légère.
Cette désinvolture est pourtant un masque dissimulant une volonté de domination
sur la gent féminine de pouvoir. Cela semble d’abord purement pécuniaire et
motif de comédie avec les richissimes bienfaitrices qu’il soumet à sa volonté
(notamment pour payer sa note d’avocat) mais on comprend que ce besoin de
domination va plus loin. Il voit en Jennifer une adversaire plus coriace que
ces victimes habituelles et va se faire un plaisir de la briser
psychologiquement.
Larry Cohen multiplie les situations ambigües plaçant l’avocate
en porte à faux par le seul jeu manipulateur de Greenhill, et Don Johnson est diablement
inquiétant avec cet éclat de folie dans le regard sous le brushing et les
costumes impeccables. Sidney Lumet traduit ce rapport de force par une mise en
scène subtile où Rebecca De Mornay semble de plus en plus écrasée par l’aura
maléfique de Don Johnson. Le jeu de séduction initial la place immédiatement en
situation de faiblesse alors qu’elle pense dominer. Le premier coup de folie de
Don Johnson montre la silhouette de l’acteur en amorce au premier plan,
surplombant Rebecca De Mornay pour la première interloquée par l’étrangeté de
son client. Plus tard le réalisateur rallongera et rétrécira à sa guise des
environnements vastes comme la salle de réunion du cabinet d’avocat où se
rencontre les deux personnages. La distance puis le rapprochement, le jeu sur
la profondeur de champs et la bascule sur les plans américains se font au gré
du dialogue où Don Johnson déstabilise Rebecca De Mornay, faisant d’elle sa
proie en finissant la scène tout proche d’elle dans une fausse posture d’amant
et une vraie attitude de fauve.
Tout cela reste très intéressant tant que l’on reste dans le
duel psychologique et les faux-semblants. Malheureusement quand vient l’heure
des révélations le film tombe dans tous les clichés possibles du thriller du
samedi soir. Les rebondissements grossiers s’enchaînent, emmenés par un Don
Johnson omniscient et démoniaque qui perd grandement de son intérêt. L’argument
féministe se perd complètement aussi, Rebecca De Mornay ne renversant pas la
tendance en mettant à son tour à profit son intelligence pour se montrer l’égal
de son adversaire. A la place on aura une bagarre ridicule qui conclut l’ensemble
dans la précipitation brouillonne. C’est bien dommage, d’autant qu’en cette
même année Rebecca De Mornay incarnera (dans un registre plus négatif certes)
un personnage sacrément retors et charismatique dans le thriller La Main sur le berceau.
Sorti en dvd zone 2 français Hollywood Pictures
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