En Italie, Enrico, un journaliste, après avoir appris le décès de son frère, se souvient de leur enfance… Après le décès de leurs parents, les deux garçons se retrouvent séparés : Lorenzo, le cadet, adopté par un majordome aisé, aura une enfance heureuse tandis qu’Enrico, livré à lui-même, passera une adolescence misérable. Plus tard, on découvre que Lorenzo est atteint d’un mal incurable...
Dans la filmographie de Valerio Zurlini, Été violent (1959), La Fille à la valise (1961) et Journal intime (1962) forment un triptyque dépeignant le lien affectif complexe et contrarié de deux personnages dans un contexte historique et/ou social difficile. Dans Été violent (1959) et La Fille à la valise, une certaine veine romanesque dominait en relatant des romances alors que Journal intime va nous relater une déchirante relation fraternelle. Prématurément orphelins, Enrico (Marcelo Mastroianni) alors âgé de huit ans et Lorenzo (Jacques Perrin) encore nourrisson sont séparés lorsqu'un bienfaiteur nanti prend en charge le cadet tandis qu'Enrico sera livré à lui-même. La route des deux frères ne se recroisera qu'à l'âge adulte et montrera le fossé né entre eux de cette longue séparation, mais aussi les éléments de rapprochement possibles. Ils sont tout d'abord dans l'évitement lors de leurs premières retrouvailles, Enrico dissimulant sa présence en retrouvant inopinément Lorenzo quand ce dernier feint de ne pas le voir avant de révéler qu'il l'a reconnu. On comprend que chacun connaissait l'existence et l'apparence de l'autre malgré la rupture précoce et sans doute cela les a mutuellement rongé tout au long de leur enfance.Cela se manifeste à travers leurs caractères antinomiques témoignant de ce passif. Enrico après une enfance misérable végète en tant que journaliste et refuse d'étouffer dans un métier laborieux qu'il n'a pas choisi, refusant leur déterminisme social auquel il est assigné. Lorenzo est au contraire un jeune homme oisif et insouciant, indifférent à ses études et à sa future carrière. Zurlini montre ce lien fraternel se renouer par les souvenirs enfouis ou inconnus pour chacun de leur famille. Une des plus belles scènes voit Lorenzo s'endormir paisiblement à la description que lui fait Enrico de leur mère qu'il n'a vu quand photo. On sent les traits de Lorenzo s'apaiser et le faire redevenir un garçonnet en quête d'affection maternelle, et plus globalement de racines. Cette fibre familiale qui les unit s'incarne dans le beau personnage de la grand-mère (Sylvie) dont les dernières forces ne subsistent que par ce bonheur de voir ses petits-enfants unis. Au premier abord le contexte social semble moins prononcé que dans les films précédents mais participent en fait pleinement à la caractérisation des personnages. L'arrière-plan de misère ambiante, de la montée du fascisme et de la guerre est un fil rouge sans qu'il intervienne directement sur l'intrigue. Enrico ayant appris tôt à survivre navigue entre les différents aléas socio-économiques de cette période quand Lorenzo s'en montre incapable. Son enfance confortable joue contre lui puisqu'il n'aura jamais la détermination, la volonté et même l'endurance physique d'accepter une existence plus rude lorsque son tuteur initial n'aura plus les moyens de l'entretenir. C'est un éternel homme-enfant s'accrochant à ce frère aîné peu à peu agacé par cette passivité.C'est nettement plus introspectif que les autres célèbres adaptations du romancier Vasco Pratolini de cette période (Chronique des pauvres amants de Carlo Lizzani (1954), Rocco et ses frères de Luchino Visconti (1960), La Viaccia de Mauro Bolognini (1961)) où la condition sociale et la destinée intervient plus rudement dans l'existence des personnages. Ici le film s'ouvre directement sur l'annonce de la mort de Lorenzo, et les flashbacks porté par la voix-off mélancolique de Enrico nous le font apparaître, par sa présence chétive et son teint blafard comme déjà condamné. Son incapacité à s'établir dans quoi que ce soit anticipe une existence en sursis qui n'aura pas le temps de laisser de trace. Jacques Perrin souvent symbole d'une jeunesse meurtrie dans le cinéma italien de l'époque (La Fille à la valise et l'année suivante La Corruption de Mauro Bolognini) est particulièrement touchant d'impuissance mentale comme physique tout au long du récit, magnifiquement soutenu par un Mastroianni compatissant.Zurlini installe une atmosphère automnale déprimante où plane ce spectre de la mort, par la photo de Giuseppe Rotunno et le choix d'environnements plus sinistres les uns que les autres (l'hospice où croupit la grand-mère, la pension misérable où vit Enrico, le luxe passé et décrépit du tuteur de Lorenzo et bien sûr l'hôpital). Ce n'est que lorsque tout semble perdu, que l'inéluctable fin se dessine que les deux frères surmontent leurs différences. Lorenzo affiche enfin une rage de survivre alors que son corps meurtri ne le lui permet plus Enrico devient trop tard le soutien indéfectible qu'il aurait dû être. Un très beau film mais sûrement aussi l'un des plus déprimants de la filmographie de Zurlini qui ne manque pourtant pas de récits tragiques.
Sorti en dvd italien
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