En 1876, dans les
mines de charbon de Pennsylvanie, des mineurs sont sans défense, exploités de
façon éhontée pour les besoins de l'industrie en plein essor. Une seule
consolation dans leur misère, les exploits des "Molly Maguires",
société secrète qui venge par la violence les injustices faites aux ouvriers.
La police décide alors d'infiltrer cette organisation et envoie sur place un
détective, qui réussit à entrer en contact avec eux.
The Molly Maguires
constitue pour Martin Ritt un retour aux sources de ce qui est le fil rouge de
sa carrière mais aussi de sa vie à savoir son engagement de gauche. Il débute
ainsi au théâtre dans des pièces en réaction aux injustices sociales ayant cours
durant la Grande Dépression, d’abord en tant qu’acteur (étant un des seuls
acteurs blancs à jouer dans la pièce afro-américaine Porgy and Bess) puis metteur en scène de pièces de gauche radicale.
Bien que n’ayant pas adhéré au Parti Communiste, cela lui vaudra évidemment
quelques ennuis aux heures sombres du maccarthysme mais il échappera fort
heureusement à la liste noire. Cette veine sociale se prolonge lorsqu’il passe
à la réalisation et ce dès son premier film L’Homme qui tua la peur (1957), récit de lutte sociale sur fond de racisme dans le
milieu des dockers. Ces thématiques sont tout aussi frontalement abordées dans The Molly Maguires et son monde des
mineurs, Norma Rae (1979) et l’exploitation
des travailleurs en usine.
Les succès critiques et publics récemment rencontrés avec Le Plus sauvage d’entre tous (1963), L’espion qui venait du froid (1965) et
le western Hombre (1967) vont donc
permettre à Ritt de revenir à cette approche engagée. Le film s’inspire de faits
réels sur les Molly Maguires groupuscule de migrants irlandais en lutte contre
les patrons d’exploitations minières (à la fin du 19e siècle en Pennsylvanie)
à travers des actions radicales comme le sabotage ou la séquestration d’industriels.
Le scénario (adapté d’un roman d’Arthur H. Lewis) brosse autour de ce cadre une
intrigue romanesque où se fondent tous les questionnements habituels de Ritt
autour de la lutte sociale, le rapport entre l’individu et le collectif.
Tout
le dilemme du film repose sur la notion de survie et ce que l’on est prêt à
faire pour subsister. Pour Jack Kehoe (Sean Connery) et ses acolytes Molly
Maguires, la voie de la violence semble le seul recours à l’injustice. Pour James
McParlan (Richard Harris), policier infiltré chez les mineurs, la fin justifie
les moyens afin d’échapper à un dénuement qu’il ne connaît trop bien. La belle
Mary Raines (Samantha Eggar) se pense elle capable de céder au premier homme
suffisamment riche et vaillant qui pourrait la sortir de cette fange. Tous
verront leurs convictions ébranlées dans le déroulement du récit.
Ce dilemme passe par les mots pour Mary qui en tant que
femme n’a pas encore la possibilité de se libérer par les actes. Les hommes s’avèrent
plus taiseux, Ritt excellant à faire comprendre leur radicalité de manière
diserte (une phrase de Harris face au policier à qui il rend des comptes suffit
à exprimer toute sa frustration), dans les manifestation viriles et tout
simplement par l’environnement sinistre de cette communauté minière. Conditions
dangereuses des tunnels, demeures austères et sans confort et un salaire
minimal amputé de la moindre erreur ou concession attisent ainsi cette colère.
Tous les personnages vacillent pourtant au point de bascule qui pourrait les
rapprocher de leur but, l’humanité de la camaraderie et/ou de la romance
hésitant face à la simple quête matérielle ou idéologique.
Richard Harris se
montre d’une brillante ambiguïté, le cynisme et l’héroïsme se disputant
constamment dans ses actes au contact de ses mineurs qu’il trahit et admire à
la fois. Sean Connery (fraîchement et provisoirement échappé de son rôle de
James Bond) n’est pas le militant forcené que la brillante et silencieuse
introduction laisse croire, préférant corriger plutôt que tuer un patron lors d’une
action contrairement à ses amis. Le personnage pivot est celui de Mary qui
tourne le dos à ses velléités de fuite face à une morale qu’elle aura
finalement conservée quand les protagonistes masculins, proche de la victoire
ou d’une défaite inéluctable, font preuve d’un jusqu’auboutisme fatal pour leur
vie ou leur conscience - ce qui les rend plus vulnérables qu'un personnage désincarné comme le chef de la police ancien mineur ayant aussi basculé par ambtion. Une œuvre absolument captivante et un des sommets de la
filmographie de Martin Ritt.
Sorti en dvd zone 2 français chez Paramount
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