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dimanche 20 juillet 2025

Le Terroriste - Il terrorista, Gianfranco De Bosio (1963)

 Venise, hiver 1943. La Résistance italienne prépare une attaque contre le siège de la Kommandantur. Un homme, surnommé l'Ingénieur, joue un rôle central dans ce plan.

Le Terroriste est une œuvre méconnue nous immergeant au cœur de la Résistance italienne durant la Seconde Guerre Mondiale. Un peu à la manière donc cela se passera en France jusqu’à la sortie de L’Armée des Ombres de Jean-Pierre Melville (1969), ce pan de l’histoire italienne se nourrira souvent d’un ton héroïque et picaresque avec des comédies comme La Grande pagaille de Luigi Comencini (1960). Le Terroriste se montre moins didactique que ces œuvres quant au contexte du récit, soit une Italie au lendemain de l’effondrement du régime de Mussolini, déchirée entre les directives de l’occupant allemand téléguidant les milices fascistes, et une résistance portée par l’armistice du 8 septembre 1943 avec les Alliés.

Cette absence de contextualisation vise à nous plonger dans des questionnements plus complexes, par lesquels la notion de bien passe par des dilemmes moraux insolubles. D’un côté, nous avons l’Ingénieur (Gian Maria Volonté), sorte d’électron libre de la résistance organisant avec froideur et méthode des attentats déstabilisant l’occupant allemand. De l’autre, il y a les pontes des différents groupuscules formant difficilement l’entité unie de la résistance. Ceux-ci s’interrogent quant aux méthodes de l’Ingénieur et surtout ses conséquences, les arrestations arbitraires et exécutions suivant généralement les exploits de l’Ingénieur et mettant en danger des innocents. 

Gianfranco De Bosio, bien que ses opinions penchant pour l’Ingénieur, expose méthodiquement toutes les opinions pour aboutir à un résultat passionnant. Les oppositions entre les chefs racontent presque une histoire de l’Italie du début du 20e siècle, entre la méfiance de certains envers le passé communiste d’autres, l’immobilisme des intellectuels mais aussi le vrai recul dont ils font preuve face à l’action aveugle de certains ravivant la flamme de leur militantisme initial envers le régime de Mussolini. A cela s’ajoute la vraie crise morale de certains, tel Rodolfo (Philippe Leroy), partie prenante de l’attentat ouvrant le film mais préférant se mettre en retrait par la suite.

La narration est particulièrement austère et aride, participant à un climat anxiogène dont le seul pivot semble être la présence imperturbable de l’Ingénieur impeccablement interprété par Gian Maria Volonté. Visage minéral, le verbe court et toujours un coup d’avance, il semble glisser sur les innombrables dangers qui guettent ses acolytes. Gianfranco De Bosio entrecoupe ce qui parait presque un espace mental de saisissants morceaux de bravoures rappelant la réalité de la menace pour la Résistance. 

A la mise en place et à la lente montée de tension du premier attentat répond la dimension plus chaotique du second, la séquence finale travaillant ces deux approches avec un plan « parfait » qui déraille sans prévenir. La ville de Venise constitue est cadre très original pour ce type de récit, par le dédale de ses rues formant une échappatoire ou un piège pour les poursuivis, tout l’élément fluvial permettant la fuite, le camouflage ou au contraire l’exposition vulnérable à ses poursuivants. 

Cette rigueur passionnante sait cependant s'estomper le temps d'une magnifique scène intimiste entre l'Ingénieur et sa compagne (belle apparition de Anouk Aimée), donnant un humanité plus consistante au personnage et surtout en élevant, entre humanisme et détermination politique, le sens de ses actions radicales. La filmographie assez courte de Gianfranco De Bosio semble avoir placé le film dans l’ombre pendant longtemps, mais la finesse avec laquelle il aborde ce moment charnière mérite de lui faire retrouver cette reconnaissance tardive pour les cinéphiles. 

Sorti en bluray français chez Rimini 

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