À la suite d'une course de voitures
improvisée, un véhicule transportant trois jeunes femmes tombe d'un pont
et s'enfonce dans une rivière. Unique rescapée, Mary, une organiste
professionnelle, part ensuite s'installer à Salt Lake City où son
nouveau travail l'attend, mais des évènements étranges surviennent
bientôt ...
Un film fantastique culte en puissance et
longtemps invisible jusqu'à sa redécouverte en 1989 qui rattrapa une
injuste première sortie anonyme en son temps. C'est la seule œuvre de
fiction et le premier long-métrage de Herk Harvey qui travaillait alors
au sein de la Centron Corporation, compagnie de production de films
éducatifs et institutionnels installée à la ville de Lawrence. Herk
Harvey y fit pratiquement toute sa carrière, signant une centaines de
courts-métrages institutionnels, éducatifs, documentaires ou
gouvernementaux pour lesquels il recevra de nombreuses récompenses dont
une nomination à l'Oscar du meilleur court-métrage documentaire pour son
film
Leo Beurman où il montre
la réussite d'un homme handicapé.
Ce travail l'amène à voyager
fréquemment à travers le monde et les Etats-Unis et c'est au détour d'un
de ses périples que lui viendra l'idée de
Carnival of Soul
lorsqu'en rentrant de Los Angeles il tombera sur le fabuleux décor du
parc de loisirs Saltair, près de Salt Lake City. Ayant eu la vision de
morts dansant dans l'imposante salle de bal bordant le Grand Lac Salé,
Harvey rédige un script à partir de ce postulat et rassemble 30 000
dollars auprès d'investisseurs locaux grâce auxquels il pourra tourner
le film en trois semaine.
Le récit narre la lente descente aux enfers de Mary (Candace Hilligoss)
qui suite à une course en voiture improvisée, réchappe miraculeusement
au contraire de ses compagnes à la chute de sa voiture dans les eaux
d'une rivière. Dès lors, entre réalité altérée et apparitions spectrale,
sa raison va lentement vaciller. Le script amène habilement ce
basculement avec le caractère singulier du personnage de Mary. C'est une
femme froide et détachée de tout dont le caractère solitaire se voit
accentué par son accident. Organiste professionnelle en église, elle
n'est guère stimulée ni intéressée par l'environnement spirituel de son
métier et affiche la même distance en dehors en fuyant les avances
masculines et limitant au strict nécessaire toute relation sociale.
Ce point de vue focalisé sur un personnage aussi intériorisé donne donc
un tour d'autant plus fort lorsque la réalité se disloque, faisant
constamment hésiter en l'hypothèse de la folie d'une Mary traumatisée
par l'expérience ou alors une vraie manifestation surnaturelle. La mise
en scène de Herk Harvey joue habilement de ces deux approches notamment
lors de la première irruption du fantastique lorsque Mary roule seule
sur une route déserte en campagne. La caméra s'attarde en montage
alterné sur le visage progressivement perturbé de Mary, la bande-son est
soudain inondée d'une partition d'orgue glaçante, la figure d'un homme
inquiétant (joué par Herk Harvey lui-même !) surgit soudain et surtout
le fameux décor du parc de loisir abandonnée apparait en ombre menaçante
et supposée déclencheur des évènements étranges.
Tout le film fonctionnera sur cet entre-deux, de façon de plus en plus
prononcée et dans des séquences virtuoses tel cette stupéfiantes
séquences où jouant dans l'orgue dans l'église Mary regard halluciné
s'adonne à un concerto torturé tandis que les visions de cauchemars
affluent avec cadavres plongés dans l'eau, ombres terrifiantes et
toujours cet homme au visage blafard qui la harcèle. Mary perd de sa
tranquille assurance et devient de plus en plus fébrile, permettant
ainsi au film de plonger pour de bon dans l'étrange avec ces scènes où
l'héroïne devient invisible à ses interlocuteurs. Son traumatisme
refoulé aura-t-il réveillé ses propres frustrations (la relation avorté
avec le trop entreprenant voisin de pension) où ces fantômes bien réels
viennent ils la happer de l'autre côté ?
La question reste entière grâce à la magnifique prestation de Candace
Hilligoss (quel dommage que l'on ne l'ait quasiment plus revue par la
suite) qui fait tout passer, la froideur, l'angoisse et la folie et où
son allure élégante est progressivement effritée. Tout se résoudra dans
une extraordinaire conclusion où le monde des ténèbres prendra
définitivement le pas et le décor du parc dévoilera tout son potentiel
de terreur, superbement mis en valeur par Harvey.
Avec son réel
contaminé peu à peu par l'étrange, Harvey fait vraiment la bascule entre
son expérience documentaire (toute la scène de repêchage avec les
quidams observant la police reste dans ce ton) et le cinéma. Entre
La Quatrième Dimension et une sorte de
Répulsion
sans le côté claustrophobe, un vrai classique de l'épouvante dont le
twist final saura inspirer bien plus tard un Shyamalan ou un Amenabar.
Sorti en dvd zone 2 français chez Wild Side et en zone 1 dans une très belle édition Criterion truffé de bonus dont le director's cut
Question : quel montage propose l'édition DVD de chez Wild Side ?
RépondreSupprimerJe sais que c'est la version courte (1h14) pour l'édition DVD de chez Le Chat Qui Fume.
Je ne saurai dire car j'ai l'édition Critérion mais peut être qu'un possesseur de la Wild Side va venir nous éclairer ;-)
SupprimerIl y a un seul montage. La version d'origine. Celle du Chat et de Wild Side. Le film est libre de droits et Criterion proposa au réalisateur de faire une version plus longue et donc protégée celle çi. Mais en fait il a juste rallongé certaines scènes de quelques images. Pas de scènes en plus. Juste quelques longueurs en plus ...
RépondreSupprimerCe qui est bizarre c'est que Criterion a demandé la même chose pour Terry Gilliam et 'Las Vegas Parano' (1998) : le film est rallongé de quelques 2 minutes (comme la scène avec Raoul Duke (Johnny Depp) et le singe en costard vue dans la bande annonce) et ce montage rallongé se retrouve dans la nouvelle édition DVD et l'édition blu-ray en France chez TF1 Vidéo.
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