Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

Pages

lundi 3 mai 2021

Swimming with Sharks - George Huang (1994)


 Immersion dans le milieu de la production à Hollywood à travers les mésaventures d'un assistant auprès d'un grand patron du cinéma.

Swimming with sharks est une production indépendante qui fit sensation à sa sortie par sa description au vitriol du fonctionnement d’un studio hollywoodien. On doit le scénario et la réalisation à George Huang qui sait de quoi il parle puisqu’il officia en tant qu’assistant auprès de Barry Josephson, vice-président au sein du studio Sony.  Aspirant à une carrière de réalisateur, il se lie d’amitié avec un jeune Robert Rodriguez dont le fauché et inventif El Mariachi vient d’être acheté par Sony. Rodriguez va donner confiance à Huang pour qu’il se lance à son tour et le premier projet de ce dernier sera donc Swimming with sharks, satire cinglante inspiré de son vécu auprès des exécutifs de studio. 

On suit donc les premiers pas de Guy (Frank Whaley) auprès de Buddy Ackerman (Kevin Spacey), producteur aux dents longues et véritable tyran avec ses collaborateurs. L’inspiration de Buddy oscille entre Joel Silver (Buddy producteur de films d’actions décérébré et au attitudes macho) et Scott Rudin, producteur mis en lumière récemment mais déjà connu à l’époque pour ses comportements odieux envers ses subalternes. Le film est donc une vraie photographie des coulisses hollywoodiennes de l’époque donc certains éléments fonctionnels ont vieilli par rapport à la logique actuelle et c’est donc avant tout à travers les portraits individuels que le propos est supposé faire mouche. Une des premières scènes dénonce autant l’ignorance rasse que l’ambition dénué d’un quelconque amour de l’art chez les jeunes cadres de studio quand en racontant une anecdote sur Shelley Winters, Guy se rend compte que ses interlocuteurs ne connaissent pas l’actrice. L’histoire du cinéma s’arrête au dernier succès du box-office, justement seule quête de Buddy qui même lorsqu’il s’attèle à un projet plus noble ne le fait que par calcul personnel et marketing. 

George Huang dépeint avec férocité les processus d’humiliations et de maltraitance qui contribue à l’assujettissement de l’employé. Demandes absurdes devant à tout prix être exécutées, omniprésence qui ôte toute vie et pensées autre que le boulot à l’employé, insultes et rabaissement permanent, tout y passe. Kevin Spacey en forme olympique en fait des tonnes dans la cruauté à froid et l’espoir de lendemains meilleurs est la meilleure arme pour maintenir cette emprise, Guy attendant le retour d’ascenseur en aidant son patron à grimper les échelons ou alors d’être remarqué par un ponte. Le problème de Swimming with sharks est de trop peu faire intervenir le cinéma dans son fond et sa forme.

Pour le fond, hormis le name-dropping de rigueur (et là aussi daté) rien ne différencie le film dans le ton d’autres récits grinçants sur les patrons abusifs, que ce soit Wall Street d’Oliver Stone (1987) qui a précédé ou Le Diable s’habille en Prada (2006) qui suivra. On n’a pas ce sentiment de s’immiscer dans un processus créatif, même superficiel, mais plutôt d’assister à des jeux de pouvoirs bureaucratiques (s’approprier l’idée d’un subalterne notamment) comme il en existe dans toutes les grandes corporations capitalistes. Bref ce n’est pas Les Ensorcelés de Vincente Minnelli (1952) et même pas le contemporain The Player de Robert Altman (1992).

Autre point fâcheux la forme télévisuelle et d’une platitude rare. Hormis quelques habiles transitions de montage qui servent une construction en flashback assez superficielle, ce sera du champ contre champs et des cadrages basiques où la dimension dominant/dominé ne se joue que par le dialogue et jamais par l’image. Frank Whaley est relativement crédible en assistant tyrannisé et dépassé, mais risible quand il endosse à son tour les atours du mogul carnassier. Sans charisme et sans cette part d’ombre qui salirait un peu ses traits candides et juvéniles, il ne convainc jamais réellement, notamment dans le dilemme de sa romance avec Dawn (Michelle Forbes). Malgré les bonnes critiques à la sortie, George Huang ne se signalera pas particulièrement pour ses travaux suivants et tombera dans l’oubli. 

Sorti en dvd zone 2 français chez Aventi

1 commentaire: