Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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samedi 6 février 2021

August in the Water - Mizu no naka no hachigatsu, Sogo Ishii (1995)

Après la chute de deux météorites, la population de la région de Fukuoka est, peu à peu, affectée par une étrange maladie. Ukiya et Mao sont amoureux d'Izumi, une championne de plongeon. Suite à une mauvais saut, Izumi tombe dans le coma - comme certains autre habitants de la région. A son réveil, elle développe des pouvoirs extra-sensoriels qui lui font comprendre que le monde est promis à la destruction à moins qu'elle ne s'interpose.

Après des débuts expérimentaux marqués par un style punk, Sogo Ishii effectue dans les années 90 un virage vers des œuvres plus mystérieuse, oniriques et apaisées comme Angel Dust (1994), Le Labyrinthe des rêves (1997) ou ce August in the water. Le film entrecroise le récit d'apprentissage adolescent avec un postulat mystico-fantastique et teintée de peurs apocalyptiques marquées par cette fin de XXe siècle. La région de Fukuoka est plongée dans un été caniculaire où se manifestent d'étranges phénomènes depuis la chute de deux météorites. Les sources d'eau se tarissent ce qui entraîne une grande sécheresse, tandis qu'un mal inconnu appelé la "maladie de pierre" qui transforme les organes en pierre frappe la population. C'est en cette période trouble que le jeune Mao (Shinsuke Aoki) rencontre une nouvelle élève, Izumi (Rena Komine) qui est aussi une aspirante championne de plongeon. Les joies et les peines de ce premier amour fragiles vont s'entremêler à cette atmosphère de fin du monde qui symbolise aussi la perte d'innocence.

Une sorte de destinée ou volonté supérieure plane d'emblée sur les personnages. Lorsque Ukiya (Masaaki Takarai) autre camarade de lycée amoureux d'Izumi veut mesurer ses chances avec elle, il ira consulter son amie Miki (Reiko Matsuo) férue d'astrologie voir la compatibilité de leurs signes. Cet élément trivial révèle pourtant une funeste perspective qui se révèlera exact pour Izumi qui tombe dans le coma suite à un incident de plongeon. La jeune fille déjà hypersensible en réchappe mais perçoit désormais son environnement très différemment. Sogo Ishii parvient brillamment à conférer à une éclatante esthétique estivale une atmosphère inquiétante. La menace est d'abord latente et incertaine quand sa caméra parcoure les rues de Fukuoka, s'attardant sur le ciment brûlé par le soleil, déformant l'image en longues focales pour accentuer l'effet de canicule et provocant la crainte sourde et inexpliquée avec les multiples images de quidams s'effondrant frappés par la "maladie de pierre" de plus en plus contagieuse.

Le réalisateur adopte ensuite un point de vue double, celui de Mao et de l'entourage d'Izumi témoins perplexes de la métamorphose de celle-ci, puis celui d'Izumi elle-même où à travers son regard on saisit cette perception nouvelle du monde qui l'entoure. Le jeu détaché et mutique de Rena Komine est le pivot de la rupture narrative et stylistique du film après une première partie teintée d'étrange mais où l'on en restait au récit adolescent candide. Symptômes de désordre mental suite au coma ou éveil à un nouvel état qui pourrait expliquer (et stopper) les phénomènes étranges alentours ? Le film laisse planer un fascinant mystère et si l'on penchera plutôt pour l'option fantastique, Sogo Ishii ne fait intervenir aucun élément formel explicitement surnaturel dans sa mise en scène. Tout est une question d'ambiance, faite de vues planantes sur les paysages, d'inserts sur la faune et la flore, auxquels la photo de Norimichi Kasamatsu donne un effet à la fois réaliste et halluciné. La bande-son qui mélange actualités alarmistes et musique synthétique flottante participe pleinement à ce sentiment d'angoisse et de rêverie.

Même quand vient l'heure des similis explications, le film demeure envoutant grâce à cette approche. Selon le moment de la journée (ou du récit) où l'on retrouve certains décors naturels, ceux-ci basculent d'un mysticisme animiste ancré dans le réel à une imagerie qui nous emmènent presque sur une autre planète. La pierre et les autels sacrés en forêt peuvent vues comme les vestiges d'un passé ancestral ou, une passerelle pour un ailleurs représentant le futur de l'humanité. Le dauphin, parmi les mammifères les plus intelligents et fascinants de par son moyens de communication, en devient donc un interlocuteur privilégié pour Izumi incomprise des humains.

La couleur du film varie progressivement du bleu de l'eau rattachée à la terre et l'humanité vers des teintes plus contrastées exprimant la dualité et le détachement progressif d'Izumi. On est happé de bout en bout et le récit onirique fonctionne tout autant que la romance (très chaste), jusqu'à une sublime scène d'adieu o l'aimée s'évanouit comme dans un songe avant de plus tardives et touchantes retrouvailles. Une œuvre envoutante qui fait finalement figure de pré Donnie Darko (2001) au Japon, peut-être que Richard Kelly a vu ce film, en tout cas les ponts thématiques (l'angoisse millénariste de fin du monde, la mélancolie adolescente) et visuels sont là.

Sorti en dvd zone 2 anglais et doté de sous-titres anglais et il semble que le film traîne en entier et sous-titré anglais sur youtube lien ci-dessous ne traînez pas !

2 commentaires:

  1. Bonjour, merci pour la chronique, auriez-vous quelques infos sur la disponibilité de cette zone 2 en DVD? L'édition semble difficilement trouvable...

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    1. Bonjour, ou malheureusement l'édition semble épuisée et pas de chance youtube a désactivé la vidéo que j'avais partagé où l'on pouvais voir le film en entier. Envoyez moi un mail et j'aurai peut-être une solution pour vous aider :-)

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