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dimanche 30 août 2020

Frances - Graeme Clifford (1982)

Hollywood, les années 30. La vedette Frances Farmer scandalise par son anti-conformisme. Comédienne de talent, elle connaît la gloire. Hollywood va s'acharner à briser la carrière de l'actrice en l'enfermant dans des rôles de second plan.

Frances est le biopic de Frances Farmer, actrice hollywoodienne montante des années 30 qui vit son destin brisé par le système à cause son anticonformisme. Le film suit très fidèlement et chronologiquement l'existence de France Farmer, malgré une narration très elliptique (on passe de l'adolescence à la starlette hollywoodienne et jeune mariée en 30 mn). Le fil rouge du récit est cependant bien visible, il s'agit de confronter la personnalité de Frances Farmer (Jessica Lange) à un interlocuteur, un environnement et tout simplement une époque qui se refuse à laisser une telle indépendance de pensée à une femme. Frances ne cherche jamais à ouvertement provoquer, mais chacune de ses initiatives va choquer son entourage et progressivement la mettre à la marge. Ainsi elle gagne adolescente un prix littéraire pour un texte où elle évoque la mort et l'indifférence de Dieu. Ce coup d'éclat attire déjà la lumière des médias et jettent un opprobre prématurée sur elle. Jeune actrice de théâtre elle accepte la récompense d'un concours d'interprétation qui consiste en un voyage à Moscou, ce qui la fait qualifier de communiste.

Le problème de Frances est que son charisme et sa beauté amènent les autres à projeter en elle une image, un rôle et un idéal que son caractère impétueux refuse d'endosser. Cela est manifeste lorsqu'elle intègre la Paramount des années 30 et par conséquent le très directif système studio d'alors. Joli bibelot que les studios pensent modeler à leur guise, Frances s'émancipe de la cage dorée que l'on veut lui forger. Néanmoins le jeu subtil de Jessica Lange laisse entrevoir la dimension presque maladive de l'insoumission de Frances. On le sait, pour peu que l'on joue un minimum du jeu médiatique et commercial des studios, après quelques succès au box-office des actrices comme Bette Davis ou Joan Crawford acquirent un pouvoir de décision immense sur leur carrière. Frances est incapable de cette compromission et va en payer le prix. Elle met sa confiance et son âme entre les mains du dramaturge Clifford Odet pour la création théâtrale Golden Boy, mais sous les grands discours l'artiste pragmatique la laissera tomber pour une vedette plus à même de permettre le financement de sa pièce.

Ce modèle auquel on essaie de la plier concerne autant les personnalités bienveillantes pour elle comme Harry (Sam Shepard) qui souhaite l'épouser, les tabloïds pour lesquels elle est la lucrative "folle d'Hollywood", que pour les psychiatres castrateurs devant lesquels elle doit montrer patte blanche. Mais quoiqu'il en coûte Frances refusera, car cette enfermement à une origine plus profonde. Sa mère (Kim Stanley) fut la première à fantasmer en Frances toute l'ambition et le destin extraordinaire dont elle rêvait pour elle-même. Cette mère abusive encourage les excès de Frances tant qu'ils attirent la lumière (cette première de film dans leur ville de Seattle où la mère parade et savoure le glamour plus que sa fille), mais dès que celle-ci recherchera l'anonymat, elle préfèrera l'interner plutôt que de la laisser devenir une nobody.

La dernière partie du film prend ainsi un tour totalement cauchemardesque où se multiplient les allers-retours en hôpitaux psychiatrique. L'esthétique oscille entre esthétique clinique pour traduire l'inhumanité de ces établissements et leurs méthodes sordides, et un aspect halluciné de cours des miracles quasi moyenâgeuse. Les pires séquences s'avèrent malheureusement avérées (Frances violée par le personnel hospitalier avide de "se faire" une star) et bénéficient de l'interprétation incandescente d'une Jessica Lange habitée. Elle émeut dans le registre écorché tout comme dans celui, éteint et brisé par les épreuves de la séquence finale. L'actrice réussira d'ailleurs l'exploit cette année-là d'être nommée deux fois à l'Oscar, celui de la meilleure actrice pour Frances et du meilleur second rôle pour Tootsie de Sydney Pollack - c'est ce dernier qui lui vaudra la récompense suprême. Un magnifique biopic portée par une prestation puissante pour un portrait de femme touchant.

Sorti en dvd zone 2 français chez Studiocanal

 

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