Le jeune Tolly Devlin voit son père se
faire tabasser à mort par les membres d'un gang de délinquants, à l'âge
de quatorze ans. Devenu adulte, il prépare sa vengeance envers les
assassins de son père, désormais au sommet de la pègre new-yorkaise...
Fuller signe un polar majeur et novateur avec ce Underworld U.S.A.
L'ère du film noir classique est bien terminée et en ce début des 60's
divers oeuvres feront évoluer le genre policier comme par exemple Les Tueurs
de Don Siegel faisant la bascule vers le polar urbain. En grand
portraitiste de l'Amérique qu'il est, Fuller capture un contexte qui ne
sera effectif que quelques années plus tard au cinéma avec un film comme Le Parrain
(1972).
C'est le moment où le crime organisé devient une froide machine
capitaliste fonctionnant comme une entreprise et où le profit se fait
sans états d'âmes à travers les secteurs les plus rentable que sont la
corruption, la prostitution et le trafic de drogue. Pour les
contrecarrer, la justice s'organise aussi en une entité plus vaste que
la seule police et remontant jusqu'au hautes sphères judiciaire. Le
scénario de Fuller illustre tout ces enjeux par une lente digression où
partant de la quête de vengeance du jeune Tolly Devlin (Cliff
Robertson), on découvrira les arcanes de cette véritable guerre entre le
syndicat du crime et la justice.
Le scénario linéaire avance
donc au fil des découvertes et des manigances de Tolly, progressant à la
fois dans l'organigramme de la mafia et gagnant la confiance de la
police pour mieux accomplir sa vengeance. La brutale scène d'ouverture
où le père du héros est tabassé et tué donne le ton, le parcours
criminel en ellipse de Tolly, le visage juvénile mais déjà marqué par le
mal de David Kent passant aux traits plein de malice vicieuse de Cliff
Robertson lorsqu'on le retrouve à l'âge adulte.
Tolly est une sorte
d'électron libre entre la justice et le crime, impitoyable et
individualiste. La relation avec la mère de substitution Sandy (Beatrice
Kay) et surtout la belle Cuddles (Dolores Dorn) qu'il a sauvée par
intérêt vont progressivement l'humaniser, en faisant dans le récit un
représentant du peuple dans son désir final d'une vie normale et rangée.
Même si jamais dit explicitement, le passé de prostituée de Cuddles en
fera une autre abîmée de la vie apte à adoucir la dureté de Tolly.
Face
à ces personnages torturés, le monde la mafia s'avère implacable et
déterminé. Même si un peu simpliste par rapport à d'autres films qui
développeront de manières plus fouillées ces aspect (comme Les Affranchis
(1990) de Scorsese), tout est déjà là avec la glaçante réunion digne
d'un conseil d'administration où chacun des responsables de secteur
(prostitution, drogue et syndicat) viennent rendre des comptes aux PDG
validant ou pas la progression des chiffres.
Lorsque ces
discussions prennent un tour plus concret, Fuller l'exprime par une
violence sèche ou personne n'est épargné, femme, enfant ou traître
supposé. Le réalisateur rend ces écarts d'autant plus frappant par un
montage qui s'arrête toujours net avant l'explosion pour nous montrer
cruellement l'accomplissement de l'action (le corps désarticulé de la
fillette après avoir été renversée) ou conclure la scène par un humour
noir inattendu (le truand demandant du feu pour sa cigarette après avoir
fait flamber un quidam dans sa voiture).
Dans ce contexte tous
les coup fourrés de Tolly emportent l'adhésion, faisant tomber une à une
les pièce de l'organisation à force de mensonges et presque sans
violence directE. Presque si ce n'est cette saisissante séquence où il se
révèle à une de ses cibles en la cognant sévèrement mais en laissant à
un autre (Richard Rust remarquable en homme de main) le soin de le tuer.
C'est finalement par son seul vrai meurtre que s'exprime l'humanité
retrouvée de Tolly puisque ne servant plus sa seule personne, mais c'est
aussi celui qui le perdra dans un remarquable final où son titubement
final aura été inspiré à Fuller par À bout de souffle (1960).
Sorti en dvd zone 2 français chez Wild Side
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Une autre scène qui je pense doit avoir influencé Godard pour la fin d'A bout de souffle est la fin de Pushover de Richard Quine, un très bon film noir également
RépondreSupprimerEn fait si influence manifeste il y a ça serait plutôt l'inverse puisque le film de Fuller est sortit un an après "A bout de souffle". Ce serait flatteur pour Godard qui admirait pas mal Fuller je crois.
RépondreSupprimerPar contre bien vu pour Pushover effectivement la fuite finale est très proche de celle désespérée de Fred McMurray. J'aime beaucoup ce Richard Quine aussi j'en parlais ici sur le blog d'ailleurs http://chroniqueducinephilestakhanoviste.blogspot.fr/2011/08/du-plomb-pour-linspecteur-pushover.html