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jeudi 1 juin 2023

Des blondes pour Hollywood, Marilyn et ses doubles - Adrien Gombeaud


 Le 5 août 1962, Marilyn Monroe disparaît dans des circonstances tragiques, entre surdose médicamenteuse ou suicide. Cette mort prématurée lui fait paradoxalement gagner l’immortalité et ne conserver d’elle que le souvenir iconique de ce fantasme de blonde glamour à la beauté surnaturelle, ces « arguments » physiques étant transcendés par une persona filmique bien plus profonde, sensible et vulnérable. Marilyn Monroe emporte aussi avec elle un standard dépassé de l’idéal de beauté féminine rattaché au Hollywood des années 50 dont les préceptes esthétiques et moraux vont voler en éclat dans les diverses révolutions des sixties. Marilyn accède à l’éternité et laisse le douloureux déclin aux nombreux avatars d’elle que les studios n’auront eut cesse de façonner sans égaler l’original. C’est au portrait de quelques-unes des plus fameuses d’entre elles que s’attèle le passionnant ouvrage d’Adrien Gombeaud.

Marilyn Monroe se distingue par son talent, son aura et la création (inspiré de son idole et star Hollywoodienne des années 30, Jean Harlow) d’une figure cinématographique qui lui est propre, mais partage bien des points intimes avec ses doubles donc elle courut les mêmes castings (Quand la ville dort de John Huston particulièrement) avant la gloire. Une enfance difficile, un milieu modeste, le rêve de gloire Hollywoodienne comme échappatoire, les photos de charme dénudées pour joindre les deux bouts, les amants peu recommandables, tous ces éléments forment une sorte de boucle répétitives tout au long des dix portraits explorés par le livre. Cette apparente uniformité n’est pas là pour rendre ces femmes interchangeables, mais pour démontrer les carcans communs auxquels elles étaient soumises dans cette société américaine des années 40/50. Adrien Gombeaud démarre ainsi chaque chapitre dans un style « gossip » et mordant de feuille de chou à scandale, avant de dévoiler les femmes derrières les blondes.

L’écriture s’adapte à la personnalité de chacune des « stars », compatissante pour une Mamie Van Doren vivant dans la nostalgie de sa gloire éphémère sur les réseaux sociaux, cruellement ironique pour la française Corinne Calvet condamnée à porté dans des série B de seconde zone les anciennes tenues de Marilyn, mordant sur la destinée de la pétillante Liz Renay dont l’ascension est freinée par ses liaisons dangereuses avec la mafia. Certaines de ces actrices, étouffées dans cet emploi de « blonde » et auxquelles on refuse de se réinventer ne survivent à Marilyn que de quelques années comme Joi Lansing ou Diana Dors quand d’autres assument cette parenté indélébile et la pousse dans ses derniers retranchements camp et outranciers telle la sculpturale Jayne Mansfield, sans doute le « double » le plus célèbre. La nature impitoyable du système hollywoodien qui absorbe, transforme, consomme et recrache ses stars après usage est cruellement dépeinte et glace dans la sordide déchéance de certaines comme Barbara Payton finissant prostituée à 40 dollars la passe dans des motels insalubres.

Adrien Gombeaud porte le regard sur un passé lointain, mais aussi plus proche de nous avec la pin-up siliconée de Playboy Anna-Nicole Smith. On retrouve tous le passif intime provincial et sinistre des doubles des années 50, mais où avec le temps Marilyn Monroe n’est plus la rivale après laquelle on court, mais le modèle auquel on aspire. Cependant le rêve hollywoodien s’est estompé pour la seule quête de célébrité, la volonté d’être vue, les coups d’éclats médiatiques (son fameux mariage avec un milliardaire octogénaire) supplante l’immortalité de l’écran de cinéma et l’accomplissement artistique. Les couvertures et photos vulgaires dévoient l'élégance sexy des images d'antan mais en exposent crûment les objectifs sans filtre glamour. Les clones ratés des années 50 n’étaient pas parvenues au firmament hollywoodien puis ne correspondaient plus à ses standard, Anna-Nicole Smith annonce au contraire les stars 2.0 de la téléréalité et des réseaux sociaux. 

Un ouvrage captivant de bout en bout, riche de formules bien senties ("Devant qui d'autres que Jayne Mansfield Elizabeth II a-t-elle baissé le regard ?" pour évoquer l'attrait de la souveraine elle-même pour la poitrine démesurée de l'actrice) et d’anecdotes, qui donne même envie (belle bibliographie en fin d’ouvrage dévoilant toutes les sources) d’approfondir la question pour certains des portraits les plus hauts en couleurs comme Jayne Mansfield ou Barbara Payton dont il existe une autobiographie traduite en français. 

Publié aux éditions Capricci

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