À travers l'histoire
de deux personnages, la célébrité est abordée sous toutes ses formes, depuis la
renommée nationale jusqu'à l'admiration locale d'un cercle restreint. Cette
comédie est un regard amusé sur ce que les gens sont prêts à faire pour devenir
célèbres ou le rester.
L’âge avançant, Woody Allen délègue son personnage dépressif
et facétieux à d’autres acteurs. John Cusack ouvre le bal avec Coups de feu sur Broadway (1994) tandis
que Kenneth Branagh lui emboîte le pas avec ce Celebrity (Jason Biggs suivra dans Anything else (2003)). Kenneth Branagh est notre guide dans cet
Allen atypique en incarnant Lee Simon, journaliste mondain aux amours et ambitions
artistiques contrariées. Woody Allen tisse une fable où se dessine en parallèle
le destin de Lee et de son ex épouse Robin (Judy Davis). Le premier a préféré
quitter leur vie de couple terne pour courir les célébrités tandis que la
seconde se remet difficilement de cette rupture.
Leur évolution sert de fil rouge à une suite de portraits
mordants où Allen se moque des affres de la renommée, du narcissisme qu’elle
suscite pour ceux qui en vivent et d’autres qui en rêve. La photo noir et blanc
de Sven Nykvist donne à l’ensemble un contour glamour qui jure avec les
comportements pathétiques et détestables observés. La persona publique des
stars vole en éclat à l’abri des regards (magnifique séquence où le discours
chaste et humble de Melanie Griffith s’oppose à la séduction agressive de Lee),
la promiscuité qu’elles nous laissent entrevoir s’estompe dès que cette fameuse
image est menacée (le mannequin joué par Charlize Theron laissant Lee en plan
suite à un accident de voiture synonyme de mauvaise publicité).
Les identités
se noient dans la course à la notoriété telle ce moment tordant où les
participants hétéroclites (membres du Ku Klux Klan, néo-nazi, rabbin, évangéliste
noir) d’un talk-show racoleur partagent
une surprenante camaraderie, habitués qu’ils sont à se retrouver sur les
plateaux tv. Le vide de la pensée est un prérequis nécessaire où ne demeure que
l’attitude destructrice (savoureux Leonardo Di Caprio en caricature du minet qu’il
était aux yeux du grand public à l’époque) chez les nantis, et une absence d’attache
impitoyable avec le personnage de Wynona Ryder.
Les aspirations de Lee ne s’inscrivent que dans cet égo plutôt
qu’une vraie volonté artistique, et ses discours creux ainsi que ses nombreuses
mésaventures en sont le reflet. A l’inverse ce monde vient à Robin plutôt que l’inverse
et ses hésitations constantes face à cette lumière rendent le personnage bien
plus touchant - et le propos du film moins binaire avec cette intellectuelle désintéressée s'épanouissant dans ce clinquant, où elle peut enfin lâcher prise. Son nouveau compagnon Tony (Joe Mantegna) en mettant sa notoriété
plus racoleuse au service du bien-être de sa nombreuse famille donne ainsi un
pendant plus altruiste et moins égocentrique de la réussite. Le film amuse et
séduit par ce mélange de satire et de vraie mélancolie, notamment la belle
conclusion sur un Kenneth Branagh (excellent bien que singeant un peu trop le
phrasé de Woody Allen) plus perdu que jamais. Sans en égaler la profondeur,
Allen creuse avec brio le sillon de son Stardust Memories (1980).
Sorti en dvd zone 2 français chez TF1 Vidéo
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