Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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jeudi 26 juillet 2018

Daisy Clover - Inside Daisy Clover, Robert Mulligan (1965)


Daisy Clover, du haut de ses quinze ans, rêve de devenir une vedette à Hollywood. Remarquée lors d'une audition par le producteur Raymond Swan, la jeune fille devient très vite une étoile montante. Mais pour mériter sa place, elle doit laisser son passé de côté pour donner à la place à son public une image d'un véritable conte de fées, inventé de toute pièce. Cette fille des quartiers pauvres découvre alors le monde merveilleux du cinéma mais aussi l'envers du décor.

A première vue, Daisy Clover semble s’inscrire dans le courant des grands puddings musicaux et rétro hollywoodiens des années 60 dont l’échec conduira à l’avènement du Nouvel Hollywood. Robert Mulligan perverti pourtant l’emballage clinquant en adaptant le roman de Gavin Lambert paru en 1963. Ce dernier était jusque-là surtout connu pour son travail de scénariste et notamment par le fait de la sensibilité et problématiques gay qu’il y glissait, le roman Inside Daisy Clover étant une manière de montrer frontalement la noirceur de l’envers du décor. Robert Mulligan ajoute à cela sa thématique récurrente de la perte d’innocence et du passage à l’âge adulte.

L’adolescente Daisy Clover (Nathalie Wood) ne se doute pas ainsi de la parenthèse enchantée que constitue sa vie modeste dans une caravane avec sa mère toquée et excentrique (Ruth Gordon). Le contexte de la Grande Dépression appelle ainsi la jeune fille à un ailleurs plus lumineux mais cet environnement lui laisse pourtant encore ce que la célébrité lui refusera toujours : le choix. La scène triviale où un camarade se montre trop entreprenant et qu’elle repousse brutalement annonce la suite du film. Dans le contexte clinquant du monde du spectacle, les assauts sont plus insidieux et tordu avec pour objectif de vous posséder littéralement, au-delà de la seule facette sexuelle. 

Cette possession prend une dimension funeste avec le glacial « prince des ténèbres » Swan (Christopher Plummer) prêt à spolier sa vedette en devenir de son passé, sa famille et son identité pour offrir un joyau vierge à son public. Le visage plus séducteur de la vedette Wade Lewis (Robert Redford) n’en dissimule pas moins un autre prédateur qui apaise ses propres démons – une homosexualité sous-entendue mais qui était explicite dans le roman de Gavin Lambert, atténuée à la demande de Redford – en soumettant les jeunes femmes à son charme.

Robert Mulligan fait de ce monde du spectacle un mausolée (la photo façon musée de cire de Charles lang) fait de gigantesques studios désertiques où se perd la silhouette frêle de Daisy. La célébrité est une chimère qui ne se ressent que par des demandes d’autographes (dont l’aspect factice de bonheur par procuration est annoncé dès le début avec la photo de Myrna Loy) dans les instants les plus sinistres du récit (l’épisode du motel lugubre dans un coin perdu d’Arizona) ou des fondus enchaînés de coupure de journaux. Ce clinquant hollywoodien n’existe que quand il est capturée sur pellicule dans les rares mais brillantes séquences musicales, toujours contrebalancée par un réel sinistre. 

La solitude de l’héroïne se maintient d’ailleurs dans ces numéros musicaux, que ce soit la danse au firmament des étoiles dans le tonitruant You're Gonna Hear from Me où les jeux de miroirs de The Circus is a Wacky World. L’envers du conte de fée se signale dans la continuité de ces maigres moments fastueux, que ce soit la présentation à des spectateurs fantômes ou la crise nerveuse et silencieuse – la bande-son refusant même cette perte de contrôle à l’héroïne, constamment muselée – de Daisy ne pouvant plus masquer son être profond sous les sourires.

 
Nathalie Wood trouve peut-être là son meilleur rôle (s’appuyant certainement sur son vécu d’adolescente vedette et exposée), aussi convaincante dans le registre tourmenté et soumis que celui, indomptable, qui par son seul charisme empêche le film d’être totalement déprimant. Tout est dit dans les dernières minutes avec ce suicide avorté par les circonstances qui conduit à un triomphale reprise en main. 

Sorti en dvd zone 2 français chez Warner

2 commentaires:

  1. j'aime beaucoup ce film "méconnu" de Mulligan sur l'envers du décor Hollywoodien. Merci d'en parler..

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    1. Effectivement un Mulligan injustement méconnu, je crois que ce fut un gros échec commercial à sa sortie ceci explique cela du coup un peu expliqué pa d'autres titres plus fameux...

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