A Malaria, pays plongé dans la pluie et l'obscurité, les Inventions Maléfiques assurent la prospérité, sous le règne autoritaire du roi Malbert. Les inventeurs de ces Créations Maléfiques sont les Savants Fous, classe dominante du pays. Ils sont aidés de leurs assistants, les Igors, de malheureux bossus dont le destin est d'obéir. Notre Igor, un Igor pas tout à fait comme les autres, poursuit un rêve : devenir lui-même un grand Savant Fou.
Belle réussite que ce Igor qui fit espérer à sa sortie une concurrence viable à Pixar dans l’animation américaine, ce qui s’est confirmé depuis. L’univers est des plus originaux, puisqu’il propose un monde où il fait bon exploiter ses mauvais penchants, avec comme stars incontestés les savants fous, qui se lancent chaque année dans un concours destiné à récompenser l’invention la plus maléfique. Dans ce contexte, l'attention se penche sur un personnage souvent laissé pour compte dans ce type d'histoires : l'assistant bossu du savant fou, le Igor, ici héros du film souhaitant lui aussi devenir un jour un savant fou malfaisant.
L’inspiration visuelle est bien sur issue des productions d’épouvante Universal des années 30, peuplé d’alcôve sombres et inquiétantes, de demeures gothiques imposantes portées par un jeu d’ombres directement issu de l’expressionnisme allemand... On pourra juste reprocher que, malgré le luxe de détails, Malaria soit un peu trop statique et pas assez foisonnante. Le film trouve l’équilibre juste entre l’influence horrifique et un côté plus ludique, grand public et décalé. Cet équilibre se traduit notamment par l’alternance entre le score chargé flamboyant de Patrick Doyle (qui a pu se frotter au genre dans le Frankenstein de Branagh), sur les passages les plus inquiétants où l'on explore le monde de Malaria, et les tubes de Louis Prima lors des moments plus légers, notamment les expérimentations ratées de Igor, ou les caprices de stars de Violette.
On appréciera d’ailleurs cette fidélité, sur un mode accessible, plutôt qu’une bête parodie à la Shrek, Igor respectant les plus grand poncifs du roman gothique (village maudit, jeune fille innocente, serviteur martyrisé), tout en y apportant une touche rigolarde bienvenue, comme cet homme invisible aimant à se balader sans pantalon. D’ailleurs le film se nourrit également de productions plus délirantes, notamment le Frankenstein jr de Mel Brooks (avec les différentes incarnations sexy de l’assistante du méchant, surtout celle d’Heidi, rappelant le rôle de Teri Garr), ou encore la première apparition du méchant au piano orné de lunettes clinquantes, tout droit sorti de Phantom of The Paradise.
Le design des personnages est dans ce même esprit, entre respect des archétypes du genre, tonalité grand public et humoristique. Conçu au sein du studio Sparx, ancien prestataire du studio Disney (et qui sait donc y faire en matière de personnages marquants), Igor respecte le physique disgracieux de ses congénères, tandis que ses grands yeux et son allure pataude nous le rendent immédiatement attachant. Sa création Violette allie le physique impressionnant et le corps rapiécé de la créature de Frankenstein, avec une grâce toute féminine et pleine d’innocence, et les deux acolytes d’Igor s’avèrent être des créations fort amusantes, en particulier Rapidos le lapin suicidaire (avec son lot de tentatives bien macabres), génialement doublé par Steve Buscemi.
Pas d’une originalité folle, le message du film, prônant l’affirmation de soi et de sa nature profonde au détriment de la masse, fonctionne plutôt bien. Tim Burton n’est pas loin au niveau de la thématique, le récit prenant le parti des freaks, rebelles au statut qu’on veut bien leurs assigner et qui se découvrent au fil de l’aventure. Ainsi, Igor, malgré sa volonté de reconnaissance en tant que savant maléfique, finira par créer accidentellement une créature à son image, attachante et inoffensive.
Une bien belle idée également que de faire de cette Violette une créature coquette et attirée par le strass, en opposition à sa nature monstrueuse. Un duo complémentaire qui forme beau couple de l’animation dans la lignée des robots Wall-E et Eve de chez Pixar. D’ailleurs Violette se nomme également Eve dans la vo, avec à nouveau un personnage féminin à la découverte du monde et de ses sentiments, une récurrence qui n’est certainement pas due au hasard.
Sorti en dvd chez TF1 Vidéo
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