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jeudi 19 novembre 2020

His House - Remi Weekes (2020)

Un couple de réfugiés sud-soudanais, perdent leur fille dans une tempête en pleine mer tandis qu'ils fuient la guerre civile. Arrivés à Londres, ils luttent pour s'adapter à leur nouvelle vie. Cependant, le lieu où ils sont logés, en attentant leur régularisation, semble être habité par une force mystérieuse.

His house est une belle proposition de cinéma fantastique qui croise le réalisme social à son postulat surnaturel. On va suivre les premiers pas sur leur terre d’accueil anglaise de Bol (Sope Dirisu) et Rial (Wunmi Mosaku), un couple de réfugié soudanais ayant fui la guerre civile de leur pays. Ils restent marqués par la perte tragique de leur fille Nyagak, morte noyée durant leur périlleux voyage, mais tentent de surmonter leur douleur pour s’adapter à leur nouvel environnement. Ils vont être logé dans un appartement dont les phénomènes étrange va cependant les ramenés à leurs frayeur les plus intimes.

Remi Weekes parvient à entremêler dans sa mise en scène la peur de l’étranger et celle de l’étrange. Le statut de migrant en sursis leur est constamment rappelé aux personnages par la façon dont leurs interlocuteurs appuient le fait qu’ils devraient se satisfaire des conditions austères, des droits limités et de la condescendance qu’on leur offre. Cela se manifeste par l’espace de l’appartement insalubre où ils seront logés. Ce lieu est pourtant le vecteur de leur insécurité sociale et de fébrilité mentale. L’influence du Shining de Stanley Kubrick (1980) plane, en posant une forme de terreur gothique dans un cadre contemporain et surtout en en faisant le prolongement des failles psychologiques des personnages. 

L’hommage est explicite mais brillant lors d’une sortie de Rial qui s’égare dans son quartier banlieusard dont toutes les rues se ressemblent et conduisent à des impasses. On ressent à la fois la perte de repère dans un cadre inconnu s’apparentant à un labyrinthe, mais aussi l’hostilité de ce lieu où l’on n’est pas le bienvenu. Remi Weekes (qui signe également le scénario) a d’ailleurs l’intelligence, lors de l’altercation de Rial avec des adolescents racistes, d’en faire des noirs pour bien faire comprendre que la possible solidarité ne viendra pas de ce type de proximité (à l’inverse de l’agent plus conciliant joué par Matt Smith). 

Un des points réussis du film est d’intégrer un imaginaire formel africain inquiétant sans forcément convoquer les clichés surexploités du vaudou. Dans cette logique psychanalytique, les apparitions spectrales relèvent du mental des personnages et usent de façon inquiétants des codes esthétiques tribaux de la guerre civile ethniques qu’ils connaissent et ont fui. Tout comme ces peurs sont tapies au fond de leurs âmes, elles le sont dans les murs, les entrailles de l’appartement. Remi Kees use habilement du jump-scare, travaille ses compositions de plan pour faire entrapercevoir l’innommable de manière diffuse en arrière-plan, et façonne certaines images fascinantes. Ces visages apparaissant dans les ténèbres des trous muraux, ces bascules du quotidien au pur onirisme suscitent à la fois la peur et la sidération (Bol passant d’un repas à l’océan de ses cauchemars).

Pourtant, comme le souligne un dialogue de Rial, les personnages ont traversés les pires horreurs et ont vu le plus vil et barbare de ce dont l’humain est capable. Il n’y a pas de graduation dans les phénomènes étranges qui s’avèrent très vite impressionnant. L’interprétation des évènements oscillant entre vrai surnaturel et possible hallucinations, comment le couple peut-il se montrer si vite et facilement sensible au lieu après ce qu’ils ont connu ? La réponse se trouve dans les hallucinations/manifestations ramenant leur fille, qui ne sont associées qu’à la peur et jamais à des souvenirs heureux qui devraient pourtant exister. La dernière partie révèle ainsi brillamment le dessein du film, c’est la culpabilité et non pas le deuil qui hante Bol et Rial. L’émotion prend le pas sur un traitement un poil moins original que ce qui a précédé (la dernière créature au design assez générique), et façonne une catharsis puissant. Les deux acteurs sont excellents, exprimant le déchirement inévitable du migrant entre volonté d’assimilation (Bol) et refuge dans sa culture (Rial). Remi Kees manie ces problématiques dans un bel équilibre entre message social et film de genre pour un beau premier essai.

Disponible sur Netflix

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